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23 mai 2016 1 23 /05 /mai /2016 09:02

 

 

         Une mère de famille, partie à une conférence, abandonne lâchement son mari et ses deux enfants (nan mais quelle idée !). Le drame commence quand le narrateur de fils découvre qu’il ne reste plus de lait au frigo : que va-t-on pouvoir manger avec les céréales Crocmiams du matin, quand même pas du jus d’orange ou de la mayonnaise ? En bon père de famille, l’homme quitte la maison pour aller à l’épicerie de coin, se ravitailler en lait. Oui mais le papa ne revient pas, les minutes passent et il rentre enfin, très en retard, avec une bouteille de lait à la main mais surtout une histoire rocambolesque à raconter : une fois dans la rue, il aurait été aspiré par une lumière très vive venue d’une soucoupe volante, il aurait alors emprunté une porte interdite avant de plonger dans la mer. Attrapé par des pirates, il se serait vu sauvé par un stégosaure dans une montgolfière et puis… et puis, il se passe tant de trucs ! Il est question de volcan, de professeur Steg, de Grand Splod et de poneys colorés.  Les enfants ne croient pas un mot de toute cette histoire qui comporte - comme c’est bizarre ! – des éléments se trouvant devant leurs yeux (des montgolfières sur le calendrier mural, des figurines de dinosaures et des poneys sur la table, etc.)

         Ce roman a une petite histoire dans ma famille. Mon grand fils de dix ans est un petit lecteur. Ce livre a été acheté pour lui. Il a péniblement daigné y jeter un coup d’œil… quelques semaines plus tard, il a bien voulu lire les premières pages avant de le laisser définitivement tomber. Sa sœur de sept ans, grande lectrice elle, poussée par une saine émulation dont elle a le secret, a affirmé qu’elle lirait le roman. Elle s’est arrêtée au premier tiers. Pour ne rien gâcher, j’ai fini par m’y mettre et je dois avouer que si les premières pages m’ont revigorée, la suite et surtout ces rebondissements abracadabrantesques à n’en plus finir m’ont beaucoup lassée. Je ne suis pas faite pour des livres où les actions débordent de partout ! Enfin, ça m’a rappelée le procédé de Allez raconte de Dany Boon, un DVD sympathique où l’humoriste raconte des histoires au gré des envies des enfants. Assez de digressions, les illustrations de Boulet m’ont bien plu et son blog (ici) est tout rigolo. (Mais c’est pas ça qui va me réconcilier avec la littérature jeunesse…) !

 

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20 mai 2016 5 20 /05 /mai /2016 20:29

 

 

            Esther est une petite fille de neuf ans qui fête ses dix ans dans l’album. Elle est en CM1 dans une école privée parce que son père -qu’elle adore-qui l’adore- veut la protéger. Elle a une meilleure amie, Eugénie, et pas mal d’autres copains et copines avec qui elle se raconte des histoires, joue au papa et à la maman, écoute Tal et Kendji Girac. Elle a entendu dire qu’on a fait du mal à Charlie Hebdo mais elle n’a pas vraiment compris de quoi il s’agissait. Elle trouve que dans la vie, la couleur de la peau n’est pas très importante, ce qui compte c’est d’être belle et souple, un peu comme Tal ou Beyonce. Elle adore regarder Raiponce et a des cheveux très longs, elle aussi. Elle n’aime pas beaucoup son grand frère Antoine qu’elle trouve con comme tous les garçons (mais son papa fait exception). Lui, il est au collège qui n’est pas privé comme son école parce que les parents n’ont pas tellement d’argent. Pour preuve, elle n’a même pas de portable, pourtant elle rêverait d’avoir un I-phone, peut-être quand même pas l’I-phone 6 mais le 4, ce serait déjà génial. Elle est très gourmande et raffole, surtout, des pizzas quatre fromages, des « Têtes brûlées » et des « oreos ».

           Esther est une petite fille bien dans sa peau. Si Riad Sattouf a parlé d’elle, régulièrement, dans L’Obs, d’octobre 2014 à octobre 2015, c’est parce qu’elle est heureuse justement, beaucoup plus que les ados de La Vie secrète des jeunes, c’est aussi parce que sa vie n’a rien à voir avec la sienne qu’il décrit dans L’arabe du futur. Esther existe réellement et l'auteur n'a fait que reprendre son babillage. J’ai lu ce long album d’une traite, à la fois amusée par cette petite bonne femme en devenir qui a déjà sacrément du caractère mais aussi fascinée par l’univers de cette jeunesse que je côtoie tous les jours par l’intermédiaire de mes enfants et de mes élèves et qui, pourtant, ne me parle pas du tout (normal me direz-vous…). Les rêves les plus fous d’Esther sont de posséder un super portable, de « faire au moins un album de musique et au moins un concert dans un stade »…

          Je trouve la couverture drôlement réussie et parfaitement à l’image de ce récit foisonnant et coloré : Esther est une équilibriste dans un monde souvent compliqué et dangereux, elle s’en sort haut la main et avec le sourire !

 

Certains moments sont attendrissants, un petit échantillon :

  • Quand Eugénie invite Esther dans sa maison de campagne (la famille d’Eugénie est trèèèès riche), les fillettes fouillent dans les sous-vêtements de la mère d’Eugénie (dont la poitrine ne doit pas tout à fait être naturelle) et tombe sur un soutien-gorge géant : « On pouvait presque s’asseoir chacune dans chaque sac à sein. »
  • Esther ne comprend rien à l’Histoire ; à l’école, et là, on lui parle de Jeanne d’Arc : « C’est une femme avec une coiffure horrible, elle entende des voix qui lui disent de tuer des Anglais et elle le fait. Après elle commande une armée avec des hommes et ils lui obéissent et tout ! Des garçons qui obéissent à une fille ! Le truc TOTALEMENT impossible. »
  • « …l'odeur que j'adore, c'est l'odeur qui sort de la boîte des Iphone tout neufs (j’aurai le droit d’en avoir un au collège seulement) »
  • Scoop total : Esther, en colo, a trahi Eugénie qui n’est plus sa meilleure amie. Elle la retrouve à la rentrée : « Eugénie s’est mise devant. Elle a retiré sa veste et elle s’est tournée vers moi. Dans ses yeux y avait de la haine pure. J’étais trop choquée. Elle était en mode « ennemie ». Ah, et aussi, autre truc mais trop choquant : elle a des seins maintenant. »

18/20

 

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17 mai 2016 2 17 /05 /mai /2016 08:27

 


 

           Nous sommes en Algérie, à Constantine, en juin 1944. Jacob est le petit dernier de la famille. A 19 ans, il est le préféré de sa mère Rachel, celle qui baisse les yeux quand elle s’adresse à son mari. Il est le grand frère pour Gabriel, le petit neveu de huit ans à qui il apprend à faire des ricochets, il fait l’avion pour ses petites nièces. Dans cette famille de cordonniers, le départ de Jacob pour la guerre est un déchirement et « signifie la perte du seul être tendre et gai dans cette maison ». Jacob dit adieu à son amoureuse, Lucette, qu’il n’a jamais touchée. Il connaît les entraînements à la dure,  dort sous les tente avec les autres appelés, se laisse bringuebaler dans le camion englouti dans un nuage de poussière rouge avant de prendre le cap vers la Provence où il s’agit de prendre les Allemands par surprise.

           On sait, dès le départ que les semaines sont comptées pour Jacob. Il vit une dernière fois, aime une dernière fois, se souvient de sa ville tant aimée une dernière fois. Le cruel compte à rebours se fait dans un seul souffle - puissant et ensorcelant - qui emporte le lecteur aux côtés de Jacob dans ce tourbillon destructeur qu’est la guerre. Alors que les soldats ne sont que des pantins qui tombent les uns après les autres, l’âme de Jacob va survivre dans chacun des autres personnages, subtilement, discrètement. Ce roman d’une infinie tristesse est un appel contre l’oubli, ce prénom scandé, chuchoté, répété ou hurlé « Jacob », mais aussi un hommage aux Algériens venus faire la guerre en France. Hormis le personnage de Jacob qui est une sorte d’ange flamboyant et évanescent, j’ai beaucoup apprécié les deux mères Courage du roman, Rachel la mère de Jacob qui ira jusqu’à Touggourt pour revoir son fils, qui voyagera seule pour la première fois, qui fait de son mieux pour parler français, et Madeleine, cette mère malheureuse qui donne naissance à des bébés mort-nés et à une petite fille atteinte d’une tumeur au cerveau. Ces femmes ne semblent guidées que par une souffrance permanente, vouées à trimer et à se taire, à courber l’échine et à disparaître. L’admirable style de Zenatti est à l’image de ce qu’elle raconte : à travers de longues phrases, il nous projette dans ce destin tragique et injuste. Si l’auteur nous touche autant, c’est peut-être parce que Jacob n’est autre que le frère de son grand-père et que, en elle, coule encore un peu de cette force fébrile de l’adolescent.

 

L’absence de Jacob à la tablée familiale : « maintenant son coussin était vide, comme le cœur de Rachel qui ne se sentait plus la force d’aimer personne, d’aimer la vie, à quoi ça servait d’aimer s’il fallait connaître l’arrachement, à quoi ça lui servirait de vieillir si ça signifiait s’éloigner de Jacob, qui aurait éternellement dix-neuf ans et demi, jamais vingt, jamais plus, pourquoi on ne lui avait pas donné le choix, à elle, sa mère qui l’avait porté, de lui donné vingt ans de sa vie, de renoncer aux vingt-cinq années qui lui restaient à dormir, à se préoccuper des repas, du ménage, de la lessive, à entendre les ragots des voisines[…] »

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14 mai 2016 6 14 /05 /mai /2016 18:09

 

 

 

             C’est sur les conseils empressés de Lou (merci à toi, Lou !) que j’ai emprunté ce gros roman qui est le journal intime de Mary Mackenzie, une Ecossaise de vingt ans qui quitte son pays pour rejoindre son futur mari, Richard, en Chine.

             Le journal de Mary commence le 9 janvier 1903 sur le bateau qui l’emmènera, un mois plus tard, en Chine. Chaperonnée par une vieille dame insupportable, Mary, bien que naïve, se montre déjà rebelle par certains détails. La mort de sa « nounou » va l’affecter mais pas autant qu’elle l’aurait cru et cette grande enfant va surtout faire preuve d’une curiosité et d’une soif de connaissance incroyables. Un mois plus tard, elle pose un pied sur la terre chinoise où elle doit épouser son mari, Richard. De célibataire, elle va passer au statut de femme mariée puis à celui de jeune maman. Très sensiblement, doucettement, elle va réaliser que les nombreuses absences de son mari ne l’incommodent pas, et que, réciproquement, les quelques rares visites nocturnes dans son lit semblent peser à Richard. Un événement majeur va faire basculer la vie de Mary. Se promenant seule sur les collines de l’Ouest de la Chine, elle rencontre un officier japonais qu’elle connaissait déjà, le comte Kentaro Kurihama. Un amour discret et pudique va lier les deux jeunes gens pendant quelques après-midis. Et ce qui devait arriver arriva, Mary tombe enceinte. Techniquement, Richard ne peut être le père de l’enfant, il répudie sa femme en lui enlevant leur fille, Jane. Protégée et surveillée indirectement par le comte Kurihama, Mary se rend au Japon où elle va passer la plus grande partie de sa vie. Elle va commencer par élever Tomo, son fils, avant de se le faire enlever par Kentaro, son ancien amant. Après des périodes de rage et de désespoir, Mary relève la tête, consciente qu’elle ne reverra jamais ses enfants, elle devient vendeuse dans le prêt-à-porter, elle grimpe les échelons dans un pays qui ne sera jamais le sien mais qu’elle finira par aimer.


            Quelle œuvre dense et riche ! Si l’évolution de Mary, à la manière d’un Bildungsroman,  nous est donnée à voir à travers son journal mais aussi à travers les quelques lettres envoyées à sa mère, la découverte d’une Chine et d’un Japon du siècle précédent est également très intéressante. C’est un roman féministe (et c’est un homme qui l’a écrit !) qui nous présente une femme ballottée au gré des tremblements de terre japonais, de cette mentalité nippone qui reconstruit sans cesse, qui se tait souvent, des rejets des siens (sa mère, mise au courant de l’adultère, ne lui écrira plus jamais), de la solitude. Et pourtant, Mary va de l’avant, elle renonce à retourner en Europe, elle se crée sa propre définition de la liberté ! L’écriture est fluide et légère, elle a quelque chose d’aérien et de japonais, de subtilement mélancolique. J’ai été surprise aussi de découvrir quelque chose que je ne connaissais pas, une sorte de langueur et de lenteur qui me sont assez inhabituelles. A lire si on a le temps, si on est avide de délicatesse et de subtilité, si on a envie de voyager au pays du Soleil-Levant…

 

 

La découverte des sushis et la remarque cette fois peu visionnaire de l’auteur : « Les voyageurs occidentaux ne vont sûrement pas défaillir d’enthousiasme devant des bouchées de riz froid enveloppées dans des algues, aussi exquise en soit la présentation dans des bols en laque, et la garniture d’autres produits marins censés comestibles. » (Tokyo, 25 décembre 1907 )

Un tsunami : « J’étais assise sur une dune de sable en train de contempler l’eau quand cet horizon s’est soulevé. La ligne jusqu’alors parfaitement tracée où se rencontraient la mer grise et un ciel d’un gris plus clair était à présent dentelée, comme les dents de la lame d’une scie très fine, la pointe de quelques-unes de ces dents toute mouchetée de blanc. »

L’expansion de l’industrie japonaise : « Quand je suis entrée chez Matsuzakara, nous importions presque tout notre tissu d’Europe, et quand j’en suis partie, tout venait de fabriques locales, jusqu’à des imitations de tartans écossais ! C’est la vitesse à laquelle se fait ce changement qui est presque effrayante. »

 

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11 mai 2016 3 11 /05 /mai /2016 09:06

 

 


 

          Martino est en prison, il a été condamné pour meurtre, vingt ans plus tôt. Il voulait tuer sa femme le trompant avec son amant mais il s’est trompé de couple et a tué les mauvaises personnes… S’étant bien tenu en prison, tout ce temps, il a le droit de sortir. Oui mais Martino n’a qu’une idée en tête : tuer (enfin !) sa femme et son amant qui est toujours son compagnon. Il veut les éliminer mais aussi dégommer toute leur famille, les Verron. Il découvre, écœuré, que les Verron sont une tribu de petits malfaiteurs : malpropres, voleurs, ivrognes, incultes, ils vivent nombreux dans une sorte d’immense bric-à-brac digne de la cour des Miracles. Cette vision ne fait qu’attiser le désir de vengeance de Martino qui va commencer par leur pourrir la vie : traficoter leurs chaises, leur voiture, leurs portes…

              Ce qui est drôle d’abord, c’est qu’on s’attache très vite à ce criminel de Martino qui – le pauvre ! -  n’a pas réussi à tuer sa femme vingt ans plus tôt. Quand on découvre qui est la famille Verron, on a encore plus envie qu’il réussisse son coup ! Bien sûr, chez Rabaté, le récit est rarement linéaire et dénué de surprises. La fin est étonnante, les rebondissements se suivent avec une fluidité délicieuse. Les Verron ne se laissent pas faire, sachez-le ! Une anecdote qui pourrait être l’acmé de la BD : les hommes de la famille ont prévu de voler un camion frigorifique et, de nuit, d’aller tuer quelques bœufs, de les dépecer pour en revendre la viande. Ils ont quand même apporté « un plan de vache. Il y a l’emplacement des morceaux et leur prix. »  Les couteaux coupent mal : « On fera du haché, c’est pas grave. » Pour vous convaincre dois-je encore vous parler de cette très belle ouverture ? Martino, avec d’autres détenus, confectionne, en prison, des couronnes mortuaires marquées des « Regrets éternels ». Ça donne le ton !

            J’ai vraiment passé un excellent moment, la BD est un long récit rassasiant où la tension monte monte monte, où les scélérats se ramassent à la pelle, où la morale est une donnée inconnue. Belle découverte.

D'autres Rabaté que j'ai aimés : Crève Saucisse, La Marie Plastique, Le Petit rien tout neuf avec un ventre jaune.

17/20

 

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8 mai 2016 7 08 /05 /mai /2016 16:15

 

 

 

           Après avoir dévoré avec ravissement et délectation La Jeune fille à la Perle, il me tardait de lire un autre roman de cet auteur américain. La découverte fut ici auditive.

           1850. Honor est une Amie, entendez par là, une Quaker, une membre de l’Eglise protestante fondée au XVIIème siècle, en Angleterre. Honor accompagne sa sœur Grace aux Etats-Unis. C’est par la voie maritime (bien sûr, au début du XIXème siècle…) que les deux jeunes femmes rejoignent leur destination. Pour Grace, un mari l’attend, pour Honor, c’est un peu plus compliqué, c’est un ancien fiancé qui l’a quittée qu’elle fuit. La traversée de l’Atlantique dure un mois durant lequel Honor est constamment malade ce qui l’amène à penser que jamais plus elle ne reverra sa chère Angleterre. Les désillusions s’accroissent puisqu’une fois sur le sol américain, Grace décède en quelques semaines de la fièvre jaune. Voilà Honor, seule, livrée à elle-même, se dirigeant péniblement vers le promis de sa sœur, Adam.

          Sur son chemin, Bell, une modiste au caractère bien affirmé, l’héberge et l’embauche quelque temps. Il faut dire qu’Honor coud avec une rapidité et un talent extraordinaires et elle sait parfaitement créer de très beaux quilts (des couvertures patchworks très prisées à l’époque). Dans la maison d’Adam, le fiancé de sa sœur, dans l’Ohio, elle sent bien qu’elle n’est pas la bienvenue et qu’elle n’a plus aucune légitimité à y séjourner. C’est pour cela que, quand un voisin fermier, Jack Haymaker, la demande en mariage, elle accepte tout de suite. Sa nouvelle vie dans sa belle-famille ne lui convient pas, Honor ne se sent pas à sa place et surtout, il y a l’esclavagisme et ce gouffre entre les principes des Haymaker (ne pas aider un esclave en fuite) et les siens qui voudraient qu’elle nourrisse, cache, héberge toute personne en difficulté.

       Comme pour La Jeune fille à la Perle, on sent que l’auteur se prend de passion pour l’Histoire et maîtrise parfaitement son sujet. Ici, elle nous emmène dans les contrées vastes et rudes de l’Ohio à une époque où les Noirs fuient l’esclavage, où le métier de « chasseur d’esclaves » existe, à une époque aussi où une femme qui n’est pas battue peut s’estimer heureuse. Et Honor va s’affirmer, à sa manière, elle va se murer dans le silence avant de fuir, comme le titre l’indique, pour manifester ses opinions. Elle va aussi à se mettre à aimer ce pays, son maïs et ses lucioles ! Le féminisme, la solitude, le combat d’Honor sont touchants et le contexte en fait un livre bien intéressant. Encore une fois, Tracy Chevalier brosse des portraits d’une remarquable subtilité, des femmes qui semblent partagées entre révolte et soumission. Deux lecteurs ici, Benjamin Jungers qui fait le narrateur et Sarah Stern lit les lettres qu’Honor envoie à famille et amis restés en Angleterre.

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5 mai 2016 4 05 /05 /mai /2016 19:31

 

 

             Malo, 23  ans, et sa sœur Camille de 21 ans, participent, le temps d’un mois de septembre, aux vendanges champenoises. Malo a un curieux pressentiment : le patron et maître des lieux, Octave, épie étrangement sa sœur. Une aura de mystère plane au-dessus de la vaste maison de pierres. Et pour cause : Camille ressemble trait pour trait à Laure, la fiancée d’Andreas, le copain d’Octave. Tous les trois ont été victimes d’un accident de voiture, dix ans auparavant. Laure est morte décapitée et les deux autres ne sont plus que des épaves. Andreas se terre au 1er étage de la maison sans jamais en sortir, Octave boîte et une cicatrice le défigure.

            L’ambiance singulière s’amplifie quand Malo disparaît. Un jeune garçon instable et impulsif qui flirte avec les jeunes filles et qui ne se présente pas un matin de vendange, ça n’inquiète personne. Sauf Camille. Elle sent bien qu’il est arrivé quelque malheur à son frère. Impuissante, elle va continuer son labeur, les jours vont défiler, Octave, ce Quasimodo parfois attirant, va se rapprocher d’elle de plus en plus.

           Une tension omniprésente plane sur ce roman et la chaleur moite, la cueillette du raisin, les jeunes qui rient et s’amusent sont autant d’éléments qui accroissent, par un contraste saisissant, le noir de ce tableau. L’intrigue est drôlement bien fichue et la fin surprend le lecteur comme elle surprend Camille. Un très bon thriller psychologique, angoissant et morbide !

 

« Octave secoue la tête, essaie de faire tomber les pensées mauvaises. Elles se décrochent par paquets, au début comme des grappes serrées de petites personnes au-dessus d’un précipice, qui se cramponneraient aux branches tandis qu’il les agite pour les faire lâcher prise. Et puis comme des insectes lui remontant le long des tempes. Quand elles deviennent une simple poignée de poussière dont il se débarrasse d’un geste de la main, il exhale un profond soupir. »

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2 mai 2016 1 02 /05 /mai /2016 19:03

 

 

            Dans le monde animal, chacun a un prédateur, chacun a un ennemi, chacun a une proie. La Renarde est, bien sûr, la plus rusée de tous les animaux, elle bouffe les poules, elle croque tous les lapereaux de toutes les portées successives de la lapine, elle se moque du nigaud de chien gardien du troupeau de moutons, elle déjoue les pièges des chasseurs, elle arrive même à tromper le loup. Ça circule, ça vit, ça meurt, ça tue, ça ment, ça attend, ça crève la faim, ça désespère… bref, ça ressemble finalement beaucoup à l’univers des hommes !

           Un peu décontenancée au début de ma lecture par la simplicité des dessins qui nous porterait à croire qu’il s’agit d’un mignon petit album pour les enfants, je me suis pourtant très vite prise au jeu. Attention, tout n’est que méchanceté et cruauté. La renarde s’enfile des quantités pas possibles de petits lapins tout mignons, la plupart du temps au nez de leur mère. Elle joue au bonneteau avec ces petites créatures fragiles avant de les gober… Le cheval nommé Kevin n’est pas mal non plus dans son genre. Ses grosses fesses sont coincées dans la porte de la clôture et, entre liberté et captivité, son cœur balance. Le chien gardien de troupeau fait tout, de son côté, pour se faire bien voir auprès du chasseur, malheureusement, quand l’homme s’approche du gibier, le chien parle trop et fait fuir biches et faisans. C’est irrévérencieux, parodique (La Fontaine n’est évidemment pas loin), parfois très drôle, ça m’a aussi fait penser aux Méchants cochons d’Andy Ryley.

 

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29 avril 2016 5 29 /04 /avril /2016 16:09

 

 

 

            J’entends déjà les cris et les huées : je n’ai jamais lu Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, pire, j’avais commencé à le lire puis l’ai lâchement abandonné (ce qui n’est pas dans mes habitudes). Je me suis donc dit que je pouvais découvrir cet auteur en livre audio, avec ce roman qui, je ne le savais pas, est la suite de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur.

           Jean Louise est une jeune femme qui vit à New York mais qui revient, pour un temps, dans sa région natale de l’Alabama, dans la petite ville de Maycomb. Elle y retrouve celui qui a toujours été son modèle, son vieux père, Atticus, en mauvaise santé ; son ami d’enfance et prétendant, Henry, et sa tante terriblement coincée (à la fois dans ses corsets mais aussi dans ses bonnes manières…). Alors qu’elle nage dans une ambiance bon enfant, tout au plaisir de retrouver les siens et des souvenirs plus ou moins heureux, Jean Louise découvre que son père siège à un « conseil des citoyens » destiné à prôner la suprématie des Blancs et à rabaisser les Noirs. Pour Jean Louise, tout s’effondre, ses croyances, ses principes, ses illusions. Révoltée contre tous, elle comprend, très doucement, que le monde n’est pas aussi simple et manichéen qu’elle se l’imaginait. Désenchantement et plongée brutale dans la vie adulte.

           Je suis complètement passée à côté de ce roman ! Si j’ai apprécié le contexte spatio-temporel, ce voyage dans l’Amérique des années 50, je n’ai franchement rien compris à la morale finale. Le lecteur ne peut qu’être du côté de Jean Louise, cette femme libérée et idéaliste qui, pourtant, d’après ce que j’ai cru comprendre à la fin du livre, se laisse amadouer voire convaincre par le racisme de son père et de son entourage ??? Bref, je suis sortie dépitée et même irritée de cette lecture …

 

Atticus : « Souhaites-tu voir des cars entiers de Noirs débouler dans nos écoles, nos églises et nos théâtres ? Souhaites-tu les voir entrer dans notre monde ? »  !

 

Merci à Audiolib !

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26 avril 2016 2 26 /04 /avril /2016 09:33

 

 

             Eh non, je n’avais pas lu ce roman à sa sortie en l’an 2000 … déjà ! Traduit en trente-six langues, il a quand même été édité à plus de trois millions d’exemplaires !

             Nous sommes à Delft, dans une province néerlandaise, au XVIIème siècle. Griet a 16 ans, ses parents pauvres sont contraints de la placer dans une famille aisée pour qu’elle occupe la fonction de servante. Elle sera chez les Vermeer : le père est peintre, la mère, Catharina, est constamment enceinte et la famille compte déjà six enfants. La grand-mère, Maria Thins, veille sur la maisonnée en faisant preuve d’autorité et de sagesse. Griet s’applique à son travail : faire le linge, le ménage, les courses. Mais sa tâche favorite, c’est nettoyer l’atelier du peintre, elle a été embauchée pour cela, elle ne doit rien déplacer mais tout dépoussiérer et elle le fait parfaitement bien. Elle apprécie ce moment car elle aime voir évoluer le travail de l’artiste, elle aime observer les couleurs.

            Entre le peintre et la servante, il existe une sorte de connivence, de compréhension muette. Par touches discrètes, Griet va émettre un avis et même un conseil sur l’un ou l’autre tableau. En retour, Vermeer va lui demander d’acheter du matériel de peinture, de mélanger et de préparer les couleurs. C’est en cachette et en sus de son travail quotidien que Griet rend ces services. Partagée entre ses parents vivant dans la misère, son prétendant fils de boucher qui l’attend à sa majorité, la rudesse, la méfiance et les protocoles de la famille Vermeer et la passion du peintre pour son art, Griet va finir par poser pour lui, idée complètement folle à une époque où les subordonnées ne découvraient même pas leurs oreilles ! Et c’est d’oreilles qu’il va s’agir d’ailleurs puisque c’est pour le tableau de La Jeune fille à la perle que Griet va porter les boucles d’oreille subtilisées à Catharina à son insu !

           Ce roman mérite son succès, il réunit toutes les qualités possibles : captivant avec une intrigue bien ficelée qui frôle la perfection de la première à la dernière page, dépaysant par son contexte spatio-temporel incroyablement réaliste, instructif car il nous emmène dans la vie et l’œuvre d’un grand peintre. Une douceur permanente créée par cette écriture subtile, poétique et raffinée m’a enchantée et envoûtée un peu à la manière des tableaux de Vermeer. Il y a cette ambiguité entre le peintre et la servante qui repose sur des non-dits, une attirance réciproque qui n’a rien de sexuel, une sorte de complicité silencieuse qui exclut les autres de ce monde à part fait de lumière et de couleurs.  J’ai adoré cette lecture !

 

« Les couleurs elles-mêmes compensaient mes difficultés à cacher ce que je faisais. J’aimais broyer les ingrédients qu’il rapportait de chez l’apothicaire, des os, de la céruse, du massicot, admirant l’éclat et la pureté des couleurs que j’obtenais ainsi. J’appris que plus les matériaux étaient finement broyés, plus la couleur était intense. A partir de grains rugueux et ternes, la garance devenait une belle poudre rouge vif puis, mélangée à de l’huile de lin, elle se transformait en une peinture étincelante. Prépare ces couleurs tenait de la magie. »

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