Ariane Claessens est en train de jouer l’Opus 77 au piano aux funérailles de son père, chef d’orchestre de renommée internationale. Eminente musicienne elle aussi, elle déplore l’absence de son violoniste de frère. Ses pensées la ramènent aux temps de son enfance, lorsque sa mère a commencé à dérailler, que son père plaçait la barre très haut pour ses musiciens d’enfants et que son frère se distinguait par son attitude introverti et sauvage. Ariane, quant à elle, a toujours excellé mais a dû affronter ses angoisses avant d’entrer en scène, a collectionné les aventures pour ne pas avoir à s’attacher et a longtemps recherché ce vieux professeur, Krikorian, qui avait tant fait pour son frère.
Vous l’aurez compris : on est dans la musique jusqu’au cou, les cinq chapitres correspondent aux cinq mouvements de l’œuvre de Chostakovitch : Nocturne, Scherzo, Passacaille, Cadence et Burlesque ; il n’est question que de partitions, de technique, de répétition, de concerto, de mélodie... tout ça était peut-être trop pour moi car, surtout, le roman donne une vision négative de la musique classique, vision largement entretenue par les trois personnages principaux d’une froideur glaciale (oui, ça vaut bien un pléonasme). Tout n’est qu’exigences, intransigeance et impassibilité. J’ai trouvé ça oppressant malgré quelques belles images comme ce chien noir qui suit Ariane dès la veille d’un concert et qui symbolise ses peurs et l’écriture tout à fait intéressante de l’auteur. Ragougneau a su élégamment distiller ses informations par le biais d’une intrigue dirigée par une main de maître et un suspense parfaitement bien orchestré. Je crois que c’est l’univers de la musique classique qui ne veut pas de moi... (j’ai bien conscience que mon avis est très contradictoire !)
J’ai complètement craqué sur la première phrase du roman (oui, il m’en faut peu parfois) : « Nous commencerons par un silence. »
« A la fin c'est toujours le silence qui triomphe mais il nous reste à tous un ou deux airs en mémoire, qui perdurent de génération en génération. Presser ces fichues touches blanches et noires, c’est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour ne pas m’effondrer. Il n'y a que la musique pour faire face à la mort. »