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21 août 2023 1 21 /08 /août /2023 13:48

John Dos Passos : Manhattan Transfer | John Dos Passos : Man… | Flickr

Il a fallu qu’on me donne un petit coup de coude (merci Yohann !) pour que j’entame enfin cette lecture. Aucun regret.

Au début du XXe siècle, à Manhattan. Bud est arrivé ici parce qu’il a fui la campagne et surtout un père trop violent. Jimmy Herf perd sa mère avec qui il entretenait une relation fusionnelle et il est recueilli par son oncle et sa tante. Gus, le laitier, se fait renverser par un train et son avocat deviendra aussi l’amante de sa femme Nelly. Cassie, la belle danseuse, souhaite que le monde soit gouverné par une « beauté spirituelle » alors que son Morris ne cherche qu’à lui sauter dessus. Emile, sans le sou, s’échine à séduire Mme Rigaud, gérante d’une confiserie, afin de reprendre l’affaire. Ils sont une bonne dizaine à évoluer sous nos yeux, se battre, rire, tromper, pleurer, bouder, mourir.

Quelle fresque ! une fourmilière géante. Des rencontres, des bousculades, des incartades, des partages, des foules, des masses, bref tout ce qui évoque les multitudes ; et ça fourmille, ça foisonne, ça grouille, ça pullule. C’est Zola à New-York, évoquant par le biais de la fiction le capitalisme, le melting-pot culturel, la corruption, l’éclectisme, le racisme, l’insécurité, l’indifférence ... entre autres. On pourrait parler de superpositions ou de juxtapositions dans la construction de ce roman qui nous donne encore davantage une vision remuante de cette ville fascinante. L’usage de l’énumération ponctue allégrement le récit. Les ellipses tendent à rendre ce livre assez complexe dans sa structure, il ne faut pas y chercher une lecture de plage mais je suis contente d’avoir enfin découvert ce monument américain de plus de cinq cents pages. Les portraits m’ont particulièrement plu comme le prouvent les trois premiers extraits ci-dessous, il s’agit d’une véritable comédie humaine qu’on apprend, certes peut-être pas à apprivoiser, mais à observer avec un regard conciliant et amusé.

« Une femme blonde, à longues dents, arrivait, enveloppée dans une sortie de théâtre saumon. Elle donnait le bras à un homme à face de pleine lune qui portait son chapeau haut-de-forme devant lui comme un pare-chocs. Puis venaient une petite femme frisée qui montrait ses dents en riant ; une grosse femme coiffée d'une tiare avec un ruban de velours noir autour du cou ; deux hommes, l'un avec un gros nez en pied de marmite, l'autre avec une longue figure couleur de cigare... »

« Schmidt était un gros homme qui s’était rétréci. La peau pendait flasque sur ses joues hâves. »

« Une femme avachie sous son imperméable demandait un café au comptoir. Son visage rouge et violacé avait des reflets de viande pourrie. »

« De tous côtés, montait un bruissement de vie qui s'éveille. Elle se sentit affamée et seule. Le lit était un radeau sur lequel elle se trouvait abandonnée, seule, sur un océan grondant. Un frisson lui parcourut le dos. Elle rapprocha ses genoux encore plus près de son menton. »

« Ce qu’il y a de plus terrible quand on ne peut plus supporter New York, c'est qu'on ne sait pas où aller. C'est le sommet du monde. La seule ressource est de tourner en rond, comme un écureuil dans sa cage. »

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commentaires

T
Je l'ai abandonné l'an dernier...je n'ai jamais pigé (pendant une centaine de pages) où l'auteur voulait en venir, ça m'a saoulée 😅
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D
Bonjour Violette, voilà un roman qu'il faudrait que je relise, j'avais adoré. Dos Passos est un écrivain à (re)découvrir absolument. Bon samedi.
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V
Contente de faire office de figure de piqûre de rappel :)
P
Il faudrait bien aussi qu'on me donne peut-être plus qu'un simple coup de coude, il y a tant à lire que je ne sais plus où donner des yeux !<br /> Bonne soirée<br /> Anne
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V
même sentiment, ... ne plus dormir serait peut-être une solution!!
S
Je l'ai eu dans mes mains car j'étais motivée pour le lire mais c'est un pavé écrit petit et cela ne me convient pas. Dommage !
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V
Oui c’était pareil pour cette édition, il faut s’accrocher !!
D
J'avoue que la couverture ne m'aurait pas trop donné envie de lire ce titre, mais je vois qu'il a l'air passionnant !
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V
c'est ma toute vieille édition, il doit y avoir mieux :))
M
Je ne crois pas avoir jamais tenté sa lecture mais pourtant la couverture me dit quelque chose (peut-être ma soeur l'avait-elle lu ??) Merci pour ta chronique, pour l'instant je ne suis pas tentée pourtant l'auteur est à connaître
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V
c'est une vieille édition... J'essaierai de lire un autre titre de l'auteur.
S
Lu à la préhistoire ... et aurait bien besoin d'une relecture... Dos Pasos, c'était le monstre sacré.
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V
Oui, je sais bien et je l'ai compris mais il faut s'accrocher tout de même :)
A
Je sais que c'est un livre hyper connu, mais je ne m'y suis pas véritablement intéressée. Les extraits me font penser que je devrais peut-être ...
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V
ça reste une lecture exigeante, il faut le savoir avant de démarrer.
A
Une de mes lacunes littéraires parmi encore de nombreuses autres, mais elle m'avait semblé contournable. Visiblement, il faudrait que j'y regarde quand même de plus près...
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V
:) j'ai à peu près 44362156833566 lacunes littéraires :))
A
Une lecture qui m'avait perdue (mais j'étais jeune).
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V
Je peux le comprendre, j'ai eu du mal avec la seconde moitié aussi.
K
Mais je ne l'ai pas lu, et d'après ton billet, c'est un tort!
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V
Il est sans doute incontournable mais tout de même difficile d'accès (selon moi)
L
tiens tiens un livre que je relirai volontiers , bonne idée donc.
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V
super !
I
Oh que oui, il faut parfois se pousser à lire de ces classiques qui effraient ou font craindre l'ennui.. on est souvent agréablement surpris (je suis en train de vivre ce genre d'expérience avec Au-dessous du volcan). Je garde de ce Manhattan Transfer un souvenir très fort, non pas tant de son intrigue, mais de cette frénésie dans laquelle il nous emporte. Un grand grand livre...
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V
Malcom Lowry? je ne l'ai jamais lu! Oui, pour Manhattan Transfer, c'est clairement l'ambiance newyorkaise qui va rester...