En 1940, le journal belge Le Soir est « emboché », c’est-à-dire que des collabo ont pris le pouvoir et le journal, devenu le Soir volé, a perdu toutes libertés et prône les nombreux bienfaits de l’occupation allemande. En 1943, un petit groupe de résistants journalistes décide de publier clandestinement un « Faux Soir », un pastiche du journal nazi. Il faut trouver des rédacteurs, des imprimeurs, du papier, des coursiers, jouer avec le temps, le Faux doit paraître avant le vrai… Cette course contre la montre s’avère un vrai succès puisqu’en novembre 1943, 50000 exemplaires ont pu être distribués dans les kiosques bruxellois et en province. Les lecteurs rient dans les rues, le journal à la main, découvrant les parodies des auteurs, les moqueries visant les Allemands. Malheureusement, la plupart des responsables de cette vaste blague se retrouveront arrêtés et, pour certains, exécutés.
J’ignorais tout de cet épisode historique qui est une belle démonstration d’audace et de bravoure de la part d’un groupe de résistants. Paraît-il qu’en Belgique, l’histoire est bien connue de tous, tant mieux. Un va-et-vient entre présent et passé permet de suivre les réflexions des trois auteurs à l’origine de cet album. Un fac-similé accompagne la BD, j’avoue que je n’ai pas compris toutes les allusions et subtilités du pastiche mais rien que les petites annonces sont drôles « Mari trompé, rondouillard, millionnaire, disposant loisirs, désire épouser Miss, pour alibi. Ecrire Degrelle, dit Boubouroche, Katastrofenstrasse, Berlin. » ou : « Peau de l’U.R.S.S. vendue trop tôt, toujours disponible, chez A. Hitler, Blitzkriegsallee, Berchtesgaden. »
J’avais déjà pu apprécier les dessins de Durieux lors de la lecture des Gens honnêtes ou d’Appelle-moi Ferdinand.