Bouquin qui dormait dans ma PAL depuis des années (et je ne sais évidemment plus comment il y est atterri !)
Le narrateur cumule les petits boulots. Dans sa Normandie natale, il doit se débrouiller pour survivre entre des parents étranges, peu aimants et rustres, une sœur qui le déteste et un contexte général plutôt misérable. Il ne se laisse pas abattre, se fait remarquer partout où il passe. Entre la cueillette des fraises, la manutention, l’usine, les surveillances, les déménagements, l’agro-alimentaire, la charpenterie, la tuyauterie, il découvre la littérature notamment Kerouac, Buzzati, Steinbeck et Hemingway.
C’est un roman assez surprenant qui, d’apparence fouillis-fouillis, est plutôt bien organisé puisqu’il passe en revue les différents boulots du narrateur (plus d’une trentaine !). Chaque chapitre débute par un haïku de Jack Kerouac et l’auteur utilise le « vous » pour s’exprimer. La verve est assez impressionnante, le romancier manie très bien l’humour et l’ironie dans un texte qu’on pourrait qualifier de picaresque. Un road-trip professionnel irrévérencieux dans lequel le personnage haut en couleur s’en sort toujours bien malgré quelques péripéties loufoques. Certaines images sont marquantes : un cercueil qu’il faut déménager mais dont le narrateur se lie d’amitié avec l’occupant, une simulation de mort qui dure une semaine pour échapper à l’armée, la « vente » d’un père. Une lecture divertissante et amusante même si ce « vous » m’a perturbée jusqu’au bout.
« Oh, vous le sentez ! Les enfants que vous n’avez pas sont déjà fiers de leur père, fiers des couilles pétries de justice de leur père dans lesquelles ils baignent pour moitié. Certains qu’ils seront bien nourris, bien habillés et correctement vêtus, de la dignité jusque-là, il est clair que les petits salopiots sont plus empressés que d’autres à voir le jour. Où est donc la mère de vos enfants futurs salariés ? Où se tient cette déesse ? »