Raya a 19 ans, elle vit en Iran et est lycéenne dans une prépa qui devrait lui permettre de poursuivre des études d’art dramatique. Mais Raya est lesbienne, punk, elle a les cheveux en partie rasés avec une mèche violette qui lui tombe sur le front, son maquillage est outrancier, ses ongles longs et vernis, et elle aime provoquer ses camarades de classe ou les adultes qui l’entourent. Evidemment, dans ce pays ultra psychorigide dirigé par des mollahs intransigeants avec les conditions des femmes, ça passe mal, ... très mal. Les parents de Raya sont séparés, sa mère s’inquiète constamment pour sa fille et son ivrogne de père est fier des choix révolutionnaires qu’elle a faits. Raya fait tout pour sortir de ce pays mais gagner sa vie ou obtenir un passeport en Iran n’est pas chose aisée pour une femme.
Une vraie déception pour cette BD qui traite d’un thème qui ne doit pas être pris à la légère. Les dessins sont simples et très colorés, les couleurs vives voire fluorescentes se multiplient sans qu’on comprenne très bien pourquoi. Le scénario se grime d’artifices, devient très vite peu vraisemblable et finalement, on a presque l’impression d’assister à une vaste blague, de participer à un jeu qui amuse l’héroïne dans un univers fictif. Les réactions des personnages paraissent souvent excessives et déplacées, et les rendent clairement antipathiques, on a du mal à s’attacher à eux. J’ai offert l’album à ma fille qui ne l’a pas non plus aimé, j’ai pourtant été conseillée par une libraire qui pensait peut-être bien faire (les couleurs attireraient les jeunes ?) mais cet album ne rend pas service à la cause des femmes en Iran, me semble-t-il. Davantage d’authenticité et de subtilité dans les propos comme dans le graphisme aurait été appréciable. Peut-être l’album, pourra-t-il, à la rigueur, convenir à un lecteur qui ne connaît rien à la situation du pays ? Il appuie avec justesse sur l’insécurité de la vie des femmes et sur l’hypocrisie ambiante. J’ai tout de même appris qu’Ormuz, au sud du pays, une île où la liberté existe encore, est devenu le refuge de celles/ceux qui étaient rejeté-e-s de cette inflexible société. Evidemment, même là-bas, une surveillance de tous les instants s’opère. La liberté est une richesse difficile à acquérir.
« Regarde ce qu’ils ont fait de nous... Un peuple de névrosés qui vit dans une angoisse permanente. Comme les Russes sous Staline. »
« Ma mère a raison, je vais passer ma vie à avoir peur dans ce pays. Mentir ou risquer la mort en permanence... charmant programme ! »
L’excellent Badjens de Delphine Minoui est à lire sur le même contexte.