Je suis fidèle à ce que j’aime et, après avoir goûté à Une île trop loin et à L’étang des nénuphars, je n’ai pu m’empêcher de vouloir connaître la suite des aventures de Steffi et de sa petite sœur.
Steffi est toujours à Göteborg, elle habite maintenant chez Maj, une amie, et sa nombreuse famille. Elle revoit également Vera, son amie de l’île, qui, contrairement à Steffi, espère vite trouver un amoureux pour se marier. Si Steffi reste toujours une excellente élève, sa bourse d’étude est encore une fois mise en péril, faute d’argent. Son professeur, Hedvig Björk, la guide et lui propose de sauter une année et d’étudier pendant les vacances, avec son aide, pour passer à l’année supérieure.
Ces vacances estivales sur l’île seront riches en émotions : Steffi se rend compte que, malgré la rudesse et la bigoterie de sa mère d’accueil, tante Marta, elle a eu beaucoup de chance. Le changement d’attitude de sa sœur Nelli qui a tendance à oublier d’où elle vient, agace l’aînée.
Steffi grandit, elle mûrit, s’affirme dans ses choix, elle veut être médecin comme son père. Elle découvre la vie amoureuse à travers l’’histoire de Vera qui, à 16 ans, se retrouve enceinte et presque mariée. Elle réfléchit aussi à la religion juive de ses parents, à celle que tante Marta tente de lui inculquer. Elle rencontre une Autrichienne qui est dans la même situation qu’elle mais qui souhaite rejoindre la Palestine au plus vite pour affirmer haut et fort son judaïsme.
Et il y a ses parents. Enfermés dans le camp de Theresienstadt, ils ne peuvent envoyer que de courtes lettres de 30 mots à leurs filles… jusqu’au jour où… une des lettres annonce une tragédie.
J’ai beaucoup apprécié ce troisième tome. Steffi devient une adulte, son portrait est plus fouillé que dans les deux tomes précédents. Elle doit faire face à de nombreux obstacles : le contexte historique, l’ingratitude et l’indifférence de sa sœur, l’absence de ses parents… mais elle sait aussi qu’elle a des gens qui l’entourent, l’apprécient et l’aiment. Et puis, elle représente le courage, la ténacité, la constance, de belles valeurs pour nos jeunes lecteurs. La fin du roman est douloureuse mais Anika Thor ne plonge jamais dans le sentimentalisme, elle reste sobre et juste.
Le titre renvoie à un sous-marin suédois coulé par la marine allemande, preuve que la guerre envahit petit à petit le pays scandinave mais également métaphore de l’état intérieur de Steffi qui n’est que bouillonnement, secrets et zones sombres.
Cette série est magnifique et devrait être plus connue. Je suis ravie parce que certains de mes 4ème ont aimé le premier tome et ont demandé à lire la suite.
« Avant l’arrivée des Allemands, Steffi ne se voyait pas comme une Juive. Pour elle, son appartenance au judaïsme n’avait pas d’autres implications qu’une visite à la synagogue deux ou trois fois par an, ainsi que ses amis chrétiens qui se rendaient à l’église à Noël et à Pâques. Ce sont les Allemands qui les ont définis, elle, Nelli et ses parents, comme membres d’un groupe particulier. Ce sont eux qui les ont obligés à déménager et à changer d’école.
En fait, ce sont les Allemands qui ont fait d’elle une Juive. Plus tard, en arrivant sur l’île, elle est devenue chrétienne. Membre de l’Eglise pentecôtiste, « sauvée » et baptisée. A présent, elle est habitée par un doute secret, par le sentiment d’une absence d’appartenance. Par le sentiment de faire semblant. »