Attention : coup de cœur !
Sylvie Janin est une romancière qui n’écrit plus rien depuis que son compagnon, Pascal, l’a quittée. Devant son verre de barbituriques, prête à passer à l’acte, elle se ravise et décide de passer une annonce recherchant un jardinier à plein temps. S’en fichant complètement des plantes, des fleurs et autres pelouses, elle espère surtout tomber sur un beau mâle qui ferait germer en elle une étincelante inspiration.
Bruno est le jardiner qu’elle embauche. Il est malheureux lui aussi, il est trompé par sa femme régulièrement, il a tenté de se suicider lui aussi. Lorsque Sylvie l’emmène dans une villa au bord de la mer entourée de sable, Bruno s’étonne de la nécessité d’avoir un jardinier. Puis il découvre la vérité en lisant quelques pages de son manuscrit. Suit alors un huis clos oscillant entre drame et comédie, entre farce, suspense et réflexion philosophique. Car le rapport dominateur/dominé s’inverse, maintenant que Bruno sait pourquoi il est là, il veut être le héros du roman, alors que Sylvie tente de le chasser.
On ouvre le bouquin, on ne le lâche plus d’une page ! C’est délicieux, jubilatoire, jouissif… que dire encore, chaque réplique tombe comme un couperet, c’est drôle mais aussi extrêmement intelligent ! Ca parle d’amour, de création littéraire, de temps qui passe, de séduction, de famille, de vocation… j’ai pris mon pied à chaque page et à la fin, je n’ai plus eu qu’une idée en tête : jouer le rôle de Sylvie ! C’est un rôle magnifique. On peut rêver !
« Bruno. Faut les laisser être cons, dans leur coin, sinon, ça déteint. La connerie. Et j’ai remarqué que ça déteint par les nerfs. Regardez, quand vous vous énervez. Jamais on croirait que vous êtes une femme intelligente. »
« Faut toujours laisser parler ses personnages. Ils ont leur propre vérité, non ? Moi, en tous cas, j’ai la mienne ! Vous voulez écrire un libre bidon ? Vous voulez que votre personnage ressemble plus à rien ? Et que les critiques disent : « Elle l’a perdu en route ? »
« Vous avez peur de la vie, vous attendez que les mots vous tombent tout cuits du stylo, vous avez jamais rien fait par quelqu’un par amour à part des ratures, vous prenez votre pied en aimant un mec qui vous aime plus, parce qu’au moins y a pas d’efforts à faire, vous avez jamais eu de chien, de chat ou de géranium : ça fait des saletés, ça prend du temps, vous voulez être responsable de rien, je suis peut-être le sujet de votre vie et vous allez me laisser partir sans bouger votre cul parce que ça vous arrange ! Vous êtes ravie d’arrêter mon bouquin et d’en commencer un autre avec le facteur, le pompiste ou le plombier, n’importe qui pourvu qu’il soit neuf ! Vous avez peur d’aller au bout des choses, d’aller au fond des gens, de découvrir qui je suis vraiment ! Je tiens pas en dix pages, madame Janin ! »
4/12 pour le challenge théâtral de Bladelor