Dans le quartier du Bois Fleuri, plus précisément dans l’immeuble appelé Plein Ciel, un vieil homme, Emile, se jette du 17ème étage. Ce suicide paraît incompréhensible pour ses voisins : Martine côtoyait l’homme depuis des années et elle ne soupçonnait rien de son mal-être. Les autres n’en savent pas plus mais se réunissent pour lui rendre hommage ; l’un récupère le chat d’Emile, l’autre sa grande plante verte ou encore une collection de diapositives. L’appartement du vieil homme ne reste pas longtemps vide, son petit-fils vient l’occuper avec son compagnon. Les deux taisent un secret autour d’un projet de rénovation du quartier...
J’ai toujours adoré les histoires d’immeuble, je ne sais pas si ça tient au souvenir de lecture de Vie mode d’emploi de Perec ou parce qu’a contrario j’ai toujours vécu dans une maison individuelle. Découvrir que cette BD évoque un endroit de ma région, à savoir le quartier des Coteaux à Mulhouse (qui a plutôt mauvaise presse), m’a fait plaisir également. Le scénariste sait de quoi il parle puisqu’il est Mulhousien et a grandi dans un de ces grands ensembles (au 16e étage d’une tour). Ce que j’ai particulièrement aimé, c’est la vision qui est tout sauf négative de cette barre et de ses habitants, l’auteur le précise dans l’annexe, avec 400 personnes de tous âges, des dizaines de nationalité différente, c’est un petit village à la verticale. Solidarité, entraide, amitié sont les qualités qui sont valorisées dans cette très belle BD aux dessins élégants aux allures un brin désuètes (un style parfait pour exprimer la nostalgie). Le même genre d’histoire est relaté dans l’excellent film Gagarine de Liatard et Trouilh avec ces tours et ces barres construites à la va-vite dans les années 60-70 qui incarnent alors renouveau et modernité et qui, un demi-siècle plus tard sont destinées à être montrées du doigt voire détruites. C’est avec une grande tendresse que l’humanité transparaît entre les cages d’escalier, les ascenseurs et les paliers des différents étages. Une belle réussite.