Je ne peux passer quelques mois sans lire mon auteur suédois préféré. Je suis tombée par hasard sur son tout premier roman.
Suède, 1911. Oskar est un dynamiteur et, à 23 ans, alors qu’il vérifiait une dynamite destinée au percement d’un tunnel, tout explose. Pourtant, Oskar survivra. Avec une main et un œil en moins. Celle qu’il côtoyait avant l’accident ne voudra plus de lui mais, par un concours de circonstances, c’est sa sœur, Elvira, qu’il épousera. Parfois au chômage, toujours au fait de l’actualité (deuxième guerre, crise du canal de Suez, courants socialistes et communistes), il vivra chichement mais heureux avec sa femme et ses trois enfants, toujours en quête de justice sociale.
C’est un roman assez étrange, elliptique et empli de poésie. On ignore tout du narrateur qui vient discuter régulièrement avec Oskar dans le petit sauna où il vit en bord de mer. Des va-et-vient entre les différents moments du passé et le présent sont faits. Même si ça n’a rien à voir avec les futures enquêtes du commissaire Wallander, on trouve déjà la marque de fabrique de Mankell : une écriture sobre et efficace, les thématiques de la solitude, des réflexions politiques, de la mélancolie, les doutes d’un homme assez âgé (et Mankell n’a que 25 ans quand il écrit le livre !), le portrait d’une société gangrénée. Sans être totalement emballée, j’ai bien aimé ce roman que j’ai trouvé émouvant pour sa douce tristesse et proche de l’univers d’un Sorj Chalandon quant à cette vision du monde en déclin.
« Le récit est superficiel. Laconique, comme Oskar. Il a des failles, des vides. Mais la surface est poreuse. Lentement elle commence à se retrousser et à s’ouvrir. Derrière la surface, l’histoire. L’histoire des changements. »
« L’histoire d’Oskar est comme l’iceberg : ce que tu en vois n’est qu’une petite partie. La plus grande partie est cachée sous la surface. Là se trouve la lourde masse de glace qui s’équilibre avec l’eau et rend la vitesse et le cap stables. »