Ah la laaaa, où avais-je donc pêché l’idée de lire ce livre de 950 pages ?
Tout démarre un beau matin de printemps 1540 alors que Mattias Tannhauser essaye de venir à bout de la fabrication d’une dague à la forge de son père, quelque part dans la vallée des Carpates. A douze ans, Mattias assiste au massacre de sa famille par les troupes ottomanes qui finissent par enlever le garçon. Après avoir fait partie de l’élite militaire turque entièrement dévouée au sultan, Mattias se reconvertit dans le commercer d’opium et d’armes. La Valette, le Grand-Maître de l'ordre des Hospitaliers, fait cependant appel à lui en 1565 pour la défense de l’île de Malte, menacée d’invasion par les Turcs. En parallèle, une magnifique jeune femme va également demander de l’aide à Mattias : elle voudrait récupérer le fils qu’elle n’a pas connu et qu’on lui a volé, douze ans auparavant, à sa naissance. Oui, mais le papa de ce fiston délaissé à Malte n’est autre que Ludovico Ludovici, légat personnel du pape Pie IV et toujours amoureux de Carla même s’il lui a préféré l’Inquisition. Rajoutez à cela des personnages secondaires colorés : Amparo, l’amie très proche de Carla, un peu simplette mais très belle aussi (Mattias sera un peu amoureux d’elle et va lui prouver – physiquement – à maintes reprises, savamment décrites dans le roman…), Bors, l’ami fidèle de Mattias, prêt mourir pour lui. Ça éclate de partout, c’est vif, remuant, sanglant, bouillonnant…
Au final, que retiendrai-je ? Le contexte historique, sans aucun doute, les batailles d’une violence inouïe (les têtes volent allègrement – au sens propre du terme - des bassines sont remplies de membres amputés, les soignants rentrent les tripes des malades dans leur bide comme des femmes qui s’efforcent à faire entrer un foulard un peu trop grand dans un sac un peu trop petit…), l’histoire d’amour (heureusement qu’elle est présente, et bien présente, à la manière d’une rose éclatante de blancheur sur un tas de fumier puant) complètement romanesque entre Mattias et la belle et sage Clara qui pourtant laisse une place à la douce et folle Amparo. Ça peut paraître complètement péjoratif, ça m’a fait penser à un feuilleton télévisuel d’été, une histoire aux multiples rebondissements avec drames et tragédies à la clé et l’amouuuur qui couronne le tout. Les bestialités en plus. Et pourtant, j’ai pris goût à tout ça, je me suis attachée aux personnages et malgré le manque de crédibilité de certains événements, je me suis laissée entraînée dans cette musique maltaise ensorcelante.
Cette longue lecture me permet de participer au challenge de Brize, "Pavé de l'été" et m’a fait prendre conscience (en avais-je vraiment besoin ?) que les bons gros livres, y’a que ça de vrai pour s’éloigner, s’évader d’un quotidien parfois morose. Et très bientôt, un autre pavé !!!
La rencontre Mattias - Carla : « Ses traits étaient clairs et dessinés, ses iris verts et comme encrés d’un fin cercle de noir. Malgré son nom, elle n’avait pas l’air française, mais possédait la stature d’une Sicilienne. Ses cheveux étaient de la couleur du miel, et traversés de mèches plus jaunes, comme si l’un des conquérants normands avait laissé des traces dans son sang. Ils étaient ramenés en une tresse nouée sur son crâne, mais si on leur rendait leur liberté, ils descendraient en cascade d’or. Malgré ses efforts, les yeux de Tannhauser revinrent vers son buste. La robe était attachée sur le devant par un ingénieux système de crochets et de boutonnières et venait soutenir ses seins – qui étaient de taille modeste et d’une blancheur frappante – en deux hémisphères exquis. Ces hémisphères étaient séparés par une fourche dans laquelle il aurait été heureux de tomber pour l’éternité. »