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1 avril 2024 1 01 /04 /avril /2024 14:29

Goldman - Ivan Jablonka - Seuil - ebook (ePub) - Librairie Gallimard PARIS

Je n’ai pas l’habitude de lire ce genre de livres mais j’honore un cadeau qu’on m’a fait.

Jean-Jacques Goldman est né en 1951 de parents immigrés juifs non-pratiquants mais fiers de leurs origines. Le père, gérant d’une enseigne de sport, a toujours souhaité tout faire pour s’intégrer au mieux à la société française et il a réussi. Jean-Jacques a été un élève moyen, un ado plutôt réservé et banal. Attiré par la musique noire, le blues et le gospel, il a délaissé le violon pour la guitare mais ne s’est pas révolté à une époque où il pouvait le faire, en mai 68. Léo Ferré et Michel Berger l’ont convaincu de chanter en français. Il a très tôt rencontré son acolyte, Michael Jones, dans leur groupe commun, Taï Phong. Après insuccès et refus divers, c’est au début de 82 que le succès de Goldman éclate avec « Il suffira d’un signe ». S’étant toujours revendiqué comme un minoritaire, un transfuge, un être fragile, il s’est démarqué par sa banalité, et a conquis un public plutôt féminin et populaire. Il a cependant profité de l’essor des émissions télé, des radios FM, du Top 50 (n’oublions pas qu’il a composé le générique de « Taratata »). Il a longtemps répondu aux lettres de ses fans jusqu’à ce qu’ils soient vraiment trop nombreux, il est resté pudique sur sa vie personnelle toute sa vie. Engagé dans différentes causes humanitaires, il a longtemps rechigné à faire des concerts. Au sommet de son succès, il a fondé ce trio avec Michael Jones et Carole Fredericks. Il s’est habitué au mépris, à la honte d’écouter Goldman, à l’ironie des médias. En 2002, il arrête les tournées, en 2016, il quitte les Enfoirés puis disparaît totalement pour vivre dans le Sud de la France puis en Angleterre avec son épouse, prof de maths.

Oui, j’aime Jean-Jacques Goldman mais mes préférences vont à des chansons moins tout public comme « Nuit », « Chanson d’amour », « Tu manques », « Serre-moi » ou encore « Peur de rien blues ». J’ai également un souvenir très net de « La vie par procuration » que je chantais non-stop à sa sortie avec des copines, je n’avais même pas dix ans. J’ai réalisé, à travers cette lecture, à quel point Goldman a marqué plusieurs décennies, que ce soit par sa propre carrière ou par les chansons qu’il a écrites pour les autres. Mêlant différents genres, il est resté inclassable ; rocker sans en avoir ni le look, ni le mode de vie. Il a réussi sa sortie du showbiz, s’effaçant complètement, d’abord des médias, puis mettant un terme à tout projet musical. L’auteur le compare à Pérec puis à Rousseau dans des parallèles pas inintéressants du tout. Plus largement, il balaie le paysage de la chanson française des années 80 à 2000. Qu’est-ce que j’ai appris ? Que Goldman avait un demi-frère bandit braqueur qui a même été accusé de meurtre en 1969 avant d’être relâché et assassiné dans la rue. Qu’il a travaillé dans le magasin de sport familial jusqu’à ses 30 ans. Que ses chansons évoquent les thèmes suivants : le déracinement, l’exil, l’homme vulnérable, les ruptures, la condition minoritaire, entre autres. Qu’il s’oppose farouchement au patriarcat. Que sa partenaire de « Là-bas » a été assassinée par son compagnon.

C’est la première fois que je découvrais cet auteur dont l’écriture m’a plu, ça a été une lecture très agréable, divertissante et plus instructive que prévue 😊

« Trois figures nationales, donc, au miroir des années 1980. Toutes s’adressent à la France des petits : Tapie, jeune loup propriétaire d'entreprises et vainqueur de régates, veut la rallier au parti des gagnants ; Le Pen, vieux loup raciste, jette les immigrés à la vindicte des déçus de la gauche ; Goldman appartient au parti des perdants, mais il leur parle de fraternité et de justice, de rêve et d'avenir, assumant sa nature « dépourvue d'agressivité », au contraire du winner. Alternative au tapisme comme au lepénisme, Jean-Jacques Goldman a commencé sa montée au symbole. »

« Etincelle, telle est la métaphore que Goldman utilise lorsqu’on l’interroge sur le pouvoir fédérateur de ses tubes. L’unique talent qu’il se reconnaît (il parle d’ailleurs en termes de compétences) est la capacité à déceler l’« étincelle enfouie sous des kilomètres de musique ». Non pas voleur de feu, mais cueilleur d’étincelles, le chanteur fait naître une connivence, une émotion au premier degré, instant de magie grâce auquel les gens sont rassemblés au-delà d’eux-mêmes. »

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15 mai 2022 7 15 /05 /mai /2022 13:53

Les Grandes oubliées - Pourquoi l'Histoire a effacé les femmes - broché - Titiou  Lecoq - Achat Livre ou ebook | fnac

- Pourquoi l’Histoire a effacé les femmes - 

                Préhistoire : non, les hommes n’ont pas été les seuls à chasser, les femmes ont eu leur rôle à jouer, elles ont même su espacer les naissances et elles étaient parfois à l’origine des peintures rupestres. Contrairement à notre époque, le sexe féminin a souvent été représenté. Il est vrai qu’on ne dessine pas de vulve aujourd’hui sur les portes des WC publics… Au Néolithique, la sédentarité a engendré des problèmes de violence dus à la notion de propriété. Qui dit inégalité dit femmes placées au rang inférieur. Personne ne sait que le premier auteur connu de l’humanité est une femme, Enheduanna (et le texte est un poème s’adressant à une déesse).

Au Moyen-âge, les femmes jouent un rôle important… un peu partout : chevaleresses, orfaveresses, enlumineuresses, artisanes, bâtisseuses de cathédrale, trobairitz (féminin de troubadour…). Il y a eu des princesses et des reines intelligentes, actives et influentes (Brunehaut qui a permis de créer une justice d’Etat, la police, ou a interdit les mariages forcés).

La Renaissance avec tout ce que la période a de positif ne semble pas concerner les femmes : leur pouvoir s’atténue et elles sont à nouveau considérées exclusivement comme des mères.

Au XVIIIè siècle, nos grands auteurs (Voltaire, Rousseau, La Bruyère, etc) ont accumulé les remarques franchement sexistes à l’égard des femmes et on a nié le rôle important qu’elles ont joué lors de la Révolution. Pour éviter que tous ces hommes au pouvoir soient jaloux les uns des autres, on a choisi une femme, Marianne, pour représenter la République.

Au XIXè siècle, des femmes romancières ont existé mais sont passées aux oubliettes. La femme est montrée comme faible, fragile ou malade (c’est vrai, souvenez-vous de vos lectures). Les féministes existaient pourtant déjà, elles se sont battues pour le droit de vote, les études universitaires, l’indépendance économique des femmes. Julie-Victoire Daubié est la première femme à obtenir le bac puis une licence de lettres en 1871. A la fin du siècle, des « grèves de dignité » ont mobilisé des ouvriers et ouvrières surtout pour dénoncer le harcèlement sexuel de certains chefs.

Pendant la Première Guerre mondiale, les viols de guerre étaient nombreux et le statut de la femme, plutôt que d’être valorisé (c’est elle qui prenait tout en charge quand le bonhomme partait combattre), a été déprécié encore une fois. Les femmes doivent surtout repeupler le pays, elles n’ont toujours pas le droit de vote contrairement à d’autres pays malgré des femmes extraordinaires comme Louise Weiss (qui mène la « campagne d’ironie », c’est à la fois drôle et sarcastique).

Pendant la Deuxième Guerre mondiale (et après), le rôle des résistantes a été minimisé ; on retient surtout, de la femme, celle qui a été tondue pour avoir couché avec l’ennemi. Il y eu des viols pendant ce conflit mais ceux perpétrés en France par les Américains sont tombés dans l’oubli plus que dans d’autres pays, et puis les Noirs ont été souvent accusés de viol, racisme et sexisme vont si bien ensemble…

Pour finir par l’époque contemporaine, de récentes études prouvent que l’ovule attirerait le spermatozoïde en le sélectionnant. Aux oubliettes, l’image du spermatozoïde super champion, actif et vigoureux.

Un livre passionnant qui remet les pendules à l’heure et prouve par A+B que les femmes n’ont pas toujours été montrées comme inférieures aux hommes, qu’une partie de la véritable Histoire a été bien camouflée. Ce qui me dépasse et qui est soulevé à la fin du livre par l’autrice, c’est que l’actuel programme d’histoire de Seconde continue à taire l’implication et le rôle des femmes : six pages sur 277 sont consacrées aux femmes dans un manuel scolaire, pourquoi si peu ? Pourquoi s’entêter à vouloir nier l’évidence ? Ce qui ressort de cet aperçu à travers les siècles, c’est que tout est affaire de cycle : lorsque les femmes ont réussi à se faire une place dans la société, elles ont été humiliées les décennies suivantes ; chaque avancée a été suivie d’une régression. Alors quand on sait qu’aux Etats-Unis, le droit à l’avortement est remis en cause, ça fait peur. Vraiment peur. L’œuvre se lit avec aisance, Titiou Lecoq rattache souvent les préjugés évoqués à sa propre expérience, ce qu’elle a appris à l’école, ce qu’elle a découvert plus tard, comment elle-même a évolué (et c’est qu’il nous faut, accepter de changer). Les mots sont simples, souvent drôles, efficaces et clairs. Tout le monde devrait lire ce livre !

 

Quelle belle citation de Napoléon Bonaparte ... ... : « La femme est donnée à l'homme pour qu'elle lui fasse des enfants ; elle est sa propriété comme l'arbre à fruits est celle du jardinier. »

« Les femmes ne sont pas un accident de l’histoire. Une donnée négligeable. Leur exclusion du pouvoir politique est en soi un sujet historique qui mériterait une large place dans les programmes. C’est important. C’est essentiel. »

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27 décembre 2021 1 27 /12 /décembre /2021 14:02

Un été avec Rimbaud - broché - Sylvain Tesson - Achat Livre ou ebook | fnac

Au début de l’année 2020, Tesson part avec un copain traverser les Ardennes, à la manière de Rimbaud en 1870. C’est l’occasion pour lui d’évoquer ce poète à part. « Monstrueux prématuré de la poésie », sismographe d’une vibration extérieure, « noyau d’uranium » qui ne demande qu’à rayonner, Arthur Rimbaud est le poète qui a à la fois tout écrit avant 17 ans et si peu finalement. Sylvain Tesson a voulu rendre hommage aux contrastes saisissants de ce « singe savant » qui symbolise aussi l’esprit de révolte. Il critique souvent les exégètes qui ont tout dit et son contraire, se moque des catholiques qui se sont arrachés l’icône et des surréalistes qui n’ont pu s’empêcher de faire de même. L’inventeur qui a réussi à exprimer l’inexprimable n’aurait jamais cru qu’on allait tant parler de lui.

Réunir Tesson et Rimbaud a de quoi séduire. En de petits parallèles espiègles, l’auteur s’est rapproché du poète le temps d’une escapade dans les Ardennes. Même si c’est un peu fouillis parce que les pensées jaillissent d’un cerveau en ébullition, la verve de Tesson se marie très bien avec la pétillance de Rimbaud. Je prends plaisir à lire tout ce que Sylvain Tesson écrit, je me suis donc régalée et aussi amusée quand il dit par exemple « Nous ne comprenons pas exactement ce que cela veut dire. » Les citations sont nombreuses et cette mini-biographie tout de même expéditive nous aide à mieux comprendre cet enfant génial qui a subitement décidé de prendre la poudre d’escampette et de stopper net l’écriture de poèmes. Et j’ai beaucoup aimé la fin du livre où Tesson se compare au poète de Charleroi, lui aussi wanderer pour toujours ; tous deux étant atteints de cette même dromomanie.

« Personne n’a jamais prévenu Arthur de prendre garde à Rimbaud. »

« On n’arrête pas le progrès, c’est-à-dire la descente vers le pire. »

« Pourquoi certains hommes cinglent-ils sans cesse aux mers lointaines ? Pour ne pas risquer de se faire rattraper par eux-mêmes. L’avantage dans le mouvement perpétuel est de ne pas croiser son reflet dans une glace, ni sa conscience par une nuit d’insomnie ! »

 

 

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23 décembre 2021 4 23 /12 /décembre /2021 14:37

Animal - broché - Cyril Dion, Nelly Pons - Achat Livre ou ebook | fnac

-Chaque génération a son combat, voici le nôtre-

      Dans un tour du monde express, l’auteur s’est accompagné de deux adolescents, Bella et Vipulan, pour aller regarder le travail de ceux qui œuvrent pour protéger notre planète, pour les interroger et en apprendre davantage sur les constats effarants mais aussi et surtout sur les démarches accomplies, les projets entamés.

      Au rayon des constats : au cours des cinquante dernières années, on a perdu 20% de la faune et de la flore. Parmi les mammifères, 96% sont des hommes ou des animaux domestiques. 25% des denrées alimentaires en Europe partent à la poubelle. De bonnes nouvelles, il y en a peu mais il y en a quand même : certains pays comme la Nouvelle-Zélande ou la Finlande ont décidé de sortir de la croissance, le Costa Rica a vu sa couverture forestière augmenter de 30% en quarante ans et de petits changements apportent de l’espoir : là où on choisit une agriculture bio, les hirondelles reviennent mais aussi les abeilles et les vers de terre et même le gibier.

      Il n’est pas évident de résumer un tel livre tant il est dense et intéressant, sans trame narrative, évidemment. Je n’ai pas tout apprécié parce que, parfois, je n’apprenais pas grand-chose que je ne savais déjà, les redondances étaient assez nombreuses et le tout aurait pu être synthétisé, mais la tonalité générale m’a bien sûr complètement conquise. Tout est sa place dans notre monde, j’ai bien aimé cette idée : chaque espèce animale a une importance énorme pour les autres, de la fourmi au superprédateur - en éliminer une, c’est nuire aux autres. Les loups régulent la population des cerfs, par exemple, qui grignotaient trop les petits sapins. Il s’agit de ne plus construire, de ne plus détruire mais de rétablir ce qui a été, de réparer le mal qui a été fait, de « permettre à plus de gens de produire leur propre nourriture, ainsi que celle de leurs voisins », de rendre les paysages plus hétérogènes, c’est-à-dire diversifier au maximum les espèces de plantes, d’arbres, les cultures. Certains exemples sont touchants, comme Paulino et sa famille, des Costaricains, qui ont planté 37000 arbres d’espèces locales en dix ans. Tout ça pour dire que nous, Occidentaux nombrilistes, ne faisons pas grand-chose bien souvent, à part se plaindre.

      Ce livre est un puits d’information, une énième piqûre de rappel indispensable. On aimerait que des décisions soient prises politiquement parlant mais ce ne sera pas fait, c’est donc à nous de changer, vraiment changer nos habitudes.

« Ce monde ne peut pas changer simplement parce que nous voulons qu’il change. Il changera quand nous serons le changement nous-mêmes. Chacun doit commencer son voyage, c’est aussi simple que ça. »

« Avoir moins, c’est avoir plus. »

Le réensauvagement : « il y a possibilité de laisser les choses revenir »

Les fourmis : « Sans elles, il n’y aurait pas de prairie. Et sans prairie, pas d’animaux. Les fourmis font partie de ces écosystèmes depuis des centaines de millions d’années, elles en sont l’une des espèces clés. »

 

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12 juin 2020 5 12 /06 /juin /2020 10:23

Une chambre a soi - Virginia Woolf - 10/18 - Grand format ...

         Petit livre extrait de ma PAL dont je ne savais pas de quoi il retournait : il s’agit de la retranscription de plusieurs discours prononcés en octobre 1928 devant un parterre de femmes, dans des collèges pour femmes (notamment celui de Cambridge).

Les femmes n’ont souvent eu pas la possibilité d’écrire pour la bonne et simple raison qu’elles manquaient de temps, trop occupées à gérer ménage et enfants, et d’argent. Virginia Woolf réclame ainsi « une chambre à soi », c’est-à-dire une certaine autonomie, un possible isolement dédié à la concentration. Elle nous prouve qu’à l’heure de cette conférence, une femme doit encore être accompagnée pour pénétrer dans une bibliothèque universitaire… Elle a pu constater que pendant des siècles, les hommes ont écrit au sujet des femmes, l’inverse arrive peu souvent. Les héroïnes de fiction sont nombreuses, Antigone, Lady Macbeth, Phèdre, Clarisse, Anna Karénine ou Emma Bovary mais la femme de la vraie vie, loin d’être aussi sublime qu’elles, était le plus souvent « enfermée, battue et traînée dans sa chambre. » Les quelque rares autrices sont citées : George Eliot, George Sand, Jane Austen, les sœurs Brontë… et la difficulté d’écrire sans modèle ou d’imiter le style masculin. Virginia Woolf revendique le mélange des genres : « il faut être femme-masculin ou homme-féminin », viser une « certaine collaboration entre la femme et l’homme. »

         D’abord un peu surprise d’avoir à faire à un genre que je lis peu, je dois admettre que la prose de Virginia Woolf, alerte, parfois drôle, élégante et intelligente, a su capter mon attention. Lorsqu’elle imagine la sœur de Shakespeare qui aurait pu être dramaturge et écrivaine à son tour si elle n’avait pas eu à raccommoder les chaussettes ou à surveiller le ragoût, si on l’avait laissée faire du théâtre ou même simplement dîner dans une taverne ou errer seule dans la nuit, c’est tellement criant de vérité ! Féministe avant l’heure, Virginia Woolf est aussi une visionnaire. Ce court livre nous permet aussi de constater que des progrès ont été faits et que, même s’il en reste à faire en matière d’égalité femmes-hommes (et non pas l’inverse…), on a gagné en liberté et en autonomie.

« On ne peut ni bien penser, ni bien aimer, ni bien dormir, si on n’a pas bien dîné. »

« les femmes sont restées assises à l’intérieur de leurs maisons pendant des millions d’années, si bien qu’à présent les murs mêmes sont imprégnés de leur force créatrice ; et cette force créatrice surcharge à ce point la capacité des briques et du mortier qu’il lui faut maintenant trouver autre chose, se harnacher de plumes, de pinceaux, d’affaires et de politique. »

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3 juin 2020 3 03 /06 /juin /2020 19:43

Guide des égarés by Jean d'Ormesson

       J’avais besoin d’autre chose. Je l’ai trouvé.

       Jean d’Ormesson propose des réflexions autour de la place de l’humain dans l’univers, de l’homme dans sa vie, perdu, « égaré » dans un espace-temps qu’il peine à comprendre. Plusieurs grands thèmes sont passés en revue : l’étonnement, le mystère, la science, le progrès, Dieu, l’amour, l’étonnement, l’histoire, la justice, le plaisir, et j’en passe.

       Si certains chapitres, par ailleurs parfois très courts, ne révolutionnent pas la pensée, il faut admettre que l’élégance, l’humilité, la pudeur de d’Ormesson fait mouche. J’ai lu ce livre comme lorsque je me plonge dans une séance de méditation : le sourire aux lèvres, reposée, je prends mon temps et calme ma respiration. Je m’ouvre et j’accepte. Derrière les interrogations, les doutes et même les peurs, l’auteur a toujours le charme d’y mettre un peu de bonne humeur et de positif.

« La lumière n’est peut-être rien d’autre que le premier et le plus simple de nos bonheurs. Vivre, c’est découvrir la lumière du matin. Avec la ferme confiance, qui n’a même pas besoin de s’exprimer, de la voir encore se lever sous nos yeux dans les jours qui vont venir. »

« Nous ignorons d’où nous venons, nous ignorons où nous allons. Nous sommes tous des égarés. »

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19 février 2019 2 19 /02 /février /2019 21:22

 

Résultat de recherche d'images pour "La dernière fois que j’ai rencontré Dieu de Franz-Olivier Giesbert gallimard"

             Ce n’est pas dans mes habitudes de lire ce genre de livre mais un prêt ne se refuse pas !

             Panthéiste convaincu, l’auteur croit en un Dieu présent partout, dans la nature essentiellement, dans les animaux, dans la beauté de l’art mais aussi dans « un ciel, un fleuve, un concerto, un sourire à la volée », une nuit, une journée de marche. Pour lui, Dieu est synonyme d’exaltation. Très tôt, il a affiché un sourire béat et un peu niais (c’est lui qui le dit) devant les beautés du monde. Amoureux d’une chèvre qui est devenue sa confidente et sa muse, à sept ans, il évite de manger de la viande et se réclamera plus tard des mouvements anti-spécistes. Il a souvent rencontré Dieu, traversé par une onde vertigineuse et parcouru de frissons célestes, d’une « secousse tellurique ». Ses influences et ses mentors sont nombreux : Giordano Bruno, Spinoza, Ralph Waldo Emerson, David Thoreau, Darwin, Jean Giono ou encore l’hindouisme.

              Avec un titre aussi ronflant, je suis partie très sceptique, d’autant plus que mes relations à la religion catholique ont pris un sacré coup dans les dents depuis une bonne quinzaine d’années. Finalement, l’auteur nous parle de son rapport à Dieu de manière très claire… et très peu religieuse ! Il met le mot de Dieu sur ce que d’autres appelleraient la magie de la vie, le bonheur des petits riens. En prônant la simplicité, le contentement des petites joies quotidiennes, l’optimisme, une saine naïveté, il énonce parfois des évidences qui sont pourtant bonnes à réentendre. Je connais peu le type mais je vois très bien qui c’est et jamais je ne l’aurais vu comme il se décrit dans le livre. Il a sans doute acquis une forme de sagesse très tôt dans sa vie, tant mieux pour lui, on peut l’envier mais je ne sais pas s’il est indispensable d’y accoler le nom de Dieu. Au final, une lecture pas inintéressante du tout, un feel good version intello, bien documenté et plutôt convaincant.

 

Moi qui raffole du poulpe : « Manger des bras de poulpe, c’est manger de l’intelligence : chaque ventouse pèse à peu près dix mille neurones. »

« Le bonheur est simple comme bonjour. Il suffit de pas grand-chose, un coquelicot, une cascade, un baiser, un rire, une promenade en mer, pour nous remplir de la joie du monde. »

« Les religions entravent Dieu quand elles ne le rapetissent pas. Pour se rapprocher de lui, il faut savoir les dépasser. Il est plus que temps d’envisager un Dieu en dehors des religions. Un Dieu libre de toute attache humaine. »

« Dieu m’a souvent rendu visite quand j’habitais le pays de Giono. Un sourire, une espère ce vertige, un chatouillis dans la poitrine, un sentiment d’harmonie devant sa présence. C’étaient les quatre signes. »

"un humain est un animal comme les autres."

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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 20:13

 

 

 

 

            C’est parce que j’ai voulu honorer le Challenge Biographie d’Alinéa que ce livre s’est retrouvé dans mes mains.

            Née le 6 juillet 1907 au Mexique, Frida est issue de l’union de don Guillermo Kahlo et de Matilde Calderon, couple disparate qui ne s’est jamais vraiment aimé. Frida a un peu plus de trois ans en octobre 1910 quand la révolution éclate au Mexique, la famille (nombreuse) en subit des conséquences économiques mais Frida sera marquée à jamais par les changements et la renaissance mexicaine. Comme le dit Le Clézio, « les idées nouvelles, elle les porte dans sa chair, dans ses sentiments. »

            Constamment soutenue par son père photographe, Frida subit les souffrances de l’exclusion : atteinte de poliomyélite, elle vivra avec des séquelles toute sa vie : « une jambe plus mince que l’autre cachée toute sa vie par l’artiste, ainsi qu’une claudication dont l’intensité varie avec la fatigue. »

            Frida fait partie de la minorité féminine qui suit des cours dans la prestigieuse Ecole préparatoire Nationale, La Preparatoria de Mexico. Elle veut de venir médecin. Elle a la chance de bénéficier de la nouvelle orientation du gouvernement de José Vasconcelos, axée sur l’éducation, l’art et la culture. Frida est souvent la seule femme dans les discussions intellectuelles ; « espiègle et malicieuse, elle provoque des polémiques d’où naissent les lumières de la connaissance. » Pour éloigner la jeune femme de 18 ans d’un amour homosexuel, ses parents l’envoient chez un ami graveur publicitaire qui découvre l’« immense talent » de Frida en matière de dessin.

            Le 17 septembre 1925, c’est le drame : accompagnée de son bien-aimé, Gomez Arias, Frida est victime d’un terrible accident de bus lui valant « un pied broyé, une épaule démise, onze fractures à la jambe droite, une clavicule et deux côtes brisées. » Elle ne pourra plus être mère non plus. Contrainte à rester alitée, elle souffre de ses blessures mais aussi de la peine que lui a faite son « novio » en la quittant. En 1926, elle entreprend son premier tableau, un autoportrait mélancolique qu’elle envoie à Gomez Arias dans un dernier élan d’espoir.
           

            Ambitieuse, déterminée, cachant souvent aux autres ses douleurs physiques, c’est avec le soutien d’un muraliste réputé, Diego Rivera, qu’elle persévérera dans l’art de la peinture. « En choisissant des couleurs qui rappellent l’artisanat des Indiens du Mexique, Frida s’ouvre à l’indigénisme dont Rivera est le représentant le plus important. » Le mariage entre Frida et Rivera, de 20 ans son aîné, qui plus est, obèse, athée et volage, scandalise les parents de la jeune artiste. Amoureux, complémentaires et mus tous les deux par les mêmes convictions communistes, Frida et Rivera fuient aux Etats-Unis en 1930. San Francisco émerveille notre jeune Mexicaine. Elle peint peu alors que son mari couvre les murs de la Bourse de ses fresques.

            A New-York, Rivera connaît un grand succès mais son épouse est écœurée par la bourgeoisie. A Détroit, entre luxe et antisémitisme ambiant, Frida n’hésite pas à louer le régime soviétique et à dénoncer les persécutions contre les Juifs (Rivera et elle le sont).

            En 1932, elle donne naissance à un enfant mort, fausse couche qu’elle entreprend de mettre en peinture. « Aussi, chaque œuvre est-elle désormais une bouée de sauvetage qui la sauve d’un fatal naufrage ».

            Les années suivantes ne sont pas roses : Frida perd sa mère, souffre régulièrement de problèmes de santé et voit sa sœur et son mari devenir amants. « Pour punir son époux, elle se coupe les cheveux ! C’est un geste de vengeance, un cri de désespoir et une amputation symbolique de sa féminité».

            1937 est un tournant dans la vie de Frida : elle devient la maîtresse de Trotski, ce qui lui permet de s’émanciper et se met à peindre de manière plus assidue. Première exposition et premières ventes. André Breton, accueilli par le couple, promet à la peintre une rétrospective de ses œuvres à Paris. Malgré sa jambe accidentée qui la fait tant souffrir, Frida multiplie les conquêtes. Une aura plus d’importance que les autres : Nickolas Muray, photographe.

            En voyage à Paris, Frida s’ennuie, critique et se moque des surréalistes. Pourtant Kandinsky, Eluard, Max Ernst et même Picasso (qui lui offre des boucles d’oreille représentant les « mains de l’amitié ») saluent son œuvre. C’est en 1939 que le divorce avec Rivera est prononcé, Frida est malheureuse, Nickolas la trompe régulièrement ; elle peint alors Les Deux Frida, toile qui fait sensation.

            Après avoir sombré dans la dépression et dans l’alcoolisme, la peintre se laisse enfin soigner aux Etats-Unis et en 1940, se remarie avec Rivera. La mort de son père la plonge encore un peu plus dans un état neurasthénique. C’est pourtant avec bonheur qu’elle accepte d’enseigner son art en 1942.

            Malgré de multiples interventions chirurgicales et des greffes osseuses, la santé de Frida ne cesse de décliner. Elle passe de la chaise roulante à la position couchée ; en 1953, elle ne peut se lever que dix minutes par jour. En 1954, on l’ampute de la jambe droit. Alors que son talent est mondialement reconnu, alors qu’elle ne cesse de clamer son amour pour Rivera qui le lui rend bien, alors qu’elle continue de voir ses amis avec le sourire, elle meurt le 14 juillet 1954 emportée par une embolie pulmonaire.

 

            Ce n’est pas l’écriture du biographe qui m’a bluffée, c’est la vie de Frida Kahlo. Quelle femme ! A une époque où la femme, au Mexique, n’a droit à la parole que si on l’y autorise, Frida boit, fume, s’exprime avec ardeur… Sa passion réciproque pour Rivera m’a beaucoup marquée aussi, il est son premier fan, un soutien sans faille même si la relation conjugale a été chaotique parfois. Cette artiste aux 70 autoportraits aimant s'entourer de singes, a souffert physiquement toute sa vie durant mais a su faire preuve d’une immense détermination et d’une modernité surprenante.

            Est-ce ce personnage en particulier ? Je me suis réconciliée avec le genre de la biographie. Merci Alinéa ;-) 

 

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28 avril 2011 4 28 /04 /avril /2011 19:36

 

            Amoureuse des mots, je suis toujours ravie de recevoir ce genre d’ouvrages, d’autant plus que c’était encore un cadeau de Noël…

            L’auteur nous livre ses réflexions et ses petites recherches, sans ordre apparent, « par sauts et par gambades », un peu à la manière de Montaigne (quel beau compliment, n’est-ce pas ?) selon ses envies, semble-t-il, qu’il regroupe dans de petites parties d’une page ou deux dont le titre commence souvent par « Les mots… » (« les mots qu’il faut, les mots wallons, les mots pataquès, mes mots en vert, les mots au néon », …)

            La deuxième partie du titre convient bien mieux au recueil. J’ai souvent souri, j’ai même éclaté de rire parfois mais ce sont bien des « cocasseries », des étrangetés, des bizarreries de notre chère langue que Chiflet nous propose telles des mignardises sucrées, salées, pimentées, douces, parfois fades, souvent insolites, de temps en temps déjà goûtées… Vous apprendrez ainsi à connaître l’odontophilie (l’excitation sexuelle mettant en jeu les dents), la taphéphilie (l’excitation à l’idée d’être enterré vivant … ?!?), la cryophilie (l’excitation sexuelle due au froid), une version journalistique de la Cigale et la Fourmi, les plats d’un restaurant où le langage est exagérément ampoulé (on mangera donc des « miettes de filet mignon et leur fouillis de pommes de terre » à la place du hachis Parmentier ou encore des « turbans de semoule de froment al dente et à la Leonardo da Vinci », autrement dit des nouilles) ou encore une flopée de néologismes (caféructation = « borborygme qu’émet une cafetière électrique pour vous avertir que le café est prêt » ; fiascotte = « biscotte qu’on n’a pas réussi à tartiner sans la briser », etc.) ; les perles des libraires (La Cousine Bête ou Les Rougons macabres !)

            Ce qui m’a plu également, c’est l’humilité de l’auteur qui affirme plus d’une fois qu’il ne sait pas d’où vient telle ou telle anomalie langagière ou orthographique (tout pareil !). Une petite partie texte/jeux clôt le livre.

            Pour finir, ma préférence va aux ambiguïtés de la langue française, les doubles sens, les sous-entendus :

-         Le détective passe la maison du coiffeur au peigne fin.

-         Le sourd ne l’entendit pas de cette oreille.

-         L’acrobate fait le pont

-         Cet homme aime sa fille plus que sa femme (ne l’aime ?)

-         Alphonse n’a pas confiance en lui (en Pierre, Paul, Jacques, ou en lui-même ?)

-         Je n’ai pas découpé mon amant en petits morceaux comme on l’a dit. Sous-entendu : j’ai fait des gros morceaux, pas des petits.

-         Le Premier ministre s’est suicidé bizarrement. Sous-entendu : quinze coups de couteau dans le dos, drôle de suicide !

            Allez, quelques « mots mots » pour la route : « blabla, dare-dare, flonflon, gogo, mémé, nana, papa, pipi, toc-toc, grigri, pousse-pousse, zozo »…

De quoi aimer plus encore la langue française !

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11 octobre 2010 1 11 /10 /octobre /2010 13:37

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         Voilà un livre que je connaissais par extraits. J’en avais lu pas mal, trouvés ou piochés ça et là. Je regrette de n’avoir pas lu l’intégral plus tôt. Ce fut un beau moment.

Comme l’indique son sous-titre, L’écrivaillon  raconte l’enfance de l’écriture, le travail acharné d’un homme, d’une femme, en passe de devenir écrivain.

         L’essai se compose de trois parties : Un temps pour l’angoisse, Un temps pour l’écriture et Un temps pour l’angoisse de l’écriture. Chaque partie est elle-même composée de petits chapitres portant tous un verbe en guise titre. Des verbes d’action comme Salir, Jeter, Timbrer, Nommer, Saliver, Corriger, Citer, Se relire, Jeûner, Multiplier, … autant de tâches que l’écrivain débutant s’astreint à accomplir. Car il trime l’écrivaillon, il est parfois un artiste mais c’est surtout un artisan, un ouvrier des mots qui ne vit que pour l’écriture. Il travaille avec ses mains et sue : « Serrant son stylo à encre dans la pince, épuisante et banale, de trois doigts tachés, l’écrivaillon se demande ce qui le pousse à s’asseoir chaque jour, le pouce circonflexe, jambes croisées, les pieds fourmillants, le cou tordu, le dos déformé en écolier, à la table dangereuse où sa main va se poser, sur le côté, comme un outil sur un capot. »

         Le livre m’a touchée, a chatouillé en moi une corde personnelle, enfantine et nostalgique. Les amoureux des mots, de la lecture et de l’écriture ne pourront que se retrouver dans cet essai qui est un bel éloge aux gens qui écrivent, et c’est fait en toute modestie, car Régine Detambel s’inscrit aussi dans ce groupe de créateurs de livres, que l’auteur les appelle les écrivaillons.

On pourrait citer tout le livre, j’en retiens deux extraits :

A propos de la relecture (tâche ô combien difficile pour un collégien déjà !) : « Ces relectures, l’écrivaillon les vécut au-delà des nausées. Par ce que se lire à haute voix, c’est se goûter. C’est s’entourer de ses propres bras, soi-même se bercer de sa voix, sucer sur son index son propre sang au goût de sel et de fer, manger ce qui a séché dans son nez, également épicé, souvent craquant, à cause des poussières de la rue. C’est renifler sa chemise sale. C’est souffler dans les paumes de ses mains fermées pour sentir son haleine comme la sentent ceux à qui l’on parle de près ».

 

« Le luxe et la chance de l'écrivaillon résident dans son peu d'épaisseur, presque son absence. Comme le moussaillon ou le novice, il ne fait pas le poids, il est seulement quelqu'un qui se met à écrire. L'enfance de l'écriture. À l'abri de sa petite taille et de sa jeunesse, il explore les territoires du livre, il s'initie à la description, il entame une collection de citations, et surtout, il apprend, il imite, il regarde, il rêve ses premières histoires, il a peur de ses lignes, il craint qu'on puisse l'y reconnaître. Éternel débutant, il commence des romans qu'il n'achèvera jamais.
Comme tous les créateurs, l'écrivaillon souffre de ce qu'il invente. Un temps pour l'angoisse, un temps pour l'écriture, un temps pour l'angoisse de l'écriture, peut-être la page se découpe-t-elle ainsi, du jour où l'on découvre la fureur incorrigible d'exister dans un livre. »

 

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