J’avais beaucoup aimé la brièveté et les phrases choc de L’agrume. J’ai donc continué ma découverte de cet auteur à part avec ce très court livre (63 pages seulement !)
Comme le titre l’indique, l’auteur nous parle de son grand-père, et fait même parler son grand-père, mais pas uniquement : c’est toute la famille qui est passée au crible. Attention, ce n’est pas un récit mais une succession de souvenirs, d’anecdotes, de courtes descriptions, d’expressions que l’auteur a dites ou entendues, enfant. L’incipit nous plonge immédiatement dans cette famille un peu particulière où l’excentricité faisait place à des marques de tendresse : « Mon grand-père amenait ses maîtresses chez lui et faisait l’amour avec elles en couchant ma mère dans le même lit. Ma grand-mère, dont c’était le deuxième mari, demanda le divorce. Après avoir fait mine de vouloir se tuer avec un couteau de cuisine, il accepta gentiment. Ma grand-mère se remaria avec un gigolo, et mon grand-père épousa sa secrétaire qui avait trente ans de moins que lui. Comme voyage de noces, il l’envoya en vacances avec ma mère, car ses affaires le retenaient à Paris et qu’il ne pouvait se permettre de prendre du bon temps comme ça. »
Sans doute totalement autobiographique, ces courts paragraphes semblent avoir un seul objectif : rendre hommage à la famille, aux parents et grands-parents qui ont construit l’auteur, mot par mot, geste par geste, à coup de cadeaux, de colères, d’erreurs, de rires. Et finalement, on se retrouve dans ces petits riens qui font toute la différence. Chaque famille a ses habitudes, ses objets fétiches, ses personnages farfelus, ses phrases rituelles, ses manies. Un joli petit livre qui réclame qu’on s’en souvienne.
« Mon grand-père était très sévère sur la façon de se tenir à table. Il faisait des yeux exorbités si nous agitions nos couverts en parlant. »
« Je ne comprenais pas pourquoi on disait changer d’avis comme deux chemises. »
« Ma mère se souvenait de toutes les poésies qu’elle avait apprises en cours. »
« Un jour, en traversant la rue de la Chaussée d’Antin, mon père m’a dit qu’il était riche de cœur. »