Marseillette, les années 50. Trois sœurs venues d’Espagne vivent dans un café tenu par l’aînée, Rita. La narratrice, Carmen, prend la poudre d’escampette le jour où elle a le coup de foudre pour le bel Antonio. Problème : le beau mec est toréador et la famille de Carmen contre cette boucherie. La jeune femme n’écoute que son cœur et s’enfuit avec son amant et ses copains pour vivre et travailler avec lui non loin de Madrid. Elle cuisine mais fait aussi passer des colis et des messages dont elle ignore le contenu. Un jour, brutalement, elle se fait arrêter et mettre en prison. Elle y restera croupir une peine injuste mais n’y fera pas que de mauvaises rencontres. Le retour au café va être plein de surprises.
Pour ce roman, je n’ai lu et entendu que des avis élogieux, sauf les chroniqueurs du « Masque et la Plume » sur France Inter qui ont démonté ce livre. Ce n’est pas mérité. On plonge dans cette histoire furieusement espagnole avec délectation et, à juste titre, puisqu’il y à la fois amour et action, rudesse et poésie. Le texte est bien écrit, peut-être parfois légèrement grandiloquent mais cela sied au contexte post-franquiste. J’ai aimé l’ambiance de ce bistrot, la relation entre les trois sœurs, les histoires d’amour. Des bémols tout de même : le début et la fin. Le début parce que tous ces prénoms sont lancés à la va-vite sans qu’on s’y retrouve vraiment (ça m’a toujours agacée de revenir en arrière), certains personnages auraient mérité d’être approfondis. La fin parce qu’elle m’a semblé vite expédiée ou peut-être est-ce parce que j’ai dévoré le roman trop vite. Entre Ecoute la pluie tomber et La commode aux tiroirs de couleur, je ne saurais lequel choisir.
Un passage à tabac en prison finit par un séjour à l’infirmerie : « Cette bienveillance que l'on ne croise jamais ici m'apaise. La morphine m'embrasse. Je nage dans un verre de lait tiède où fond une bille de chocolat. Une bouchée de la brioche vient d’y plonger. Elle chemine jusqu'à ma bouche. Un ballet de sirènes m’aide à la saisir, leurs coiffes sont des couronnes de fleurs d’oranger. Leur senteur enivrante me fait flotter à la surface crémeuse du liquide. C'est réconfortant. Au point de m'endormir. »