
Léonard meurt dans sa cuisine, seul, glissant lamentablement sur le carrelage. Dans un dernier sursaut de vie, lui reviennent quelques souvenirs en vrac de son existence dont il n’a pas toujours été fier. Une fois mort, il va revivre certains épisodes clés, comme s’il y était. La naissance de son fils Tristan, les instants amoureux avec sa femme Lize, ses premiers jours en tant qu’employé dans une boutique d’antiquités, sa reconversion qui lui permet de voyager mais aussi d’accumuler les liaisons sans lendemain, et enfin, son arrivée-fiasco, ivre, à l’enterrement de sa femme lorsqu’il a fait honte à toute sa famille. Zoé est, elle, une fille de dix ans, un peu solitaire, qui est prête à plonger, à la piscine, de quelques mètres de haut rien que pour faire sourire sa mère qui est tombée en catatonie, ne répondant plus à aucune sollicitation extérieure. Les jours suivants, la petite Zoé va se donner pour mission de « retrouver » sa mère. Evidemment qu’on ne comprend pas tout de suite quel peut être le lien entre Léonard et Zoé mais le fin mot éclairera leur relation à la manière d’un feu d’artifice, tonitruant et spectaculaire.
C’est un roman que j’ai lu quasi d’une traite, avec plaisir, gourmandise et délectation. C’était si bon que je craignais que ça se terminât en eau de boudin... Or le dénouement n’est qu’une apothéose sublime et renversante qui m’a donné des palpitations et m’a coupé le souffle ! Ah, revivre certains moments heureux de sa vie, transmettre le meilleur à sa descendance, tendre des fils imaginaires entre les êtres aimés, toucher à l’essence même de la vie, voilà ce dont il est question. Le Grand Saut est solaire et musical, tellement lumineux, virevoltant et si sensible ! Je me confonds en éloges mais c’est parce que je me remets difficilement, ce roman m’a intimement touchée, et par son écriture belle et limpide, et par ces histoires emplies d’existences maladroites et authentiques. Whouh !
COUP DE CŒUR !
Les dernières minutes de vie de Léonard : « Au moment où il se croyait bon pour la glissade ultime, son aisselle se cala sur le plan de travail, interrompant la chute. Il hoqueta, hébété, pantin retenu par ses fils. Ça ne changeait pas grand-chose à l'issue, mais par une bizarre intuition, il devina que tant qu'il n'aurait pas terminé le cul par terre, il lui resterait un peu de temps avant de tirer le rideau. »
« son sourire, lui, est plus bruyant que jamais. »
« une musique un peu plus qu’humaine. »
