Je n’avais lu que quelques extraits du théâtre d’Ibsen. Ici, c’est à une pièce entière, en trois actes, que je me suis confrontée.
Mme Alving vit seule avec sa gouvernante, Régine. Depuis peu, le fils prodigue, Osvald, est rentré à la maison. Si l’apparence du début de pièce est douce et paisible, on entre vite dans un monde de confessions : les revenants viennent hanter le présent. On se livre, on raconte, on rétablit la vérité.
Mme Alving a obéi toute sa vie aux devoirs : familiaux, religieux, conjugaux. Elle avoue au Pasteur Manders que feu son mari était et est resté un coureur de jupons toute sa vie. Il a engrossé leur domestique, Jeanne, et Régine est née de cette union. Le bébé a été adopté par le menuisier, Engstrand. Osvald aimerait faire sa vie avec Régine mais sa mère lui avoue la vérité sur leurs liens. Le jeune homme, quant à lui, est condamné : son père lui a transmis la syphilis, il meurt à petit feu.
Ne cherchez point de bonne humeur ou une occasion de vous distraire avec ces quelques pages. Le ton est dénonciateur, dur. La pièce, en 1881, a fait scandale : oser attaquer le puritanisme norvégien était inacceptable. Ibsen arrache les masques de l’apparence. L’ensemble m’a un peu ennuyée, notre monde a heureusement bien évolué mais j’ai trouvé intéressante cette idée d’héritage tragique, ce poison qu’on peut se transmettre de génération, accompagné d’un tourment éternel. Par là, l’auteur nous propose aussi une réflexion sur le libre-arbitre, l’influence sur de la société sur notre individualité, l’homme face à ses propres choix.
Manders. « C’est de la rébellion d’exiger d’être heureux dans cette vie. Quel droit avons-nous au bonheur ? Non, madame, nous devons faire notre devoir. Et notre devoir était de rester auprès de l’homme que vous aviez choisi et à qui vous étiez liée par des serments sacrés. »
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Mme Alving. « Un monde de revenants. Lorsque j’ai entendu Régine et Osvald, c’était comme si je voyais des revenants. Je me demande si nous ne sommes pas tous des revenants, pasteur Manders. Ce n’est pas seulement l’héritage de nos parents qui revient nous hanter. Il y a aussi toutes sortes de vieilles idées et de croyances mortes. Elles ne sont plus vivantes, mais elles nous encombrent l’esprit et nous n’arrivons pas à nous en défaire. »
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Osvald. « Ce que je voulais dire, c’est que les gens d’ici apprennent à croire que le travail est une malédiction et une punition pour nos péchés, et que la vie est une vallée de chagrins dont on a tout intérêt à sortir le plus tôt possible. »
8/12 pour le challenge de Bladelor