Il y a Ethan, un journaliste venu de New York visiter Detroit et proposer un reportage sur la ville. Amateur d’urbex, il a de quoi faire dans cette ville où les immeubles abandonnés, les entreprises en faillite délaissées ne se comptent plus. Il va tomber sur une affaire de corruption et de détournement de fonds d’un lycée qui va lui coûter cher. Il y a aussi Tyrell, un lycéen qui vit avec sa mère et qui essaye tant bien que mal de contrôler ses accès de violence dans un monde hostile. Lorsque sa petite amie Sonja est contrainte de se prostituer pour pouvoir faire vivre sa famille, son sang ne fait qu’un tour. Et surtout, il y a Motor City, le surnom de la ville de Détroit qui a droit à la parole, elle aussi et qui assiste, impuissante, à la déchéance des entreprises, au règne de la drogue, aux injustices du quotidien, aux grèves, aux combats de chiens, à la misère et au chômage omniprésents.
Ce roman à plusieurs voix nous permet de faire une immersion dans cette ville aussi fascinante qu’effrayante. Les lueurs d’espoir sont ténues, la ville a accumulé les malchances et les déroutes et ses habitants donnent l’impression d’être abandonnés, comme seuls dans l’univers. Les personnages sont bien dessinés entre le gamin violent qui cherche à s’en sortir par le truchement d’un pitbull blessé qu’il recueille, sa mère infirmière qui ne compte plus ses heures de travail, ce journaliste trop curieux, ces flics pas si pourris qu’on pourrait le croire et finalement tous ces paumés qu’on sent délaissés de n’avoir jamais vu d’espoir. Il semblerait que Detroit, symbole de résilience par excellence, renaisse de ses cendres depuis quelques années et, qu’après un exode massif de sa population, les gens reviennent y vivre. Une lecture dépaysante, formatrice et riche en émotions.
J’avais déjà fait une halte appréciée à Détroit avec Il était une ville de Thomas B. Reverdy.
Merci Tiphanie pour ce prêt et ce voyage detroitien.
« Un jour, la population trouvera de nouveau le temps de me pouponner.
Mais ce n'est pas en me désertant qu'elle y arrivera. Ce n’est pas non plus en attirant l'attention avec des « ville la plus meurtrière du pays » que je brillerai comme avant. Mes entreprises tombent une à une, mes habitants fuient à la moindre occasion et les personnalités pouvant redorer mon blason se font rares.
Ma gloire se conjugue au passé.
Je suis une vieille dame fripée.
Ménopausée de l’industrie.
Mère d’artistes à l’agonie.
Matrone usée de sportifs.
Je suis éreintée. »