J’avais découvert cette bande dessinée il y a quelques mois sur un blog (que son auteur m’excuse, je ne sais plus duquel il s’agit !) et j’avais craqué sur la couverture qui m’avait impressionnée. Maintenant que j’ai l’ouvrage entre les mains, j’aime toujours autant ce décor majestueusement doré et son petit bonhomme au centre, pourtant pas si petit que ça. Les planches de la BD n’ont presque rien à voir avec cette première de couverture.
C’est bien de politique qu’il s’agit. Arthur Vlaminck, est engagé, à sa grande surprise, par le ministre des affaires étrangères (qui a de fâcheuses ressemblances avec un certain D. de Villepin) qui le charge d’une mission : « le langage ». En fait, il devra écrire les discours de ce même ministre. Des problèmes surgissent telles des montagnes infranchissables : le ministre est un hyperactif nombriliste et perfectionniste qui n’est jamais satisfait que par ses propres trouvailles ; l’univers gouvernemental n’est qu’entourloupes, supercheries, langue de bois (comment, vous ne le saviez pas déjà ?) et notre pauvre Arthur bosse plus de 24h par jour (quoi ?)
L’ensemble est jubilatoire quoiqu’un peu longuet (pour ma part, les 96 pages auraient très bien pu se réduire à une soixantaine). Les dialogues ne nous prouvent qu’une chose : voilà bien un milieu où l’on fait du vent avec rien, où l’on parle dans le vide en accumulant inutilités et vanités. J’ai d’ailleurs adoré ce ministre qui fait des moulinets avec ses bras, qui tente de faire mille choses à la fois pour un résultat plus que médiocre. Mais l’œuvre de Lanzac va plus loin (il a été ancien conseiller de Villepin !) et nous démontre aussi que cette fonction de haut rang ne peut qu’être mission impossible dès le départ : il faut contenter un maximum et contrarier un minimum, il faut ménager son monde et ne froisser personne…Univers qui me débecte dans l’absolu mais qui m’a bien fait rire dans cet album. Le ministre utilise des mots-clés à la manière de Delarue : "légitimité, lucidité, efficacité" dont la variante est "responsabilité, unité, efficacité".
Un petit extrait où l’imposant ministre explique à sa secrétaire l’importance du stabilo : « …je vais vous donner un conseil : ne faites jamais confiance à ces intellectuels avec leur plume baveuse. Ils écrivent n’importe quoi. Ils n’ont même aucune idée de ce que c’est que l’écriture. Ce qui compte, c’est d’y voir clair. Stabilo Tchac ! Stabilo Tchac ! Regardez par exemple ce livre. Vous voyez tout de suite qu’il est nul. Y a rien qu’est stabilossé. Alors que ça, là, j’ai tout stabilossé. Ca, c’est un bon livre. Ca, c’est du lourd ! du lourd ! Ce qui compte, c’est la matière dure. C’est ce qui est jaune. Moi, j’ai un radar pour ça. Et vous savez quoi, même ? Un livre, pour savoir s’il est bien, j’ai à peine besoin de le lire. Je le stabilosse intuitivement. » cette dernière phrase a de quoi devenir culte, non ?
Quant au graphisme, je dois dire quà part la couverture, je n'ai pas trop apprécié. C'est drôle parce que le style de dessin semble correspondre au personnage du ministre : vif, rapide, quelque peu brouillon ; les visages ne sont pas nets, beaucoup de cases se ressemblent...