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12 mai 2024 7 12 /05 /mai /2024 12:50

Je suis au-delà de la mort - L'Homme étoilé - Librairie L'Armitière

Je ne connaissais pas du tout cet auteur, infirmier en soins palliatifs et instagrameur à succès apparemment, j’ai pris cette BD complètement au hasard à ma bibliothèque (comme très souvent).

Jean est chanteur guitariste dans un groupe de rock dont le succès est croissant. Il s’apprête à se rendre aux Etats-Unis pour enregistrer un premier album. Mais à 32 ans, une mauvaise nouvelle lui tombe sur la gueule : il est atteint d’un cancer des poumons. Prêt à se battre, bien entouré par sa femme et son chien, il renonce momentanément aux Etats-Unis et suit ses premières chimios. A l’hôpital, il rencontre un voisin de chambre odieux, Franck, 65 ans, qui, d’emblée, disqualifie le rock en lui opposant son idole de toujours, Sinatra, et qui semble mépriser le jeune d’à côté en se montrant sarcastique dès qu’il le peut. Jean et Franck se détestent jusqu’au jour où l’aîné l’emmène dans une virée nocturne clandestine et qu’il lui montre son véritable visage, celui d’un type très généreux à qui la vie n’a pas fait de cadeau. Va naître une belle (et courte) amitié.

Cet album se lit en apnée du début à la fin. Il n’y a pas de happy end, il n’y a pas de concessions ni de fioritures dans le récit de ces tragédies de tous les jours. L’humour, heureusement, s’immisce entre les chimios, les vomis, les fourmillements dans les mains, les nausées et la perte des cheveux. La passion pour la musique occupe également une grande place et l’amitié prend tout son sens jusque dans les dernières planches. J’admets que malgré les qualités des dessins, du scénario, de la sensibilité des personnages et des dialogues, j’aurais préféré ne pas lire cette BD qui me rappelle tant de souvenirs douloureux. Je trouve que la souffrance des proches n’est d’ailleurs que furtivement évoquée dans cet album.  Il me reste à exprimer toute la profonde admiration pour le personnel des soins palliatifs qui fait un travail remarquable ; ce sont de vrais héros, trop souvent oubliés. Il est inutile de dire à quel point cette BD est touchante, empathique et totalement bouleversante...

Je suis au-delà de la mort

(La Laiterie, salle de spectacle strasbourgeoise que je connais bien !!)

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30 avril 2024 2 30 /04 /avril /2024 09:48

Casterman - Olympe de Gouges

Cette énorme BD trônait dans ma bibliothèque depuis quelques années (elle est sortie pour la première fois en 2012). Nous en avons fait une lecture commune avec mon ado de fille.

Née d’une union illégitime entre le marquis de Pompignan, un lettré poète, et une fille du peuple, Anne-Olympe, la petite Marie grandit en Occitanie. Mariée très jeune à Louis-Yves Aubry qu’elle n’aime pas du tout et qui lui donne un fils, elle sera veuve à 18 ans et c’est à ce moment-là qu’elle choisit le nom d’Olympe de Gouges (plutôt que celui de « Veuve Aubry »...) Amoureuse de Jacques Biétrix, un riche entrepreneur, elle refuse pourtant de l’épouser et lui fait même accepter d’autres amants. Il consent à tout, paie ses souhaits et folies. A Paris, elle embauche Bertrand, un secrétaire et va s’adonner à l’écriture d’une pièce de théâtre qui défend les Noirs et dénonce l’esclavagisme. Après la Révolution, s’étant brouillée avec Marat et Robespierre, elle rallie le camp des Girondins, n'aura de cesse de placarder ses opinions sur des affiches, ce qui lui vaudra la peine d’être guillotinée, « victime de mon idolâtrie pour la Patrie et pour le Peuple ».

C’est une sacrée masse d’informations à ingérer que ce pavé-là ! Il faut bien conter toute la vie de cette femme pour la comprendre et appréhender ses combats. Présentée comme fonceuse, travailleuse, audacieuse, libertine, elle va à l’encontre de tous les (milliers) de préjugés et idioties de cette fin XVIIIè siècle avec un optimisme et une conviction assez remarquables. Attachée à sa sœur, attachée à son fils Pierre, elle semble ne pas avoir vraiment besoin des autres.  Pourtant, elle a eu Jacques Biétrix pour les sous et un secrétaire pour ses œuvres. J’ai découvert à quel point elle a souhaité l’égalité pour tous et défendu impitoyablement la cause des Noirs. Nul besoin de relire La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, elle y est dans son intégralité dans la BD. Si j’avais un petit reproche à formuler à ce remarquable hommage, c’est qu’il est tout de même exigeant et ambitieux, j’ai bien senti mon ado de fille se laisser distraire et se moquer des visages dessinés plutôt que de s’intéresser au contenu, il faut dire que j’étais larguée aussi par moments, la Révolution est une de mes lacunes et je me suis un peu perdue au milieu de tous les personnages... En fin de BD, un récapitulatif intéressant permet d'y voir plus clair. A noter que certaines idées d’Olympe seront reprises plus tard par d’autres féministes, Louise Weiss notamment a insisté sur le fait que si la femme est jugée pour un délit de la même manière qu’un homme, elle devrait aussi pouvoir voter comme un homme. Formidable précurseur (précurseure, précurseuse, précurseresse ?) encore trop souvent oubliée ou méconnue, Olympe de Gouges mérite qu’on la connaisse un peu mieux. Et puisque La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne est au programme de Première, cette BD est un excellent complément de lecture qui permet de contextualiser les écrits de cette femme remarquable.

J’en profite pour participer à la der des der du challenge Les classiques c’est fantastique qui portait sur la littérature engagée, MERCI à Moka pour ces douze mois que j’ai presque tous honorés, moi qui ai tant de mal à suivre un rythme de challenge !

De Catel, j'avais adoré Ainsi soit Benoîte Groult et Kiki de Montparnasse.

« Aujourd’hui j’ai compris l’ordre de la nature humaine qui n’est pas celui de la société. Il ne peut y avoir l’amour conjugal et l’amour passion dans le même corps. »

« Le mariage est le tombeau de l’amour. »

« Très jeune, j’ai compris qu’une femme ne peut être condamnée à demeurer celle d’un seul homme si celui-ci est mort... »

« Article premier : La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. »

"Article 10 : Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes fondamentales, la femme a le droit de monter sur l'échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune ; pourvu que ses manifestations ne troublent pas l'ordre public établi par la loi." 

Olympe de Gouges, bd chez Casterman de Bocquet, Catel

 

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22 avril 2024 1 22 /04 /avril /2024 11:45

Petit pays, bd chez Dupuis de Faye, Sowa, Savoia

Je ne pouvais pas passer à côté de l’adaptation d’un roman magnifique écrit par un de mes artistes préférés.

Après une enfance insouciante, gaie et colorée sous le soleil de Bujumbura, au Burundi, les parents du petit Gabriel se séparent, la guerre civile éclate, le génocide sévit alors qu’il n’y a qu’une petite différence de nez entre les Hutus et les Tutsis... Gabriel va voir mourir une partie de sa famille, sa mère devenir folle et va devoir s’exiler en France. (résumé plus détaillé ici)

Pari réussi ! Si la BD prend quelques libertés avec le roman (des ajouts parfois étranges comme ce vautour que la famille a domestiqué, par exemple...), qu’elle a tendance à appuyer sur les clichés, elle a vraiment gardé l’esprit du roman, cette dichotomie entre le monde d’avant et celui d’après, la violence qui heurte et tue l’innocence de l’enfance, cette poésie qui effleure les bons moments et surtout la nostalgie de la paix à la fin du livre. Dans Brut, Gaël Faye a confié qu’il s’est reconnu dans les visages et les paysages dessinés parce que Sylvain Savoia s’est inspiré de documents personnels, photos de l’époque et photos de famille de l’artiste (ça vaut de l’or). J’ai bien aimé me laisser surprendre par des personnages et des panoramas que je voyais autrement mais qui ne m’ont pas déçue. L’impasse où vit Gabriel et ses copains est vraiment différente de celle que je m’étais créée, par exemple. J’ai trouvé très juste de représenter les scènes de guerre dans la crudité de leur réalité et ne pas omettre les horreurs racontées dans le livre d’inspiration autobiographique. On sent une belle cohésion entre les trois auteurs pour aboutir à un ouvrage de 126 planches. Bref, lisez et le roman et la BD qui valent vraiment le détour, ne serait-ce que pour commémorer le massacre de 1974.

--- coup de coeur ---

Ces lignes que j’aime tellement :

« Des jours et des nuits qu’il neige sur Bujumbura.
Des colombes s’exilent dans un ciel l’auteur, les enfants des rues décorent des sapins de mangues rouges, jaunes et vertes.

Des paysans descendent tout schuss de la colline à la plaine, dévalent les grandes avenues dans des luges de fer et de bambou. Le lac Tanganyika est une patinoire où des hippopotames albinos glissent sur leurs ventres mous.

Des jours et des nuits qu’il neige sur Bujumbura.
Les nuages sont des moutons dans une prairie d’azur. Les casernes des hôpitaux vides, les prisons des écoles saupoudrées de chaux. La radio diffuse des chants d’oiseaux rares.

Le peuple a sorti son drapeau blanc, se livre des batailles de boules de neige dans des champs de coton. Les rires résonnent, déclenchent des avalanches de sucre glace dans la montagne.

Des jours et des nuits qu’il neige sur Bujumbura.
Les soûlards du cabaret boivent au grand jour un laid chaud dans des calices de porcelaine. Le ciel démesuré s’emplit d’étoiles qui clignotent comme des illuminations de Times Square. 

Des jours et des nuits qu'il neige sur Bujumbura. Te l'ai-je déjà dit ?

Les flocons se posent délicatement à la surface des choses, recouvrent l'infini, imprègnent le monde de leur blancheur absolue jusqu'au fond de nos cœurs d'ivoire. Il n'y a plus ni paradis ni enfer. Demain, les chiens se tairont. Les volcans dormiront. Le peuple votera blanc. Nos fantômes en robe de mariée s'en iront dans le frimas des rues. Nous serons immortels.

Depuis des jours et des nuits, il neige.

Bujumbura est immaculé.»
 

Petit pays, bd chez Dupuis de Faye, Sowa, Savoia

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16 avril 2024 2 16 /04 /avril /2024 11:05

Mes mauvaises filles de Zelba

J’ai emprunté cette grosse BD sans savoir de quoi elle parlait.

Bri n’a plus que quelques heures à vivre. Hospitalisée à la suite d’une maladie pulmonaire qui l’a handicapée toute sa vie, elle a toujours dit à ses filles qu’elle ne voulait pas d’un acharnement thérapeutique. Yvla et et Liv, les deux sœurs, ont ainsi choisi un moment précis pour la mort de leur mère adorée mais les heures qui les séparent de ce rendez-vous morbide ne sont faites que de doutes, de souvenirs, de pleurs. Elles occupent ensemble la chambre de leur mère. Lorsqu’elles doivent enlever le masque à oxygène et augmenter la morphine, accompagnées d’un médecin qui finalement réalise ces actes, douze longues minutes de souffrance s’écoulent encore jusqu’à la mort effective de la mère. La vie, évidemment, poursuit son cours après la mort de la mère qui reste présente à la manière d’une ombre bienveillante. Le père se remarie, Liv semble avoir rencontré l’amour, Yvla accouche de son deuxième enfant... et le souvenir de cette mère formidable reste toujours dans leur esprit.

Quelle claque ! Moi qui ai vécu les derniers jours de vie de mon père, j’ai évidemment pleuré lors de la lecture de certaines planches (qui pourrait rester indifférent ? ) C’est sans détours ni concessions que l’autrice évoque un thème encore tabou et complexe, s’inspirant de son propre vécu puisqu’elle a perdu sa mère en 2006 et qu’elle a décidé d’entreprendre cette BD le jour même de la mort de Vincent Lambert, en 2019. L’histoire exprime de manière très juste l’évolution des sentiments, allant de la culpabilité à la certitude de bien faire, en passant par les tiraillements du doute. La complicité entre les deux sœurs est remarquable et ce trio de femmes m’a profondément émue. La mère, d’une santé fragile toute sa vie, a toujours ménagé et épargné ses filles et la BD souhaite qu’elle continue à les accompagner en douceur même après sa mort. Si le thème évoqué est éprouvant, je souhaite faire de cette lecture un coup de cœur parce que c’est une réussite à tous points de vue, les dessins  - variés - m’ont autant plus que le scénario avec ses dialogues tantôt drôles, tantôt graves ; c’est un sujet essentiel qu’on devrait évoquer dans les familles. Une belle postface évoque l’affaire ô combien douloureuse et tumultueuse de Vincent Lambert.

« 12 minutes à suffoquer sur son lit de mort... c’est simplement inadmissible. Ces 12 minutes-là ont duré une éternité. C’était barbare. Bestial. Non ! Pas bestial. On ne laisserait pas une bête crever ainsi. Si le professeur Keller avait eu le droit de lui injecter un produit qui l’endorme et arrête son cœur, elle serait partie en douceur. »

Mes mauvaises filles de Zelba

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4 avril 2024 4 04 /04 /avril /2024 13:19

L'abolition : le combat de Robert Badinter - Marie Gloris Bardiaux-Vaïente  - Librairie Mollat Bordeaux

-     Le combat de Robert Badinter     -

En novembre 1972, deux hommes sont exécutés, condamnés par la cour et le jury à la peine de mort. L’un est coupable de crime, Claude Buffet, l’autre influencé par le premier, Roger Bontems, est cependant innocent. Robert Badinter et Philippe Lemaire sont les avocats chargés de leur défense et ils acceptent difficilement que la peine de mort sévisse encore. Pompidou n’ira pas jusqu’à les écouter et gracier Bontems. En 1976, à Troyes, un jeune garçon est kidnappé puis retrouvé mort. Le coupable, Patrick Henry, est retrouvé ; il est évident qu’il s’agit d’un monstre incapable d’éprouver de l’empathie. Badinter va le défendre ou plutôt tenter d’éradiquer la sanction capitale. Convaincu, le jury opte pour la réclusion criminelle à perpétuité. En 1981, Mitterrand promet qu’il se battra pour abolir la peine de mort. Une fois élu, Badinter devient Garde des Sceaux et, en septembre 1981, la France devient le dernier pays d’Europe occidentale à abolir la peine de mort. Le premier gracié est Philippe Maurice (et c’était une bonne chose puisque, devenu historien en prison, il est libéré en 2000 et devient chercheur au CNRS).

BD édifiante et émouvante, elle insiste sur le fait que Badinter s’est battu pour une cause noble et emplie d’humanité, en dépit de ses intérêts personnels puisqu’il a assisté, en 1987, au procès de Klaus Barbie, le criminel à l’origine de la mort de son père, exterminé à Sobibor mais... « l’abolition n’admet aucune exception. » A noter également que les Français étaient favorables, à l’époque, à 63%, à la peine de mort donc ni Badinter ni Mitterrand ne semblaient être populaires sur ce point. La BD se lit bien, elle est prenante, les couleurs sobres et sombres rehaussent l’aspect solennel de cet événement historique. Il me semble que les convictions et le charisme de Robert Badinter y sont bien traduits. Petit bémol quant aux portraits des hommes politiques, le trait aurait pu être plus précis pour les rendre davantage reconnaissables. Publiée en 2019, en 2024 à l’heure de la mort de Badinter, elle peut très bien se lire et se relire, surtout par des plus jeunes (c’est accessible dès 13-14 ans, je dirais). Ma fille l'a dévorée elle aussi.

« La défense, c'est ne jamais céder un pouce de terrain à l'adversaire, ne jamais rien tenir pour acquis à l'accusation, c'est refuser même d'admettre l'évidence. »

La belle citation de Victor Hugo est reprise plusieurs fois : « Je vote l’abolition pure, simple et définitive de la peine de mort. »

Encore Hugo : « La peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie. »

L'Abolition : Le Combat de Robert Badinter - (Malo Kerfriden / Marie Gloris  Bardiaux-Vaïente) - Documentaire-Encyclopédie [CANAL-BD]

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22 mars 2024 5 22 /03 /mars /2024 10:17

Le Choeur des femmes Le Choeur des femmes — Éditions Le Lombard

Ça fait des années que je fais le vœu de lire le roman de Martin Winckler, je me suis (pour l’instant) rabattue sur cette adaptation bien roborative (233 pages).

Jean Atwood est une brillante étudiante en médecine. Cheveux courts, allure dynamique, elle rêve de chirurgie gynécologique mais elle doit passer six mois de stage auprès du Dr Karma, un gynécologue un peu particulier. En effet, il lui arrive souvent, lors d’une consultation, de ne pas faire déshabiller les femmes, de simplement les écouter et de donner de la valeur à ce qu’elles ont à dire. Jean est d’abord complètement réfractaire à ces méthodes puis, petit à petit, par le truchement de son propre parcours notamment, elle va comprendre tout l’intérêt des principes de ce médecin féministe et respectueux du corps de la femme.

Quelle claque !! Je pense qu’on peut distinguer la partie médicale qui s’apparente à un essai vulgarisé de ce que pourrait/devrait être la gynécologie aujourd’hui et la partie plus romancée portant sur le passé de Jean, ses amours, ses parents. Les deux me semblent réussis même si j’ai préféré la partie médicale (une fois n’est pas coutume...) Et je réalise qu’en tant que femme, on accepte des diktats et des situations humiliantes sans même s’en rendre compte. Qui n’a jamais mal vécu une consultation gynéco ? Les femmes, vous a-t-on déjà demandé votre avis sur le confort de la position d’examen ? Qui n’a pas été au moins une fois rat de laboratoire à l’hôpital, examinée sans qu’on vous regarde vraiment, vous, sans qu’on vous parle et vous demande votre avis ? Pour avoir passé pas mal de temps dans les hôpitaux au service gynéco, j’ai connu une seule expérience vraiment rassurante (une opération bégnine) où je me suis sentie écoutée, entourée, soutenue, et par conséquent, cette expérience n’a pas été douloureuse du tout contrairement à toutes les autres. Bref, je raconte ma vie. Revenons-en à la BD. C’est sous le regard bienveillant de l’auteur, Martin Winckler, que la dessinatrice a travaillé son œuvre. J'ai beaucoup aimé les couleurs claires qui peuvent rappeler l'univers hospitalier avec un vert qui tend quand même plutôt à quelque chose de plus doux. Il est intéressant de démarrer l’histoire selon le point de vue d’une femme, celui de Jean, jeune et moderne, qui se dit d’emblée lassée des blablas des patientes à qui il ne faudrait pas accorder tant d’importance. Avant de revenir sur ses propres préjugés, de comprendre que, si elle est froide et distante, l’explication se trouve dans sa propre histoire. J’ai aimé découvrir les interrogations des différentes femmes, de celles qui ne savent rien, de celles qui ont mal compris, de celles qui doutent, de celles qui n’osent pas, de celles qui se sentent différentes, de celles qui ont peur et qui sont si nombreuses. Qu’il est bon de se dire qu’il existe des hommes capables d’essayer de comprendre les femmes et ne pas les enfermer dans des stéréotypes. BD (ou roman, ou les deux) à lire absolument.

« Un soignant, ça ne doit pas se comporter comme un juge ou un flic ! »

Extrait du Manifeste de la position à l’anglaise : « Aujourd’hui, alors les femmes ont les mêmes droits et obligations devant la loi que les hommes, alors que personne n'a le droit de les asservir ou de les infantiliser, elles sont encore contraintes, lors de chaque examen gynécologique, de s'allonger sur le dos, cuisses écartées, sexe exposé, dans une position humiliante imposée par les médecins, sans aucune nécessité médicale. La posture dite « à l'anglaise » (sur le côté) permet tous les gestes gynécologiques courants, ainsi que de procéder à des accouchements en toute sécurité et est pratiqué dans de nombreux pays du monde. Nous EXIGEONS que les médecins français proposent à leurs patientes de l'adopter, si elles le désirent, en lieu et place de la position machiste et archaïque actuelle. Nous EXIGEONS que cette obligation soit inscrite dans le code de déontologie et dans le code de santé publique, ainsi que dans les guides remis à tous les médecins et étudiants en médecine. »

-     COUP DE COEUR     -

Le Choeur des femmes, bd chez Le Lombard de Winckler, Mermilliod

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9 mars 2024 6 09 /03 /mars /2024 17:13

Les Indégivrables - Tome 3 - Les indégivrables - Le Grand Moi - Xavier Gorce  - broché - Achat Livre ou ebook | fnac

Les manchots sur leur banquise sont assez insupportables et arrogants et ils ressemblent étrangement à la communauté des humains. De nombreuses thématiques sont passées au crible de leur perception cynique : les riches et leur mauvaise foi, la notion de mérite, les rencontres, l’amour, la vie conjugale, le vote, l’écologie, les religions, le féminisme ou encore le hijab.

Le dessin est d’une simplicité enfantine, d’un minimalisme épuré, et pourtant, il fait mouche. Les petites phrases, les dialogues lapidaires et les remarques assassines vont dans le même sens : brièveté et efficacité. Xavier Gorce a longtemps publié ses planches dans Le Monde qu’il quitte en 2021. J’ai bien aimé découvrir ces petits nombrilistes, hautains et impertinents et j’ai souri plus d’une fois. C’est le 3e tome d’une série de cinq.

« Le problème de notre pays, c'est cette culture de l'échec. Alors pourquoi ne pas changer pour celle de la réussite ? Aaaaah mais attention : on y perdrait tout le plaisir de se plaindre ! »

« A défaut de savoir dessiner le futur, effaçons le passé. »

« Plus un type veut te faire saisir à quel point tu as besoin de Dieu, plus tu saisis à quel point ce type a besoin de toi. »

« En tant qu’extrémiste, je tiens à vous remercier, vous tous, les lâches et les idiots, sans qui nous ne serions rien. »

Indégivrables 2022 – Xavier Gorce

 le site de l'auteur

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29 février 2024 4 29 /02 /février /2024 15:48

Dali tome 1

Quand j’étais ado, j’étais fan de Dalí et aller à Figueras à 18 ans avec les copines a été une jubilation.

Salavador Dalí est un jeune écolier très rêveur qui est capable de fixer le mur pendant des heures en cours. Portant les cheveux longs et des habits vieillots, il s’exclut lui-même des camarades de son âge. A la mort de sa mère, son père accepte qu’il quitte sa Catalogne natale et aille faire les Beaux-Arts à Madrid. Là-bas, il se démarque encore une fois par ses excentricités, son immense talent et sa passion pour Vélasquez. Grâce à ses deux nouveaux amis, et non des moindres, Federico Garcia Lorca et Luis Buñuel, il s’ouvre au monde, change de look et rêve de conquérir Paris. L’album se clôt sur la rencontre avec Gala, la femme d’Eluard.

Si je me réjouissais de découvrir ce début de biographie, j’en sors frustrée, non pas de n’avoir rien appris mais de ne pas avoir été passionnée par ce que j’ai lu. Certes, la part de rêve propre au courant surréaliste est bien présente et la plongée dans les années 20 est réussie mais un je-ne-sais-quoi m’a empêchée de m’attacher à ce Dalí jeune, un peu niais, agaçant et complètement à l’ouest (bon, il devait l’être, on est bien d’accord). Il y a cependant des passages drôles et cocasses comme la passion de Dalí pour les aisselles féminines épilées ou cette réincarnation en Méphisto, un chat machiavélique qui lui ressemble tant. J’ai aimé aussi la référence à Jérôme Bosch dont les points communs avec la peinture de Dalí ne sont plus à prouver. J’attends donc la suite de cette BD que je lirai évidemment, en espérant un peu plus d’audace et d’extravagance dans le dessin et dans le propos. (Je veux bien vos retours sur le film de Quentin Dupieux si vous l'avez vu.)

« La Catalogne a fait de moi son héros. Je suis le roi incontesté de Madrid. Maintenant autour de Paris... de succomber à Salvador Dali ».

Dali tome 1

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15 février 2024 4 15 /02 /février /2024 13:09

Zoc - Jade Khoo - Dargaud - Grand format - Librairie Passages LYON

Pouvoir ? Malédiction ? Zoc attire l’eau avec sa longue chevelure, capable ainsi de créer rivières et fleuves. Elle ne sait que faire de cette particularité et essaye de trouver du travail parce qu’elle n’aime pas l’école. Chargée de détourner le cours de l’eau d’un village inondé, elle rencontre Kael qui, lui, prend feu lorsqu’il est en contact avec une personne trop malheureuse. De leur amitié va naître une belle collaboration : lorsque l’une va capter et attirer l’eau, l’autre va assécher les crues.

Original et onirique, cet album allie avec malice l’eau et le feu dans un univers fantastique tout de même ancré dans notre réalité. Le graphisme rond et coloré fait penser aux mangas et au style de Miyazaki. Entre fable et récit initiatique, cet album peut se lire à tout âge ; les dialogues sont d’ailleurs peu nombreux pour laisser toute la place aux beaux dessins. Les personnages sont tous attachants, mention spéciale pour le père de Zoc qui, sous des allures bourrues et une grosse frange qui lui masque les yeux, se révèle compréhensif et empathique. Pour une jeune dessinatrice, c’est une belle réussite, elle a su créer une ambiance douce et réconfortante sans être mièvre.

Zoc - (Jade Khoo) - Heroic Fantasy-Magie [CANAL-BD]

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6 février 2024 2 06 /02 /février /2024 10:15

Une éducation orientale - Charles Berberian - Casterman - Grand format -  Librairie Sillage PLOEMEUR

Comme pour le monde entier, l’auteur-dessinateur a vu son quotidien et ses projets stoppés net à l’arrivée du Covid en mars 2020. Il compare cette situation à celle de Beyrouth en 1975, lorsque la guerre civile l’a contraint à rester dessiner chez lui. Lui et sa famille ont passé beaucoup de temps cloîtrés dans le couloir de leur appartement sans savoir combien de temps les fusillades allaient durer. Si le refuge n’est pas le dessin, Charles et son frère Alain se retrouvent chez la grand-mère Yaya qui ne sait jamais rien refuser à ses petits-fils et les couve comme une mère poule. Les explosions survenues dans le port de la ville sont également évoquées, les rescapés racontent : les vitres qui ont éclaté, les gens qui ont demandé des nouvelles de leurs proches, les chats qui s’étaient cachés quelques minutes avant le drame.  

Ce que j’ai complètement adoré dans cet album un peu foutraque, c’est la variété des dessins. Du croquis en noir et blanc à la magnifique aquarelle en couleurs, en passant par des dessins hachurés au stylo, l’auteur se montre polyvalent flexible dans son art. C’est une merveille à regarder. Côté scénario, c’est un peu décousu mais l’hommage que Berberian rend à sa ville tant aimée, si combattive, est touchant, à tel point qu’appeler son album « une enfance beyrouthine » aurait été plus juste. Certains personnages sortent du lot comme l’immuable Yaya, le grand frère Alain qui a toujours été le modèle de Charles. Et puis, la dimension fouillis prend tout son sens, elle est comme la ville, elle est comme les souvenirs qui affluent sans être ni organisés, ni bien ordonnés. Une lecture que je recommande.

« Cette ville a survécu au chaos tellement de fois, elle s’est reconstruite avec l’idée que le chaos était une manière de fonctionner. »

 

Une éducation orientale de Charles Berberian

Une éducation orientale

Une éducation orientale : Beyrouth d'hier à aujourd'hui par Charles  Berberian – L'EssentiART

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