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5 mai 2024 7 05 /05 /mai /2024 14:21

La Tectonique des sentiments

J’en mange du théâtre en ce moment !! Je n’en chronique pas la moitié pour diverses raisons.

Diane et Richard s’aiment d’un amour très fort et fusionnel. Mme Pommeray, la mère de Diane, adore son gendre... Enfin, pour qu’il y ait « gendre », il faudrait que les tourtereaux se marient. Et Diane, jusqu’à présent, ne voulait pas de ce mariage. Parce qu’elle a senti que Richard avait tendance à ne plus se montrer aussi fougueux (« Parfois, il bâille quand nous lisons côte à côte. Il n’arrive plus en courant lorsque nous avons été séparés quelques heures, avec cet air d’enfant bouleversé qui vient d’échapper à une catastrophe »), elle commet une maladresse que Richard interprète à sa façon, il pense qu’elle veut le quitter. Trop orgueilleux pour la contredire, il abonde dans ce sens : ils pourraient rester très bons amis, ah oui, heureusement qu’ils ont cessé de s’aimer au même moment, etc. Diane a appris, quelques jours auparavant, que Richard était atteint d’un cancer incurable et elle le pousse dans les bras d’une très belle jeune femme, Elina, une prostituée qui accepte de mimer l’amour en échange d’une vie décente.

Je commence par le positif ? Ça glisse tout seul, ça se lit comme du petit-lait, c’est divertissant et vraiment pas désagréable, en 1h30 max, c’est plié. Les gros bémols maintenant : que c’est lisse et mièvre ! Et plein de clichés ! Tous les personnages en sont affublés : la belle-mère est une pauvre pomme naïve et crédule, le mec est forcément amoureux de la première jolie donzelle qu’on lui met sous le nez, les prostituées quittent leur habit de lumière (et leurs manières) en un claquement de doigts, Diane est d’une bestiale jalousie et menteuse par-dessus le marché, et l’amour sent la guimauve cramée (et ça pue). C’est simple, ça m’a fait penser à la chanson d’Anaïs, je ne sais pas si vous vous en souvenez (« Mon cœur Mon Amour » qui se moquait des amoureux transis). A noter qu’on est entre le théâtre et le roman, les pseudo didascalies sont très nombreuses et longues pour que le lecteur tout public comprenne bien. C’est dommage de nous prendre pour des nigauds, le postulat de départ n’était pas inintéressant. Il vaut peut-être mieux revoir Pretty woman ...

Et l’œuvre d’E.-E. Schmitt est décidément tellement inégale de qualité !

Du meilleur : Madame Pylinska et le secret de Chopin, Les deux messieurs de Bruxelles, Ulysse from Bagdad, La Femme au miroir et évidemment, La Part de l’autre.

Parole de prostituée « Je ne crois qu'au vice, au calcul, à l’intérêt aux petites jouissances, au mal qui procure du bien. Dans ma vie, je n'ai rien vu de différent. Je n'ai rencontré que la laideur. (...) C'est bon, la haine, c'est chaud, c'est solide, c'est sûr. À l'opposé de l'amour, on ne doute pas, dans la haine. Jamais. Je ne connais rien de plus fidèle que la haine. Le seul sentiment qui ne trahit pas. »

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7 avril 2024 7 07 /04 /avril /2024 16:20

Un ennemi du peuple | Actes Sud

Et encore un podcast !

Dans une ville de Norvège, une station thermale contribue à attirer des clients et ainsi, à enrichir la ville. Mais le Dr Stockmann découvre que les eaux sont empoisonnées, polluées par la tannerie voisine. Son diagnostic est d’abord accueilli par des vivats, le rédacteur du journal local veut publier ses découvertes, les bourgeois sont prêts à soutenir le médecin... jusqu’à ce qu’intervienne le frère du Dr Stockmann, juge et directeur de la station thermale qui refuse que cette découverte soit publiée dans les journaux. Non seulement la réputation de la ville en prendrait un coup, la station devrait fermer ses portes deux ans, mais les coûts nécessaires à un rétablissement d’une situation acceptable seraient faramineux pour l’ensemble des habitants. De fil en aiguille, de considération financière en hypocrisie, ceux qui étaient du côté du médecin humaniste font marche arrière jusqu’à le conspuer et à le mettre à la porte.  

Radio France fait décidément de bons choix en matière de théâtre. Après avoir adoré La maladie blanche, j’ai encore eu l’honneur (en courant toujours !) de découvrir une pièce brillamment adaptée pour une version audio et qui, encore une fois, est d’une actualité confondante. Alors que la santé publique semble d’abord être primordiale, elle s’éclipse devant l’argent et ses nombreux pouvoirs. Au moment où le Dr Stockmann se fait exclure de la majorité des concitoyens, il prononce un discours qui va le faire haïr un peu plus encore : la majorité aurait souvent tort, « La majorité compacte est assez dépourvue de conscience pour vouloir fonder la prospérité publique sur la base pestilentielle de la fraude et du mensonge. »  Cette vérité difficile à entendre va condamner le médecin et sa famille à s’exiler. Certains personnages secondaires sont bien campés également, notamment la fille du médecin, Petra, féministe et moderne avant l’heure, mais aussi ceux qui retournent leur veste, souvent comparés à des animaux, qui m’ont fait penser à la Cour du Roi Soleil. Une pièce à lire ou à écouter (5 fois 28 minutes).

 

« La minorité a toujours raison. »

« L’homme le plus fort du monde est celui qui est le plus seul. »

 

D’autres pièces d’Ibsen : Maison de poupée ; Les Revenants.

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28 mars 2024 4 28 /03 /mars /2024 16:32

Changer l'eau des fleurs - Théâtre de la Renaissance

J’avais aimé le roman, pour un feel good, oui, ça va, j’avais aimé. Il me tardait de découvrir cette adaptation sur la scène.

Violette (mais quel joli prénom) est gardienne de cimetière. Son métier comme sa solitude lui conviennent, elle tient les registres des enterrements, aime en noter les petits détails, s’occupe des fleurs, connaît les tombes par cœur et accueille les visiteurs. Parmi eux, Julien, un type un peu paumé qui souhaite respecter les dernières volontés de sa mère décédée : savoir ses cendres dispersées sur la tombe d’un homme dont Julien n’a jamais entendu parler. Violette et Julien se revoient plusieurs fois, expriment leurs douleurs respectives tout en pudeur et en prudence, se découvrent, se surprennent par un passé compliqué et amer, enquêtent aussi l’un sur l’autre. Sur des airs de Charles Trenet, un ex mari va ressurgir, on va relire des archives, boire du café et tenter de vivre, encore.

Deux énormes points forts pour l’adaptation de cette histoire que j’avais en partie oubliée : la mise en scène (signée Salomé Lelouch et Mikaël Chirinian), à la fois simple et efficace, ingénieuse et poétique avec beaucoup de fleurs et des étagères qu’on bascule. Ensuite, l’interprétation de Caroline Rochefort, « Violette », authentique et très juste dans une simplicité bouleversante. La première partie de la pièce joue sur l’humour et la légèreté et la fin gagne en profondeur, en humanité et en émotion. On ne peut qu’en sortir touchés. C’était un beau moment de théâtre autour de la résilience. La pièce est jouée au moins jusqu’à fin avril au Théâtre de la Renaissance à Paris mais se promène aussi en tournée dans toute la France. Elle a reçu une nomination aux Molières 2022 pour la Révélation féminine.

un avant-goût

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19 mars 2024 2 19 /03 /mars /2024 11:13

La Maladie blanche – Les Éditions du Sonneur

 

Le bonheur d’une 1h15 de course à pied accompagnée du plaisir de découvrir un podcast de France Culture d’excellente qualité d’un des auteurs tchèques les plus connus, et qui serait à l’origine de l’invention du mot « robot »...

Une étrange pandémie ravage hommes et femmes de plus de 45 ans dans le monde entier. Une petite tache blanche de la taille d’une lentille puis un lent pourrissement du corps qui dégage une odeur pestilentielle, voilà le sort qui est réservé aux malchanceux touchés par cette nouvelle « lèpre ». Le docteur Galén a trouvé un remède qu’il ne réserve, pour l’instant, qu’aux indigents. Lorsqu’on le presse de révéler son secret, il n’émet qu’une seule condition : que les dirigeants du monde entier acceptent de conclure une paix éternelle. Evidemment, il en est hors de question, le Maréchal, dirigeant omnipotent en rit et le baron Krüg, principal fabriquant d’armes dans le pays, refuse catégoriquement. Les riches meurent donc pendant que les pauvres sont soignés et guéris dans la fameuse salle 13, jusqu’au jour où la maladie se propage même parmi les plus puissants.

Publiée en 1937, cette pièce de théâtre aurait pu être écrite hier tant elle est encore d’actualité. Il est question de choisir entre la paix et l’argent dans un monde où la guerre est une occupation primordiale pour les dirigeants. Magnifique pamphlet antifasciste écrit à l’heure où le nazisme avait le vent en poupe, il résonne et raisonne encore aujourd’hui. Simple, bref, efficace, ce texte édifiant est d’une limpidité remarquable, d’une force bouleversante et la vision utopiste et ô combien jouissive du Dr Galén devrait devenir un modèle dans le monde entier. L’excellente interprétation des comédiens donne une voix juste de cette critique du totalitarisme. Impressionnant.

« Dites-leur qu’ils sont déjà vieux, tous ceux qui dirigent les peuples. Dites-leur qu’ils vont pourrir vivants, comme ceux qui sont là. (...) en tant que médecin, j’ai le devoir de me battre pour chaque vie humaine, n’est-ce pas ? C’est simplement le devoir de tout médecin d’empêcher la guerre. (...) qu’ils renoncent à tout acte de violence et de guerre et je leur confierai le remède de la maladie blanche. (...) pourquoi ne pourrait-on pas abolir les armes ? pourquoi ne pourrait-on pas limiter les armements dans tous les états ? »

C’est un coup de cœur (je n’ai que des coups de cœur en ce moment, quelle veine !!), précitez-vous sur ce formidable podcast : 4 épisodes de 25 minutes chacun. A ne pas manquer !

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9 février 2024 5 09 /02 /février /2024 15:36

L'EMBARRAS DU CHOIX : Gaîté Montparnasse

Une virée à Paris équivaut toujours à une sortie théâtre. Sans réfléchir (c'était avant Noël et j'étais crevée), j’ai choisi la dernière (enfin, plutôt l’avant-dernière, il en a déjà une autre sur le feu) comédie d’Azzopardi dont j’avais pu constater le talent avec Dernier coup de ciseaux.

Max a 35 ans et il travaille dans la bijouterie de son beau-frère, il vivote auprès de sa femme qu’il ne se décide pas à épouser. Lorsqu’il tombe par hasard sur son amour de jeunesse, il perd un peu les pédales. Le soir où il se décide à la retrouver, il a aussi un concert prévu avec ses vieux potes rockers. Il ne sait que choisir et va donc demander à une bande d’amis : le public. En passant le téléphone à quelques spectateurs, il va pouvoir faire avancer (ou non) - à différents moments - sa vie de couple, son histoire adultère ou encore sa carrière de rocker, se révéler honnête ou malhonnête, choisir cette direction ou bien l’autre.

C’est une pièce drôle et rythmée, menée par des acteurs impeccablement au point avec ce fonctionnement interactif. La palme revient à Thomas Perrin que j’ai trouvé excellent, autant dans son jeu que dans ses réparties face au public. Tout ça est donc très divertissant, léger voire festif, on passe un bon moment mais comme avec Dernier coup de ciseaux, je pense que ce sera vite oublié. Il manque un peu de profondeur à l’ensemble, j’ai trouvé certains acteurs pas impliqués à 100% et le décor m’a paru brinquebalant. Qu’on se le dise, les différentes versions possibles de l’intrigue que le public pense détenir sont parfaitement maîtrisées par l’ensemble des comédiens et il n’y a aucune place à l’improvisation. Vous me sentez un peu sur la réserve, rassurez-vous toutes les critiques lues ou entendues sont dithyrambiques, la pièce n’a donc pas besoin de moi !

La pièce est jouée jusqu’à cet été à la Gaieté Montparnasse. Si vous êtes dans le coin, La Claque de Fred Radix est vraiment excellent !

Un petit aperçu 

LE PARISIEN : L'embarras du choix

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23 décembre 2023 6 23 /12 /décembre /2023 10:52

Alice pour le moment

Du théâtre ! Du théâtre !

         Alice, chilienne de naissance, est une jeune adolescente solitaire dont les autres se moquent facilement. Elle et ses parents changent souvent de lieu d’habitation au gré des différents boulots de son père : « boxeur, déménageur, palefrenier, figurant dans des films, homme-Sandwich et Père Noël dans les rues d'une grande ville, artisan menuisier, artisan boulanger, artisan charcutier, affûteur de couteaux, rempailleur de chaises, magnétiseur, charlatan », ... C’est la vieille Mercedes qui tire une remorque emplie du bric-à-brac familial. Le père vole des noisettes et la mère fredonne une chanson chilienne de sa jeunesse.

         Que j’aime l’écriture de ce dramaturge ! Non seulement ses mots, d’une belle simplicité, sonnent juste mais l’univers qu’il crée, légèrement à côté de celui du commun des mortels, est toujours empli de tendresse. Alice pour le moment, c’est aussi ce début de l’adolescence où le corps change, où la tête se cherche sans se trouver, c’est aussi le premier baiser avec un garçon qu’on ne reverra plus jamais, c’est ce nomadisme à la fois contraint et choisi, c’est « rouler tout droit jusqu’à la dernière goutte d’essence », c’est cet accent chantant et l’irrémédiable exil. Alice a des points communs avec Lys Martagon par son originalité, son affirmation de la différence, sa liberté. Une pièce avec 7 à 14 comédiens, à lire, à jouer, à regarder à tout âge.

« Je marchais

Je marchais dans le sens inverse au sens du matin.

Je marchais sur le chemin.

Celui que je prenais deux fois par jour.

Cinq fois par semaine depuis quatre mois.

Quatre mois que nous habitions ici.

On s’habitue très vite, trop vite peut-être, à suivre tous les jours le même chemin. »

 

« J'ai appris à marcher sur un trottoir qui n'était pas mon trottoir.

Avec une épée de Damoclès au-dessus de ma tête.

 J'ai appris à penser, à écrire, à lire, à compter.

 Dans un pays qui n'était pas mon pays. Mes papiers

Comme mes amis

Comme mes maisons

Comme mes amours

N'étaient que provisoires.

Je m'appelle Alice. Alice pour le moment.

Parce qu'il fallait bien décider d'un prénom à notre arrivée ici. »

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16 septembre 2023 6 16 /09 /septembre /2023 08:43

Ouasmok ?

Me revoilà avec du théâtre ! et avec un auteur que j’avais déjà évoqué pour Lys Martagon.

Pierre aborde Léa. Pierre et Léa sont en cinquième. Il lui avoue qu’il la suit depuis un moment, épie ses mouvements, a compris qu’elle n’a pas une vie facile. Elle ne répond pas tout de suite puis se laisse emporter par la fougue du garçon. Ils s’inventent un univers délirant, vont jusqu’à s’emménager un appartement dans le haut d’un clocher, y installer des livres de philosophie orientale, des bougies, une collection de papillons séchés, mais ils vont aussi se marier, avoir des jumeaux, et puis divorcer, car il faut penser à tout.

Une étincelle. C’est bref, très intense mais éphémère. C’est ce que j’aime chez ce dramaturge, ne pas nous faire croire que c’est éternel, grandiose et unique. Parce que la vie n’est pas comme ça. Comme Lys Martagon, Pierre et Léa sont des allumés rêveurs ou des rêveurs allumés qui croient à une magie invisible et à un monde meilleur... mais ils n’y croient plus deux heures plus tard parce qu’il faut pas déconner quand même, « c’était pour rire ». Encore une bonne petite pièce (que c’est court, tout de même !) qui doit être délicieuse à voir, à jouer ou à faire jouer.

« Pierre. – Salut.

Léa. – ...

Pierre. – Salut.

Léa. – ...

Pierre. – Salut.

Léa. – ...

Pierre. – Ouasmok ?

Léa. – Pardon.

Pierre. – Comment tu t’appelles ? C’est de l’arabe. T’as quel âge ? T’habites où ? T’es fille unique ? T’étais où en vacances ? T’es partie avec tes parents ? T’as fait quoi ?

Léa. – Pourquoi je te répondrai ? On ne se connaît même pas il me semble.

Pierre. – Justement, c’est une méthode révolutionnaire. Grâce à ce principe, on se connaît plus vite et on sait tout de suite si on a une chance de former un couple heureux. C’est génial. Non ? »

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4 août 2023 5 04 /08 /août /2023 15:03

Lys Martagon

Cet été, je lis du théâtre comme j’avale des fruits frais, voracement et avidement, presque tous les jours. Je ne vais pas chroniquer chacune de mes lectures, d’autant plus que le théâtre lu n’a pas forcément le vent en poupe sur la blogosphère mais je ne pouvais pas ne pas parler de cette petite merveille écrite par un dramaturge contemporain que j’aime beaucoup.

Lys Martagon a 17 ans. Sans doute positivement influencée par son nom de fleur, elle est à part, originale parce qu’elle parle tout le temps, partout. Elle parle des fleuves, des étoiles, des pays, des îles, des continents, des planètes. Elle parle pour contrer la misère qui l’entoure, la fatigue de sa mère qui l’a toujours élevée seule, elle parle pour voir plus loin. Elle parle à son « géant » aussi, cet arbre de trente mètres de haut devenu son ami. Elle cavale toute la journée, montant la colline pour la descendre aussitôt, elle marche pieds nus pour sentir « le léger du chemin ». A la manière du « Voyant » de Rimbaud, elle voit mieux et plus que les autres, au-delà des immeubles de la ville, le regard tourné vers la chaîne de Belledonne. Et elle va emmener Démétrio, un ado qui ne fait que regarder la télé, dans son monde fait de rêveries, de fleurs et d’exploration où tous les sens sont exploités.

Cette pièce a été écrite lors d’une résidence de Sylvain Levey à Grenoble en 2011. J’espère que les Grenoblois sont tous bien conscients de la chance d’avoir ce texte écrit dans l’écrin qui a conçu le bijou. D’une rare poésie, Lys Martagon est un peu la nymphe Écho de Grenoble, elle est partout, virevoltante et joyeuse, emplie de la belle nature qui n’est vraiment pas si loin des hautes tours laides de la ville quand on daigne lever les yeux. Un texte poétique qui se dévore avec plaisir, Lys est accompagnée d’un « chœur de la vallée », de sa mère et de Démétrio mais c’est bien elle seule qui constitue la lumière, le soleil de ces mots et qui va tenter, telle une alchimiste, de transformer le laid en beau. A lire à tout âge.

Coup de cœur

« On devrait construire plus de phrases et moins d’autoroutes. »

« Je collectionne le vent comme d’autres les cuillères en argent. [...] Je collectionne aussi la pluie comme d’autres font sécher les papillons. »

« Quatre-vingt-une pulsations fois des millions de femmes, d'enfants et d'hommes. Ça fait du bruit, ça, je te promets, ça fait du bruit. Si on éteignait toutes les télés, les radios, tous les téléphones, les ordinateurs, si on arrêtait toutes les voitures du monde entier, tous les avions, tous les trains qui traversent la France et les paquebots qui traversent les océans, si on fermait toutes les usines, ne serait-ce qu'une heure, si on bâillonnait la fée Électricité ne serait-ce que quelques instants, si tous les bébés qui naissent acceptaient pour une fois de ne pas hurler comme ils le font pour protester contre l'injustice et la torture dans le monde et si moi, moi, Lys Martagon, cent cinquante-sept centimètres de bas en haut, je décidais un jour de me taire pour de bon on pourrait écouter la symphonie des cœurs qui battent à l'unisson ici où nous habitons, mais tu pourrais aussi entendre les palpitations, des coeurs de Calcutta, de Rio de Janeiro, de Karachi, de Reykjavik, tu pourrais entendre le cri de l'ours polaire à la dérive sur son bout de banquise, tu pourrais entendre le dernier souffle de la vieille femme qui vient de s'éteindre dans un lit d'une clinique sur les bords de la mer Caspienne, tu pourrais entendre les milliers de voix qui s'élèvent un peu partout sur la planète, les voix de ceux qui ont faim, simplement faim, tu pourrais entendre le je t'aime murmuré par la bouche de l'homme dans l'oreille de la femme, tu pourrais entendre la fonte des neiges dans les montagnes rocheuses de l'Est américain [...] »

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13 juillet 2023 4 13 /07 /juillet /2023 10:03

Mon dîner avec Winston - Poche - Hervé Le Tellier - Achat Livre | fnac

Quand je vais à la librairie, j’achète parfois des pièces de théâtre. En voilà une d’Hervé Le Tellier qui n’est pas uniquement l’auteur de L’Anomalie mais a aussi publié pièces et poèmes.

                Charles s’apprête à recevoir Winston Churchill. Champagne, gratin, whisky, cigares, bain chaud. Nous sommes pourtant au XXIe siècle mais le narrateur et unique personnage de la pièce voit Churchill comme une sorte de modèle dont il connaît les discours, les événements historiques auxquels il a participé. Charles travaille à Tourisme Europe Service et reçoit des appels pour aider, assister et conseiller des gens sur la route. Il se fait embêter par un certain Rodriguez qui a crevé et ne trouve pas de roue de secours dans sa décapotable. Et Churchill qui tarde à venir...

Si la pièce est très/trop courte, elle m’a beaucoup plu, je pense à ceux qui connaissent mal Churchill : elle peut donner quelques infos essentielles sur le personnage, et à ceux qui connaissent très bien ce premier ministre britannique, elle est absolument délicieuse. C’est drôle, frais, léger, enlevé, le présent se mêle au passé, la grande Histoire et les extraits des authentiques discours du bonhomme au dépannage agité de Monsieur Rodriguez. Cette pièce a été une commande du comédien Gilles Cohen qui voulait un « seul en scène ». Les quelques extraits que j’ai vus m’ont l’air tout aussi réussis que le texte lui-même. Une belle découverte.

Winston aurait dit à son secrétaire quand il est venu le chercher aux toilettes parce qu’un ministre voulait lui parler : « Dites à lord Salisbury que je suis scellé aux cabinets et que je ne peux m’occuper que d’une merde à la fois ! »

« L’amour, mon petit vieux, crois-moi, c’est laisser l’imagination piétiner l’intelligence. »

Un énième échange avec Monsieur Rodriguez : « Mais ne désespérez pas, non. Car l’histoire n’est pas finie. Je peux vous promettre une chose. C'est que l'aube viendra. L'aube vient toujours à ceux qui savent résister. Elle sera éblouissante pour les braves, l’aube des renforts... L’heure de la dépanneuse viendra. »

Mon dîner avec Winston - Théâtre du Rond-Point Paris

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18 juin 2023 7 18 /06 /juin /2023 20:37

Ceci n'est pas une comédie romantique - C'est avant tout une histoire de  potes

Et je poursuis ma petite découverte complètement aléatoire de pièces de théâtre écoutées en courant…

Chris est seul dans son appart, assez désespéré parce qu’il sort depuis trop longtemps avec Mélanie, une perverse narcissique dont il ne parvient pas à se débarrasser. Il appelle tous ses anciens potes à la rescousse, personne ne répond sauf Camille. Elle est belle, survoltée et, contre toute attente, elle vient écouter son vieux copain avec qui elle avait monté un groupe de rock des années auparavant. La discussion tourne en engueulade, les blessures du passé sont réouvertes et ravivées, elle le contraint à écrire un sms de rupture envoyé trop vite à Mélanie, lui lui reproche d’accumuler les plans cul.

Géraldine Adams et Yanik Vabre interprètent parfaitement bien ces deux potes à la dérive, chacun avec ses bagages d’échecs, de frustrations et de non-dits. Le langage est cru, le rythme bien enlevé, on rit vraiment souvent, pas mal de répliques pourraient devenir cultes et même si on devine aisément la fin (et qu’on veut la voir arriver comme telle !) c’est un très agréable moment que j’ai passé. Se concentrer sur une histoire qui, de surcroît, est drôle, permet vraiment de faire passer les kilomètres plus facilement. Evidemment, je ne peux pas tellement évoquer la mise en scène puisque je n’ai rien vu mais la musique rock contribue à donner punch et vie à cette pièce bien fichue.

Disponible sur YouTube.

Ceci n'est pas une comédie romantique | Le Funambule Montmartre |  BilletReduc.com

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