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Iris tient un hôtel à Bad Heim, une ville allemande. Nous sommes en octobre, les températures restent élevées (jusqu’à plus de 40 degrés) et l’incendie continue de faire des ravages par-delà la rivière Bruch. L’air devient irrespirable, les masques sont de rigueur et les cendres volètent un peu partout. L’hôtel est vide depuis belle lurette dans une région désertée quand surviennent une jeune femme et sa fille de quatre ans. La mère, au comportement distant et étrange, demande une chambre. Iris va s’habituer à cette présence, s’occuper d’Ilya, l’enfant, un peu plus qu’il ne faudrait, sympathiser avec Dori. Mais le coup de fil d’un homme lui met la puce à l’oreille : il cherche sa femme et sa fille disparues il y a quelques jours. Iris, intuitivement, protège Dori qu’elle comprend maltraitée par ce mari autoritaire et pervers, et se tait. L’homme va rappeler, les femmes se rapprocher.
Pour un premier roman, cette autrice allemande a su faire monter la tension ! En peu de mots, dans un style efficace fait de phrases simples et concises, le décor est planté : que ce soit la nature en train de brûler, de ravager un morceau de planète faute d’une pluie qui se fait cruellement attendre, ou la sphère familiale avec cette mère en souffrance fuyant un mari violent, on attend. « Le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle » au sens propre comme au sens figuré... Et pourtant, ces femmes vont s’épauler, accompagnées d’autres femmes, pour former, au plus fort de la tourmente, un groupe, un cocon, un îlot certes illusoire mais où l’espoir et la solidarité resteront possibles. J’ai vraiment beaucoup apprécié ce roman marquant, réaliste tout en étant apocalyptique, qui apporte de belles réflexions sur la place de la mère, le militantisme, et ce satané dérèglement climatique. A la fois très juste et nuancé dans ses propos, le texte est en prise directe avec notre époque. Une belle réussite !
« Ainsi se passaient nos étés entre jaune et orange. Des masques, du vent, des cendres. Des yeux qui pleurent, des maux de gorge. Les parcs, piscine, aires de jeux, tous fermés. Des jours d'été entiers passés à la maison, derrière des fenêtres fermées. Des feuilles qui se consumaient lentement dans l'air et se posaient sur le gravier brûlant. Tout cela devant la lueur rougeoyante de la forêt de l'autre côté du Bruch. »
« Mais j'ai fini par devenir cette femme qui s'excuse pour tout, qui ment, qui baisse constamment la tête, qui dit oui à tout, qui s'excuse et s'excuse encore, à tout bout de champ, et qui a peur de ce qu'il va dire à propos de tout ce qu'elle a fait. Ça fait un moment que je me dis que je me comporte comme si j'avais l'âge d'Ilya, comme si nous avions le même père, sauf qu'il est tendre avec elle et dur avec moi. »
Un couple dysfonctionnel : « Nous faisons tous les deux ressortir le pire l’un de l’autre. »
