
J’avais beaucoup aimé Un refrain sur les murs du même auteur, lu en 2011.
A 37 ans, Olympe est une galeriste de talent ; femme d’affaires hargneuse, elle sait dénicher les peintres exceptionnels et les mettre en valeur. Un jour, un Monsieur s’enquiert d’un tableau qui lui plaît. Il est trop cher pour lui mais Olympe a un pressentiment, une intuition et elle cherche un tableau intéressant qui serait dans le budget de ce « monsieur ». Ce dernier s’appelle Paul Anger, il est marié, a trois enfants, et à 38 ans, s’estime très heureux avec son poste de directeur de recherche au CNRS. C’est la jeune stagiaire inexpérimentée et d’origine gitane, Khalia, qui va trouver, pour Paul, un tableau intrigant et charmant, La Prisonnière d’un certain Solal, un artiste de sa ville natale, Perpignan. Désormais deux rails vont se côtoyer pour se croiser, s’éloigner l’un de l’autre et se rapprocher à nouveau. Ce peintre septuagénaire qui va toucher Olympe plus qu’aucun autre ne l’a jamais fait, et le pari fou d’exposer un artiste inconnu à Paris. Et puis il y a Paul. Olympe qui est habituée aux histoires sans lendemain, finit par succomber au charme, aux bontés, à « sa maladresse et sa confiance mêlées » du grand scientifique. Ce qui devait arriver arriva.
Entre Liaisons dangereuses et Dom Juan au féminin, ce roman fascine le lecteur par son écriture ensorcelante d’abord, mais surtout par ses personnages. Olympe au look androgyne plaît puis agace, tantôt on l’admire, tantôt on la craint. Femme moderne, libre et amorale, elle se sert des gens comme on goûte à de délicieux petits fours. Paul est, lui, tout l’inverse, stable, sûr de sa vie de famille, c’est un roc. Et la rencontre entre ces deux êtres est explosive ! Ce que j’avais déjà aimé dans Un refrain sur les murs et que j’ai retrouvé ici, c’est l’absence de manichéisme de l’auteur, une justesse dans les relations humaines, des méandres de la vie parfaitement dessinés. L’omniprésence du thème de la peinture associé par moments à la vie gitane et accompagné, toujours, de destins surprenants (indociles !) m’a énormément séduite. J’ai beaucoup beaucoup aimé ce roman fort et vibrant. Allez, on commence majestueusement bien l’année et j’en fais un COUP DE CŒUR !
Merci à Adeline !
« Ils sont assommés par cet échange qui les ramène à ce qu’ils sont : des indociles. Des marcheurs de côté. Des êtres qui échappent à la définition. Ils ne se sont jamais pliés à une seule loi, une seule façon d’aller au monde. Ils sont conventionnels, puis ne le sont plus. Réactionnaires puis profondément ancrés dans leur époque. Ils ne pensent pas en « école » en « tendance » en « famille ». Ils ne veulent entraîner personne derrière eux, ni créer des courants qui seraient des courants d’air. Si on les suit, c’est comme une fête, dont on sait qu’elle finira tout à l’heure. Ils dansent sur les fils de leurs émotions, et de leur intelligence, passant de l’un à l’autre quand on les attend ailleurs. Ils s’enthousiasment et s’indignent sans que l’on puisse savoir vraiment quand ni pourquoi, car ils n’en font pas une spécialité. Les indociles n’ont pas d’âge, ni de classe sociale. Ils sont instruits ou ne le sont pas, et dans ce dernier cas, ils sont ébaubis quand ils découvrent au détour d’un texte, d’un article de presse, que d’autres ont si bien exprimé ces choses qu’ils se sentaient seuls à penser. »
