- D’après Italo Calvino -
Le Baron perché est un de mes romans préférés (écrit par un écrivain qui est placé haut dans mon panthéon personnel).
Côme, jeune aristocrate, décide de se rebeller contre son père pour une histoire d’escargots à manger en restant perché au somment d’un arbre. Nous sommes au XVIIIè siècle et la riche demeure familiale est entourée d’une petite forêt. Côme ne redescend pas et ne redescendra jamais sur la terre ferme. Aidé par son frère Blaise qui lui apporte des vivres, il se fabrique une cabane, apprend à chasser, suit ses cours de latin et de catéchisme assis sur une branche. Au fil des années, il va faire des rencontres plus ou moins heureuses, va même s’intégrer dans une communauté espagnole condamnée à vivre dans les arbres. En aidant les villageois à chasser le loup ou encore à anticiper les incendies lors des étés de sécheresse, Côme va regagner la confiance et la fierté de son père. Les années passent et il assiste à distance à la mort de son père puis à celle de sa mère. Mais surtout, il se nourrit des lectures du Siècle des Lumières qui le représente si bien, à lui tout seul.
Qu’il était agréable de retrouver cet univers de perché (dans tous les sens du terme), qu’il fait bon vivre tout là-haut, au-dessus du commun des mortels. Ce qui s’apparente au début à un caprice deviendra un vrai choix de vie, critiqué ou approuvé, parfois imité, jamais égalé. Le lecteur lui-même ne sait pas trop s’il doit envier Côme ou le plaindre. Si on retrouve l’esprit de l’essentiel du roman, si la trame est respectée, j’ai trouvé l’approche trop enfantine, j’ai perdu la poésie de l’écriture si belle d’Italo Calvino, ses mots ne sont que résumés, simplifiés, édulcorés ; c’est regrettable. Evidemment, comme souvent pour les adaptations BD, il vaut mieux découvrir l’univers du Baron perché par ce biais-là que pas du tout mais il est largement préférable de lire le sublime roman de l’Italien.
Je ne résiste pas à l’envie de reprendre un extrait du roman (où le frère est le narrateur) : « Ces premières journées de Côme dans les arbres n'avaient aucun programme défini ; tout était subordonné à son désir de connaître et de posséder son royaume. Il aurait voulu l'explorer jusqu'à ses confins extrêmes, étudier toutes les possibilités qu'il lui offrait, le découvrir, arbre après arbre, branche après branche. Je dis : il aurait voulu, mais en fait, nous le voyions continuellement repasser au-dessus de nos têtes, avec l'air affairé et rapide des animaux sauvages qui, même quand on les voit immobiles et ramassés sur eux-mêmes, sont toujours prêts à bondir en avant. Pourquoi revenait-il dans notre parc ? À le voir tournoyer de platane en yeuse dans le rayon de la lunette de notre mère, on aurait cru que la force qui le poussait, sa passion dominante, restait sa révolte contre nous, le désir de nous faire de la peine ou de nous mettre en rage (je dis nous parce que je n'étais pas encore arrivé à comprendre ce qu'il pensait de moi : quand il avait besoin de quelque chose, on aurait dit que son alliance avec moi ne pouvait être mise en doute ; d'autres fois, il volait au-dessus de ma tête comme s'il ne me voyait même pas.) »