J’étais persuadée d’avoir déjà lu cet auteur mais j’ai eu beau fouiller dans ma mémoire et dans mon ordi, non. Je dois le confondre avec un autre. Toujours est-il que je ne regrette absolument pas cette lecture.
A Brooklyn, en 1996, Bobby a 14 ans et, avec son copain, il ne sait comment remplir ses journées tristes et monotones. Leur dernière trouvaille : jeter des cailloux sur les voitures du haut d’un pont. Ça les fait rire jusqu’au jour où ce petit jeu stupide aura des conséquences funestes. Cinq ans plus tard, Lily, jeune fille un peu paumée essaye d’être écrivaine tout en démarrant des ateliers d’écriture qu’elle ose diriger. La rencontre avec Jack, un bonhomme qui n’a connu que des tragédies dans sa vie, va illuminer ses jours et la rassurer dans son quotidien. Francesca, elle, n’en peut plus de vivre avec sa grand-mère qui lui fait la morale à longueur de journée et elle se précipite sur une rencontre qui n’augure rien de bon. Sur fond de misère sociale, de règlements de compte, de malheurs à répétition, de magouilles, les malfrats vont croiser le chemin d’êtres devenus lumineux.
Excellent roman américain, il bénéficie à la fois d’une intrigue sombre et efficace et de réflexions très justes sur la société contemporaine, ses dérives et ses gangrènes. J’ai absolument tout adoré, la diversité des personnages, leur profondeur, ces rencontres inattendues qui sont autant d’étincelles dans cette vie pourrie d’un Brooklyn si glauque. Les protagonistes sont presque tous entre l’adolescence et l’âge adulte, et on retrouve cet entre-deux dans leurs réactions, ces hésitations à ne pas quoi savoir faire de son corps, de sa liberté, de sa vie. L’écriture est fluide, rythmée par des dialogues percutants et accompagnée de musiques derrière lesquelles on a l’impression d’entendre les klaxons et les rumeurs de la ville. C’est un roman noir, vif, remuant, sonore, alcoolisé, qui nous sort du schéma classique familial tout en évoquant - avec brio -le thème de la résilience. COUP DE CŒUR !
(ne lisez pas la quatrième de couverture qui en dit trop !)
Un des voyous que Jack tente d’effrayer : « Max ouvre. Grand, pâle et ridicule, il est vêtu d'une chemise jaune à manches courtes avec, dans la poche de poitrine, un porte-stylos rempli. Une chemise mal boutonnée – il a dû rater un trou – qui pend par-dessus son pantalon, un Dockers de contrefaçon. Des taches de sueur presque noires sous ses aisselles. Des chaussures de piètre qualité aux lacets défaits. Des lunettes premier prix à monture rectangulaire. Dans sa main, une petite brique rouge de lait entier, comme on en donne aux gamins à la cantine. Une traînée blanche et humide au-dessus de sa lèvre. Des cheveux pas coiffés, désordonnés, saupoudrés de pellicules. »
Une réplique qu’on ne peut trouver dans un roman français ! « J’ai déjà vu des pistolets. J’ai bossé dans des restaurants. »