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J’ai relu ce roman (que j’avais déjà lu... hum, peut-être deux, trois fois ?) parce que je voulais enfin visionner son adaptation cinématographique signée Éric Barbier.
La mère du petit Romain met sur les épaules de son fils, dès son plus jeune âge, des poids déjà très lourds. Sommé d’être un héros, un général, «Gabriele D'Annunzio, Ambassadeur de France », elle lui fait tout essayer avec plus ou moins de succès : danse, violon, équitation, escrime, tir au pistolet, chant. Il jongle avec six balles. Entre l’enfance et l’adolescence, Romain connaît ses premières amours, ses grandes déceptions, tombe malade, séjourne brièvement en Italie ce qui entraînera la faillite du petit commerce de sa mère. Ils quittent la Russie puis la Pologne pour rejoindre Nice, destination tant convoitée par la mère. Dès lors, elle n’aura de cesse de lutter pour que son fils devienne un héros, démonstrative, grandiloquente, adoratrice. Lui fera tout pour lui plaire, la convaincre qu’elle avait raison.
Même si je connaissais bien le roman, parfaitement certains passages, je me suis fait avoir, encore une fois, par le talent inégalable de Gary. Son écriture est absolument jouissive, parfait équilibre entre humour et délicatesse, entre finesse d’esprit et auto-dérision, entre mauvaise foi et sincérité. Même si le film remanie certains détails, s’il bouscule un peu la chronologie du livre, s’il cède inévitablement à quelques effets spectaculaires à l’image, il reste très fidèle à l’histoire de Gary et surtout à cette omniprésence de la mère, à la confiance aveugle et surpuissante en son fils, à cette abnégation filiale qui n’est qu’un cadeau empoisonné. J’ai trouvé Charlotte Gainsbourg plutôt convaincante dans ce rôle de mère exubérante et exclusive et Pierre Niney très juste. Malgré tous les sarcasmes de la plupart des critiques.
« tout ce que ma mère voulait, j’allais le lui donner. »
« j’avais toujours fait pour elle tout ce que j’ai pu. »
« On regarde, on espère, on attend. Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. »On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu’une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son cœur, ce ne sont plus que des condoléances. »
« Tous les jours, je me livre à des exercices d'assouplissement et deux fois par semaine, je fais de la course à pied. Je cours, je cours, oh, comme je cours! Je fais également de l'escrime, du tir à l'arc et au pistolet, du saut en hauteur, du saut de carpe, des poids et haltères, et je sais encore jongler avec trois balles. Évidemment, dans votre quarante-cinquième année, il est un peu naïf de croire à tout ce que votre mère vous a dit, mais je ne peux pas m'en empêcher. Je n'ai pas réussi à redresser le monde, à vaincre la bêtise et la méchanceté, à rendre la dignité et la justice aux hommes, mais j'ai tout de même gagné le tournoi de ping-pong à Nice, en 1932, et je fais encore, chaque matin, mes douze tractions, couché, alors, il n'y a pas lieu de se décourager. »
« Je mentirais aussi si je n'avouais pas que, malgré mes quatorze ans, je croyais encore un peu au merveilleux. Je croyais à la baguette magique et, en me risquant sur le court, je n'étais pas du tout sûr que quelque force entièrement juste et indulgente n'allait pas intervenir en notre faveur, qu'une main toute-puissante et invisible n'allait pas guider ma raquette et que les balles n'allaient pas obéir à son ordre mystérieux. Ce ne fut pas le cas. Je suis obligé de reconnaître que cette défaillance du miracle a laissé en moi une marque profonde, au point que j'en viens parfois à me demander si l'histoire du Chat botté n'a pas été inventée de toutes pièces, et si les souris venaient vraiment, la nuit, coudre les boutons sur le surtout du tailleur de Gloucester. Bref, à quarante-quatre ans, je commence à me poser certaines questions. Mais j'ai beaucoup vécu et il ne faut pas prêter trop d'attention à mes défaillances passagères. »
« Je sentis qu’il fallait me dépêcher, qu’il me fallait en toute hâte écrire le chef-d’œuvre immortel, lequel, en faisant de moi le plus jeune Tolstoï de tous les temps, me permettrait d’apporter immédiatement à ma mère la récompense de ses peines et le couronnement de sa vie. »
« je ne faisais que m’incliner devant son rêve, devant ce qui était son unique raison de vivre et de lutter. »
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