Schoch est un ancien employé de banque qui s’est retrouvé dans la rue suite à un chagrin d’amour. Vadrouillant à Zurich à son rythme de SDF, de gare en grotte et de trottoir en foyer, c’est un taiseux qui a tendance à abuser de bières. Un jour, il découvre dans sa grotte qui lui sert de refuge un petit éléphant rose luminescent. Cette créature est un véritable éléphant nain ! Non, Schoch ne délire pas : cette créature issue d’une manipulation génétique est à la fois brillante dans la nuit et minuscule pour un pachyderme, de la taille d’un chat. L’intrigue commence réellement parce que ce petit éléphant semble malade : Schoch se rend chez la vétérinaire des gens de la rue, Valérie, qui accepte de garder ce secret insensé et cache à la fois Schoch et la créature dans la maison vide de ses parents. En parallèle, les retours en arrière nous permettent de comprendre pourquoi la petite éléphante que Schoch va surnommer Sabou, se retrouve seul dans une grotte, comment il a été créé, quels ont été les enjeux de cette formidable trouvaille génétique qui, évidemment, est synonyme de médiatisation, succès et argent. Les nouveaux « parents » de Sabou ainsi que le cornac qui s’est occupé de sa mère ne souhaitent pourtant y voir qu’un don du ciel…
Si le postulat de départ a de quoi surprendre et faire sourire, il est si bien amené qu’on y croit très vite et que ce petit éléphant rose brillant revêt rapidement une dimension sacrée, convoitée, adulée. Quant au style de Martin Suter, c’est un croisement entre Pierre Raufast, un roman de SF, un thriller au scénario bien ficelé et un conte des Mille et une nuits. Notre Schoch marginal m’a également fait penser à Harold et Maude de Colin Higgins et même à John Irving ! Bref, un mélange surprenant qui fait mouche et le résultat est un joli prétexte au rêve et à la réflexion, qui va nous faire aimer les animaux… et peut-être même les humains !
Quant à la luminescence des animaux, elle existe déjà et porte le nom de glowing animals (voir cet article… personnellement, ça me fait froid dans le dos !)
Jérôme fait du roman un de ses préférés de la rentrée littéraire!
Deuxième apparition de l’éléphant rose qui brille ! « Il était de nouveau là, rose luminescent, avec de petites oreilles déployées – le fantôme de la nuit passée ! Schoch retint son souffle et ne bougea plus. Le mini-éléphant restait lui aussi immobile. Tellement immobile que Schoch finit par pousser un soupir. C’était donc bien un jouet. Il pénétra dans la grotte, en rampant, et tendit la main pour l’attraper. Mais avant qu’il ne le touche, l’objet se déplaça. Il baissa la tête puis la releva d’un coup en lançant sa trompe en l’air. »
Les conclusions du vétérinaire au sujet de Sabou : « Elle n’a aucun point de comparaison. Mais elle se sent sûrement comme un éléphant. Fière comme un éléphant. Aussi terrifiante qu’un éléphant. Et digne comme un éléphant. »