
Avant de découvrir le dernier livre de cette autrice que j’admire beaucoup, j’ai acheté ce petit roman dont j’ignorais l’existence.
Matthieu Brin, 45 ans, s’est découvert tardivement un talent d’écrivain. Il délaisse plus ou moins son métier, s’éloigne de sa femme Élise et de ses deux enfants pour consacrer son temps libre à l’écriture. Un jour, parmi ses lettres d’admirateurs, une en particulier retient son attention. C’est la lettre de Sara que Matthieu a aimée et quittée dix ans auparavant qui revient sur la médiatisation de l’écrivain, sur ses errances à elle dans le même quartier que lui, sur leur passé commun. Cette lettre bouleverse Matthieu, il se sent redevable envers son ancienne amante, il va s’en servir pour écrire toujours davantage mais elle va aussi le détruire lentement et insidieusement, mettant en péril sa famille, son travail, sa vie sociale. Des lettres de Sara, il y en aura d’autres, toutes plus troublantes les unes que les autres. Élise va s’éloigner. Lui-même ne va plus se reconnaître.
Ce roman, écrit en 2005, fait partie des premières œuvres de Delphine de Vigan. Si j’ai absolument adoré Rien ne s’oppose à la nuit et D’après une histoire vraie, j’ai été relativement déçue par ce roman aux allures très contemporaines dans le sens où il ne se passe pas grand-chose si ce n’est qu’un homme se triture l’esprit, se gâche la vie et qu’on aimerait bien le secouer. Par là, le style ressemble un peu à celui d’Olivier Adam sauf que je suis restée en dehors de cette histoire d’ancienne maîtresse qu’on aimerait revoir mais pas revoir. Pour terminer par une note positive, le livre est agréable à lire malgré sa grisaille et surtout, il propose une réflexion intéressante sur le travail de l’écrivain (l’autrice transparaît au travers du personnage principal), sur l’impact de cette vocation sur l’entourage proche et sur la force de l’effet papillon : quelques mots qui changent une vie.
La première lettre de Sara : « Ce soir, j’ai commandé une bière et j’ai décidé de t’écrire une lettre. Je suppose que tu en as reçu des dizaines comme celle-ci. Peut-être sauras-tu lire entre les lignes, dans cet espace intact qu’aucun mot ne caresse ni ne frappe, ce que je ne sais pas dire. »
De Sara, toujours : « Il voudrait comprendre. Ce qu’elle veut. Ce qu’elle cherche. Pourquoi maintenant. Dix ans après. Elle se débarrasse d’une histoire qu’il ne connaît qu’en partie, et c’est bien assez, une histoire qu’il avait reléguée avec les autres, comme autant de morceaux de verre brisé, enfermés dans un bocal, où jamais la main ne plonge, ne s’aventure. Elle jette à ses pieds des grenades dégoupillées, elle se moque des dégâts, elle imagine sans doute l’intensité de l’explosion, espère la puissance du souffle, elle guette dans le ciel un nuage chargé d’encre. »











