Pierre vit dans sa voiture sur les aires d’autoroute. Ingrid, qui fut sa femme, se saoule à longueur de journée, seule dans sa maison. Pourquoi ? leur fille a disparu quelques mois auparavant. Et l’histoire se répète : Marie Mercier, 12 ans, se fait kidnapper sur l’aire des Lilas, non loin de ses parents qui se disputent. La course contre la montre démarre mais les indices sont inexistants, les témoins absents et les possibilités pour le ravisseur de réussir si nombreuses. La fliquesse enquête comme elle peut dans un monde glauque et puant entre une prostituée qui s’y connaît bien en aires d’autoroutes, des chauffeurs de camion crado et un directeur de vicelard. Pierre ne lâchera jamais l’affaire non plus, trop obsédé par l’idée de retrouver le kidnappeur de sa fille et de se venger.
Une belle découverte faite grâce à Alex, merci ! Un polar brut de décoffrage, sans concession ni fioritures. Le style est sec, les phrases courtes, parfois averbales. Les flèches sont précises, cruelles et efficaces. Le thème de l’enlèvement de l’enfant est difficile et la tragédie est transcrite avec une justesse assez bluffante. Passée la première impression de sordide mêlé au vulgaire, il faut bien reconnaître que certains passages sont de toute beauté, dégageant une poésie âpre et abrasive. Comme j’aime, de temps en temps, ce genre de roman : cru, dérangeant, fascinant. Âmes sensibles s’abstenir (c’est d’ailleurs le genre de livre qu’il ne faut pas laisser traîner non plus !)
Je lis cet auteur suisse pour la première fois et j’y retournerai !
« Le monde commence son troisième jour sans la petite Marie Mercier. Julie arrache la page du calendrier, la froisse, la jette par la vitre, et c’est comme arracher, froisser et retirer une couche d’espoir de la retrouver. Même morte. »
« La vie n’est pas linéaire. La vie est une juxtaposition de droites qui se plient. On se claque sur soi-même et on finit par être quelqu’un d’autre, par ne plus se reconnaître, ou alors on se reconnaît à travers un buvard, quand l’eau pompe et révèle ce qu’il y a en dessous. »