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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 12:36

Le serment - Arttu Tuominen - Babelio

Lors d’une beuverie dans une maison isolée, en Finlande, un homme est poignardé. Le meurtrier s’enfuit dans la forêt avoisinante et sera appréhendé assez rapidement. C’est Antti Mielonen. L’enquêteur s’appelle Jari Paloviita et c’est un ami d’enfance d’Antti. Le cadavre, c’est celui de Rami Nieminen et il se trouve que tous trois fréquentaient la même école presque trente ans avant les faits. Pour Jari, la question cruciale va se poser : protéger son ancien copain qui, à l’époque, avait tant fait pour lui, ou continuer à mener la vie paisible et confortable d’époux, de père de famille et de flic respecté. Les va-et-vient constants entre l’été 1991 et l’automne 2018 nous permettront non seulement de découvrir le passé sordide des trois garçons mais aussi de savoir comment ils ont évolué chacun de leur côté.

J’ai beaucoup aimé ce polar finlandais. Habilement construit, il harponne le lecteur tout en proposant une réflexion intéressante sur l’amitié à long cours, sur les promesses faites entre deux enfants – qui seront tenues ou non. Certaines scènes sont prenantes et, si le rythme n’est pas effréné, je ne me suis pas ennuyée une seconde. J’ai tourné chaque place avec plaisir. Rien à redire. Un bon policier efficace et bien écrit qui a obtenu le Grand Prix du meilleur polar finlandais 2020.

La dernière fois que j’ai lu un auteur finlandais, c’était Martti Linna. (Il y est aussi question de pêche, décidément !)

« Les souvenirs commençaient à pleuvoir. Certains n’étaient que de légères particules, comme de la poussière de charbon, mais il y avait aussi des pierres dont la chute le frappait douloureusement, et des objets encore plus massifs, des météorites, des comètes, qui percutaient sa conscience. »

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3 novembre 2021 3 03 /11 /novembre /2021 16:33

 

Marilyn et JFK - Poche - François Forestier - Achat Livre | fnac

Après avoir revu JFK d’Oliver Stone, j’ai eu envie d’en savoir un peu plus sur ce couple mythique.

Joe Kennedy est un diplomate américain qui place tous les rêves qu’il n’a pu accomplir sur les épaules de celui qu’on surnomme « Jack ». En effet, celui appelé plus tard JFK va très vite briguer le poste de président des Etats-Unis. Il fait un mariage de façade avec Jackie, une femme honnête qui ferme les yeux sur ses dizaines et dizaines de liaisons. Il gravit facilement les échelons grâce à l’argent du papa et se retrouve président des Etats-Unis. Norma Jeane naît en 1926 d’une mère schizophrène et paranoïaque qui ne peut s’occuper d’elle. Mariée à 16 ans, celle qui se fera appeler Marilyn Monroe va rapidement divorcer, consciente de l’intense désir qu’éprouvent les hommes à son encontre. De timide, elle devient calculatrice ; elle ne recherche pas l’argent mais la gloire. Mariée ensuite au champion de base-ball, DiMaggio, elle le quitte parce qu’il la frappe. Son mariage avec Arthur Miller ne durera pas plus de cinq ans non plus. Ses très nombreux amants se plaignent souvent de son manque d’hygiène : les ongles sont sales, les cheveux gras et les douches rares. A 29 ans, Marilyn aura avorté 13 fois. La rencontre entre la femme la plus sexy de tous les temps et le futur Président tellement charismatique est électrique. Ils deviennent amants, se voient régulièrement et le secret n’est pas longtemps caché. Marilyn n’a qu’une obsession : devenir la First Lady, elle va bien déchanter.

J’avoue que, de Marilyn et de JFK, je n’en connaissais pas grand-chose. Et j’ai été surprise de découvrir deux êtres opportunistes, beaucoup plus écœurants qu’attachants. JFK, adepte des coucheries express, est même surnommé le « roi du consommé-minute », toutes les filles y passent et « l’atmosphère de la Maison blanche est celle d’un sérail ». Lorsque Jackie fait une fausse couche, JFK est en mer, « avec sa cargaison de bimbos », il ne daigne raccourcir ses vacances et se montre plus joyeux que jamais. Le livre suggère que Marilyn a peut-être, un court moment, compté un peu plus que les autres filles mais cet univers tout entier, fait de « vautours aux serres acérées » pue le fric et le mensonge. La Century Fox entre en contact avec le psy véreux de Marilyn pour qu’elle continue à tourner. Chacun fait cacher des micros chez l’autre ; à la mort de l’actrice, un grand nettoyage est fait pour qu’aucune trace ne soit détectée, les enregistrements sont effacés. On pense à un suicide puis à un assassinat mais Marilyn, grande consommatrice de drogues, aurait simplement pris une dose de trop. Le mafioso Giancana la fait violer par ses hommes quelques heures avant sa mort. Bref, de bout en bout, c’est de la grande poésie. L’auteur n’y va pas avec le dos de la cuiller mais j’ai appris ce que j’ai voulu savoir.

 

JFK : « passe la moitié de son temps à penser aux femmes, et l’autre moitié à coucher avec elles. »

On a longtemps cherché le journal intime de Marilyn : « Mais Marilyn n’est pas, ne sera jamais, en état de poursuivre une idée, de se plier à la discipline d’un journal intime. Elle est déstructurée, vide, intérieurement amorphe. Elle a autant de rigueur qu’une méduse. La seule chose qui l’intéresse, c’est elle-même, Marilyn, sa séduction, son aura de star, son pouvoir de diva. Elle est comme un champ de nuages par une brise d’été : ses pensées flottent, ses humeurs varient, sa concentration est nulle. »

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30 octobre 2021 6 30 /10 /octobre /2021 16:03

Casterman - Le Printemps suivant - Tome 1 - Vent lointain

Cela fait presque dix ans que je n’avais pas lu Margaux Motin.

Comme dans la première BD que j’avais lue, l’autrice se met en scène. L’album démarre sur une séance de paddle sur la mer qui ne se passe pas bien parce que la narratrice a peur et des vagues (et mêmes des vaguelettes) et de tout ce qui peut grouiller à ses pieds. Mais pourquoi donc accepte-t-elle cette sortie paddle ? C’est, elle nous l’explique ensuite, qu’elle a négocié avec son chéri… Elle veut bien faire du paddle s’il la laisse occuper plus de la moitié de leur jardin à planter des fleurs. Car la petite famille (recomposée) a élu domicile dans une grande et belle maison à la campagne. Margaux, qui avait des habitudes de célibataire doit combattre son instinct naturel à vouloir tout contrôler. Entre concessions et frustrations, la vie quotidienne du couple n’est pas toujours simple. Margaux ne rejette pas les responsabilités sur son compagnon, elle admet volontiers et avec humour qu’elle est exubérante, un brin tyrannique, maniaque, dépensière, perfectionniste, têtue.

Je pourrais reprendre mot à mot -ou presque- mon billet d’il y a dix pour J’aurais adoré être ethnologue de la même autrice-dessinatrice : c’est drôle, c’est frais, on peut s’identifier à elle mais rien de transcendant pour autant (« c’est coloré, gai, féminin, frais, ça met de bonne humeur et ça déculpabilise », voilà-t-il pas que je m’autocite… ) Une remarque qui a son importance : les dessins, que j’avais déjà beaucoup appréciés, sont bien plus précis et plus élégants qu’il y a dix ans, c’est un plaisir des yeux, les pleines pages sont magnifiques. La fin plutôt tristounette donne surtout envie de lire la suite !

Le Printemps suivant Tome 1. Vent lointain - Margaux Motin - Livres - Furet  du Nord

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26 octobre 2021 2 26 /10 /octobre /2021 15:36

Là où chantent les écrevisses de Delia Owens | Audiolib

Après une longue pause, je me remets à écouter des livres audio grâce à … un lecteur MP3 tout simplement.

Kya est une petite fille de même pas dix ans qui vit avec sa famille dans une cabane au cœur du marais. Violence et alcool détruisent les uns et les autres et Ma, la mère, s’en va du jour au lendemain pour ne plus revenir. Jodie, le frère aîné de Kya en fait autant et après une cohabitation plus que délicate avec son père, ce dernier disparaît aussi. Kya est livrée à elle-même, elle pêche, elle se cache, elle évite l’école, elle échange des coquillages et du poisson contre un peu d’essence pour sa barque, elle observe la nature et fait collection des plus belles plumes. Sauvage, seule, elle grandit, devient une belle adolescente qui, heureusement, trouve sur son chemin des êtres qui vont l’aider à mûrir. Tate, un adolescent un peu plus âgé, va lui faire découvrir l’amour en douceur et la lecture qui va unir les deux jeunes dans leur soif d’en savoir plus sur la faune et la flore des marais. Mais Tate est aussi attiré par les études, les grandes villes et l’université, il va délaisser Kya qui va faire des rencontres moins favorables. Le meurtre d’un jeune homme, Chase, fil directeur de ce roman, va autant intriguer le lecteur que les personnages, d’autant plus, qu’à un moment donné, Kya a de très bonnes raisons de se débarrasser de celui qui a été son amant.

J’ai enfin réussi à renouer avec l’écoute de livres audio ! Quelle chance j’ai eu d’être tombée sur un livre d’une telle qualité, sur une si bonne lectrice. Le décor associé à ce personnage central sont d’une harmonie parfaite. Au fur et à mesure que j’avançais dans mon écoute, j’ai de plus en plus été séduite par ce roman où j’ai tout aimé : ce marais à la fois inquiétant ; protecteur et nourricier, les personnages si bien dessinés et surtout celui de Kya, véritable héroïne si belle, si pure, si sensible ; le suspense et le mystère qui rôdent autour de cette mort. J’ai du mal à mettre des mots sur l’émotion que j’ai ressentie en terminant cette histoire extraordinaire mettant en scène une femme dans la nature, cette « fille du marais », si bouleversante, si unique, d’une rare profondeur.

Je vous dévoile le secret de ce titre sublime : « là où chantent les écrevisses » est un endroit tellement reculé que la nature reprend ses droits, sans être souillée par la présence de l’homme. Sans aucune hésitation, c’est un immense COUP DE CŒUR.

Le Prix Audiolib 2021 a été décerné à cette excellente lectrice, Marie du Bled. C'est amplement mérité !

 

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23 octobre 2021 6 23 /10 /octobre /2021 17:38

L'Adoption de Zidrou et Monin : être né quelque part - Babelio

Wadji a 10 ans et il vient du Yémen. Gaëlle et Romain, un couple d’une quarantaine d’années, ont enfin réussi à obtenir son adoption. Ils sont heureux, ont invité du monde pour fêter l’occasion. Mais le petit Wadji garde son imperméable, il semble perdu et tout petit dans cette grande maison confortable. Il ne connaît ni le fonctionnement de la douche, ni celui de la balançoire. Il observe et s’imprègne sans comprendre réellement. Si, il comprend quand, lors de son premier jour à l’école, on se moque de lui et qu’il se défend violemment avec ses poings. Quand il est contrarié, frapper devient une réponse. Il refuse également le contact physique et Gaëlle est frustrée de ne pouvoir le prendre dans ses bras. Cette adoption pose de plus en plus problème au couple…

C’est une belle histoire émouvante et cruelle sur l’adoption et ses difficultés et surtout sur la confrontation de deux mondes diamétralement opposés. Les parents adoptifs veulent trop vite faire entrer le garçon dans leur moule à eux en ignorant qu’il a un passé, qu’il avait une vie avant, qu’il avait une famille. Même si c’est un peu caricatural, ce sont les vieux riches occidentaux qui sont les plus cons, la grande sœur fait à peine exception. Le petit gamin est attachant dès les premières planches avec ses grands yeux effrayés et on comprend vite que le passé le hante encore entre ses parents qu’il a perdus et la guerre qui l’a traumatisé. Le dessin est superbe, Monin utilise toutes les palettes de couleurs et brille de précision, les visages sont d’une netteté ! J’ai donc beaucoup aimé cet album qui connaîtra une suite, je l’espère en tous cas, parce que la fin ouverte m’a frustrée ! Je l’ai fait lire à mon ado de fille qui en est sortie complètement révoltée contre les parents.

Le tome 2 qui était une toute autre histoire.

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20 octobre 2021 3 20 /10 /octobre /2021 15:34

Enfant de salaud, de Sorj Chalandon | Éditions Grasset

          « Tu es un enfant de salaud ». En prononçant ces mots, le grand-père de Sorj Chalandon creuse un abyme dans le cœur de son petit-fils. En effet, l’aïeul a vu son fils « habillé en Allemand, place Bellecour » pendant la Seconde Guerre mondiale. Sorj va mettre du temps à accepter l’information avant de vouloir chercher à la confirmer. C’est lorsqu’il couvre le procès de Klaus Barbie en 1987 qu’il va mener l’enquête. Son père qui s’est toujours revendiqué résistant, qui a multiplié les versions de son héroïsme pendant la guerre aurait été un infâme collabo. En réalité, le père a de multiples visages, il a connu cinq armées différentes et cinq désertions. Il continue à nier même lorsque le fils a les papiers officiels sous les yeux. Et il adopte un comportement étrange face à Klaus Barbie et à son procès. Le récit mêle l’avancée du procès à la progression de l’enquête du fils.

Après avoir très déçue par la lecture d’Une joie féroce, j’ai retrouvé le style de Chalandon que j’aime : sa sobriété, sa retenue, son efficacité au service d’un pas de l’Histoire. Ça, c’était pour les cinquante premières pages. La différence ici est qu’il met beaucoup de sa personne dans le livre et je crois que, pour cela et de manière paradoxale, je n’ai pas réussi à entrer dans l’histoire, il m’a semblé qu’il avait écrit ses lignes dans une visée thérapeutique et je m’y suis peu sentie concernée. J’irai même plus loin, je me suis ennuyée lorsqu’il monologuait en ressuscitant le passé de son père sur le style « Le 28 octobre, tu te présentes (…) de là, tu as rejoint une caserne FFI (…) tu as affirmé aux enquêteurs… » Les pages de la fin que j’ai trouvée théâtralisée me sont tombées des bras. Oui, c’est dur de dire ça pour un écrivain qu’on a toujours adoré, ça m’attriste, et je ne me l’explique pas quand je lis d’autres avis complètement élogieux.

« je me suis demandé combien de faussaires vivaient en lui. Combien de tricheurs lui griffaient le ventre. »

« J’ai besoin de savoir qui tu es pour savoir d’où je viens. Je veux que tu me parles, tu m’entends, je l’exige ! Je n’ai plus l’âge de croire mais j’ai l’âge d’entendre et d’accepter. Cette vérité, tu me la dois. »

« Tu as enfilé des uniformes comme des costumes de théâtre, t’inventant chaque fois un nouveau personnage, écrivant caque matin un autre scénario. »

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17 octobre 2021 7 17 /10 /octobre /2021 13:25

Une histoire d'amour - broché - Alexis Michalik - Achat Livre ou ebook |  fnac

J’ai chopé cette pièce de théâtre à la bibliothèque et l’ai lue en deux temps trois mouvements.

                Katia et Justine sont deux jeunes femmes qui se retrouvent dans un bar après s’être connues chez un ami commun. C’est évident, Katia, homosexuelle, drague ouvertement Justine qui – même si elle aime généralement les hommes – se laisse séduire. Elles boivent, vont en boîte, s’embrassent et se retrouvent dans le même lit. Contre toute attente et malgré les craintes de Katia, Justine s’accroche, s’engage, reste, aime sa nouvelle compagne. Et lui demande, deux ans plus tard, un enfant. Même si elle se montre d’abord réticente, Katia accepte l’insémination artificielle pour Justine et, sur un pari un peu rapide, pour elle aussi. C’est Katia qui tombera amoureuse mais Justine ne tiendra pas toutes ses promesses…

Je l’ai dit, j’ai lu la pièce d’une seule traite, j’en sors bouleversée mais un peu frustrée. Les personnages m’ont paru un peu caricaturaux et simplistes, j’aurais aimé, pour une pièce contemporaine, trouver une pointe d’originalité soit dans les dialogues, soit dans la mise en scène. J’ai pourtant été émue par cette histoire d’amour qui finit mal, par les revirements de situation et la métamorphose de certains personnages. Mais je suis restée sur ma faim, il m’a manqué le petit grain de folie que j’apprécie chez Michalik. Evidemment, il faudrait voir la pièce, c’est toujours possible jusqu’à fin octobre à La Scala, à Paris. N’hésitez pas, elle a reçu le Molière de la mise en scène d'un spectacle de théâtre privé, et venez me raconter !

Katia et Justine emménagent ensemble, Katia panique lorsque le livreur apporte un canapé ; il tente de la rassurer (ou pas !) : « C’est normal. Le canapé, c’est le temps qui passe. C’est la peur de l’engagement, l’angoisse de vieillir. La mort qui se rapproche. L’inéluctabilité du néant. »

Le frère de Katia, William, se retrouve à vivre à la campagne, seul, après une rupture : « Ça me fout une angoisse pas croyable. Y a pas un café à dix kilomètres à la ronde, un musée je t’en parle même pas, mon voisin le plus proche a soixante-quinze ans, si la voiture tombe en panne, je meurs. Je meurs de faim. On va me retrouver dévoré par les renards. »

 

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14 octobre 2021 4 14 /10 /octobre /2021 13:24

Une vie française de Jean-Paul Dubois - Poche - Livre - Decitre

J’ai déjà beaucoup lu de cet auteur qui figure parmi mes préférés et il me manquait ce roman qui est peut-être son plus connu.

Paul Blick est un Toulousain né d’un père garagiste et d’une mère correctrice. Bouleversé très jeune par la mort de son grand frère, Paul va mener une vie d’adolescent sage et plutôt timide malgré un ami satyriasis. C’est à 15 ans, sous l’ère De Gaulle, lors d’un stage en Angleterre, qu’il découvre lui-même les joies du sexe. Il pratique beaucoup ! et puis un jour, il rencontre la femme de sa vie, Anna, mais il lui faut d’abord lutter contre un adversaire aussi beau que con. Une fois le couple formé, ce sont des problèmes de conviction politique que doit affronter notre personnage alors que Giscard vient d’être élu. Anna et Paul ont des enfants et c’est lui qui s’en occupe, avec délectation. S’ensuit une inopinée carrière de photographe qui rend Paul très riche. Mais la vie lui réserve encore beaucoup de périodes d’ennui et de grands malheurs…

Quelle magnifique lecture ! Le roman est riche et complet dans le sens où il nous fait rire, nous émeut, nous instruit, nous manipule, nous surprend, nous fait voyager. Il nous parle d’« une » vie française bien particulière mais aussi de nos vies à tous puisqu’on retrouve de petits morceaux de nous disséminés dans chaque chapitre. Ces chapitres prennent d’ailleurs le nom des dirigeants du pays : De Gaulle, Pompidou, Giscard d’Estaing, Mitterrand et Chirac. Dubois a vraiment le chic de passer du cocasse au tragique en deux temps trois mouvements, avec une écriture qui claque et qui fait mouche à chaque page. Âmes écolo, ne passez pas votre chemin, Paul nous a fait deux livres sur les arbres, « Arbres de France » puis « Arbres du monde » qui, comme l’indiquent les titres, portent sur les plus beaux spécimens que Paul a pris le temps d’admirer, de sonder, de photographier. Un pur délice !

Qu’est-ce que j’ai aimé ce livre !

Je ne lui en veux même pas : « Tous les enseignants que j’ai croisés dans ma vie – instituteurs, professeurs, assistants, titulaires de chaire, remplaçants de pacotille -, tous étaient des rosses, des carnes, des baltringues lâches et démagogiques, imbus d’eux-mêmes, serrant la bride aux faibles, flattant la croupe des forts, et conservant jusqu’à la fin ce goût maniaque de la classification, de l’élimination, de l’humiliation. »

Les premiers temps passés avec Anna : « L’air de la vie sifflait doucement à vos oreilles et une brise aux odeurs de foin coupé vous caressait le visage. Les heures et les jours s’engrenaient sans la moindre secousse, et la nuit, lorsque vous ouvriez les yeux, vous éprouviez ce précieux sentiment d’avoir trouvé votre place sur cette terre. »

« L’argent avait l’odeur agressive et prémerdeuse des déodorants pour toilettes. »

A la découverte des arbres … : « Commença alors la période la plus mystérieuse et la plus magique de ma vie. Aujourd’hui encore, j’ai du mal à en parler, à décrire cette succession quasi ininterrompue d’éblouissements qui, d’escale en escale, d’arbre en arbre, ont changé ma vision et ma perception du monde. Voyageur dépourvu de bagages, nomade à l’esprit dépouillé, déchargé de toute responsabilité, de la moindre implication, botaniste d’opérette, l’esprit léger, aérien, je mesurais l’infinie beauté de la nature végétale. » 

-COUP DE CŒUR-

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10 octobre 2021 7 10 /10 /octobre /2021 09:38

Livre: Ne t'arrête pas de courir, Mathieu Palain, L'Iconoclaste,  9782378802394 - Leslibraires.fr

Le narrateur-auteur, Mathieu Palain, journaliste, décide de rencontrer celui qui a son âge et qui a grandi, comme lui, en banlieue : Toumany Coulibaly. L’homme est à la fois champion et voyou. Repéré pour ses talents de course à pied, il deviendra vite un champion du 400m… tout en continuant son vice préféré : le vol. Dès l’âge de 6 ans, il se met à chaparder tout ce qui se trouve autour de lui, de la console de jeux du copain à la boutique SFR du coin. Plus tard, alors qu’il vient de rafler la victoire au championnat de France, il braque des pharmacies, en Ile-de-France, les unes après les autres. Et c’est en prison, au parloir, que le journaliste Mathieu Palain le rencontre tous les mercredis et qu’il écoute son interlocuteur avec attention, retranscrivant ensuite ses paroles. La dernière partie du roman est plus personnelle, le journaliste se demande pourquoi il a choisi ce « sujet » et lorsque deux psys finissent par lui dire « Protégez-vous », il s’interroge davantage sur son attrait de la thématique carcérale.

Qu’est-ce qui charme tant dans ce roman ? Ce n’est pas l’écriture qui n’a rien d’extraordinaire, ce n’est peut-être pas non plus le personnage principal qui hésite entre le rôle de héros et de looser… c’est peut-être la sincérité et l’authenticité de l’auteur, la relation forte entre les deux hommes dont on partage un petit bout. Et puis, on aimerait tellement qu’un petit délinquant banlieusard s’en sorte et arrête ses conneries. Le roman prend une autre dimension dans la dernière partie, plus psychologique, plus fouillée. C’est à ce moment-là que l’auteur fait des parallèles vraiment intéressants entre sa propre vie et celle du prisonnier. Des réflexions sur la vie carcérale jalonnent également le livre accompagnant celles sur la réinsertion, apparemment impossible lorsque le prisonnier a été enfermé plusieurs décennies. Le sujet est passionnant, le journaliste se rend attachant par ses tâtonnements et ses questionnements et c’est aussi ce qui prouve, selon moi, qu’il le maîtrise à fond. Un portrait tout en nuances, sans manichéisme d’un « vainqueur le jour, voleur la nuit. »

Où vol et course à pied se rejoignent – et c’est un conseil que Toumany donne à son petit frère ! : « Le secret dans le vol, c’est le cardio. Il te faut un gros cœur pour courir vite et tenir longtemps. Fais confiance à tes jambes et tu te feras jamais prendre. »

Toumany participe au programme Sycomore qui a pour visée de confronter détenus et victimes : « L’idée, c’est que des personnes de chair et d’os viennent raconter à des auteurs ce que ça fait de se trouver de l’autre côté du canon. Le traumatisme débarque dans votre vie. Les relations sociales qui s’effritent. Le sommeil qui disparaît. A la fin des six semaines, on espère que ces échanges auront provoqué une prise de conscience chez les détenus, des regrets sincères, quelque chose d’un peu zacchéen : « Si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »

« Plus on en parlait, et plus je sentais Toumany parvenu au seuil de toxicité de la prison. Il lui était encore possible d’envisager l’avenir mais il ne fallait plus traîner, sous peine de devenir un insortable, un de ces mecs pour qui la taule est comme un tatouage sous leur peau. »

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7 octobre 2021 4 07 /10 /octobre /2021 13:45

Jonathan Munoz et  Gaet's - Un léger bruit dans le moteur.

D’après le roman du même nom de Jean-Luc Luciani.

Un minuscule village perdu au milieu de nulle part. Des gens pauvres, stupides et incultes. L’épicière est la seule qui se rend dans « le monde de dehors du village ». Le narrateur ? Un petit garçon qui éprouve un besoin inextinguible et un plaisir intense à tuer. Sa mère est morte à sa naissance, il a poussé son demi-frère du haut de la balançoire avant d’écraser sa tête contre le sol, il a planté son équerre dans l’œil de sa maîtresse, il a enfoncé son copain dans une grosse flaque de boue, et la série ne s’arrêtera pas là … son unique objectif est simple : tuer tout le monde. Il y parviendra et quittera cet univers gris et sordide.

Est-ce pertinent de dire que c’est sinistre du début à la fin ? Non seulement ce petit garçon est affreux mais les gens qui l’entourent sont eux-mêmes laids, grotesques et dénués d’humanité. Le décor est glauque lui aussi, des cabanes en bois grossièrement bâties, un vent hostile, des rues sombres où personne ne passe jamais. La somme de tant de données négatives a (presque) pour effet d’obtenir un résultat positif, on est (presque) content pour ce garçon qui peut se barrer de ce hameau dirigé par des adultes irresponsables et odieux. En tous cas, on ne reprochera pas à cet album mièvrerie et platitude ; j’ai aimé cette noirceur qui m’a amusée jusqu’à ce que je me dise que ça existe encore, ce genre d’endroit… même si vous entendez votre voiture faire un « léger bruit dans le moteur », ne vous arrêtez pas !

Jonathan Munoz et  Gaet's - Un léger bruit dans le moteur.

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