J’ai lu beaucoup de critiques sur les blogs ou ailleurs au sujet de ce livre.
Je crois que je vais avoir du mal à en parler. Si la lecture est « facile » à cause du style fluide et simple, le contenu s’avère beaucoup plus difficile.
Je résume rapidement : le roman (je dis « roman » mais le genre n’est spécifié nulle part dans le livre, il s’agirait plus d’un récit autobiographique) contient deux volets : le premier raconte le tsunami ou plutôt un drame individuel lié à ce drame à grande échelle : des parents qui perdent une petite fille, Juliette, tuée par la vague. Le second évoque une autre Juliette, la sœur de la compagne de l’auteur, disparue, elle aussi trop tôt, emportée par un cancer. Epouse et mère de famille, elle laisse derrière elle un mari aimant et trois filles.
Un livre sur la perte d’un être cher, sur la souffrance, sur ce qu’il y a de plus difficile à vivre dans ce monde. Et je me suis sentie mal de la première à la dernière page. Certains passages m’ont hélas ! fait penser à une émission de téléréalité, d’autres sont plus pertinents, plus profonds, plus édifiants, je ne le nie pas, mais, j’ai eu beaucoup de mal avec ce livre. J’éprouve de réelles difficultés à expliquer ce qui m’a gênée. Ce livre s’apparente pour moi aux multiples livres publiés chaque année qui retracent « mon combat contre le cancer » ou encore « comment j’ai survécu », en mieux écrit, soit. Je peux paraître cruelle et je vais faire tache dans le flot de critiques enthousiastes mais c’est ainsi.
« Tout y est vrai » proclame la quatrième de couverture. L’auteur parle aussi de lui-même, de son histoire d’amour avec Hélène, de sa vie qu’il trouvait malheureuse jusqu’à l’écriture de ce livre. Il m’a agacée. Il a été vrai, lui aussi, ne niant ni ses défauts, ni ses faiblesses, c’est certes louable mais il m’a paru égoïste, ingrat et indécent.
La composition du livre m’a dérangée aussi : une petite partie est réservée à la mort de la petite Juliette et à sa famille, et les trois derniers quarts du livre sont consacrés à l’autre Juliette et à son collègue, Etienne. Et surtout une bonne vingtaine de pages nous expliquent le fonctionnement de la justice (Juliette et Etienne sont juges), le travail des protagonistes et la vie au tribunal. Ce dernier point m’a non seulement lassée mais j’ai aussi eu du mal à comprendre son lien avec le thème général du livre.
En fait, je ne condamne pas le livre dans sa totalité, ce qui me déplaît profondément c’est de l’avoir vu publier finalement, pour moi ce sont des histoires qui devaient –qui devraient- rester dans le cadre de l’intime, du familial, du privé. D’accord, il y a des « leçons » qu’on peut tirer de ces drames. Les parents de la petite Juliette ont fait deux autres beaux enfants, le mari de la Juliette adulte semble avoir accepté la mort de sa compagne, ou en tous cas, a appris à vivre avec relativement sereinement.
Ma réflexion progresse encore un peu et je me dis que le chemin que nous montre Carrère, c’est à nous de le trouver seul. Penserais-je que la mort et la perte d’un être proche ne sont pas des sujets de littérature ? Non. Certains blogueurs ont trouvé que tout était raconté avec sobriété. Je n’ai pas trouvé. La mort de Juliette est décrite avec détails et précision, on a l’avant, le pendant et l’après ; le témoignage de chaque membre de la famille nous est rapporté et décortiqué.
Il y a des choses qui se vivent (malheureusement), qui ne se lisent pas. Ma phrase vient immédiatement contredire celle qu’on trouve dans le livre : « toi qui es écrivain, tu vas écrire un livre sur tout ça ? ».
Je reste prudente, c'est sans doute parce qu'on m'a renvoyée à mes propres peurs que ce texte m'a tellement agrippée et écorchée. Pour le dire autrement, c'est un livre que j'aurais préféré ne pas avoir lu (je pense cela très rarement après une lecture!)
à vos remarques!