Emmanuelle Maisonneuve a toujours été passionnée par la gastronomie, la cuisine, la bonne chère, le goût, les saveurs et les parfums. Collectionneuse de vinaigres (c’est original), elle postule au poste d’inspectrice pour Le Guide Michelin. Et c’est un jour béni par les dieux quand enfin on l’appelle pour lui dire que sa candidature a été retenue. Après trois semaines de formation intense, Emma entre dans le club très fermé des inspecteurs. Le métier s’avère plus exigeant et plus chronophage que ce qu’elle pensait. Parcourant les villes et villages de France, Emma doit soit manger incognito midi et soir dans les restaurants (et ne prendre que le menu du jour, le petit livre rouge économise aussi), soit se présenter en tant qu’inspectrice Michelin et questionner, contrôler, épier et tester en une demi-heure les chambres d’hôtel. Après ce parcours du combattant où le foie gras et la riche cuisine grasse et roborative deviennent sa hantise, elle doit encore s’atteler à rédiger les rapports – de mémoire. Son couple en pâtit, les responsabilités aussi – elle est « un ange ou un démon » pour les chefs. Celle qui est la première inspectrice femme annonce qu’elle ne le sera que quatre ans. Un voyage au Japon la convainc qu’elle préfère la simplicité et la pureté des aliments à l’exubérance des plats français.
J’ai adoré ce voyage gustatif autant surprenant qu’instructif. Emma est douée, cet ouvrage embaume une appétissant effluve, la douce folie de notre inspectrice est contagieuse et j’ai pris un très grand plaisir à découvrir ce métier un peu sadique (manger du foie gras deux fois par jour !!) mais tellement noble. Gourmande comme je suis, j’hésite à mettre un coup de cœur car la plupart des dessins m’ont plu, certains se rapprochent du photoréalisme mais d’autres « à la japonaise », montrent des personnages s’esclaffant trois cases sur quatre. Je me suis régalée, presque rassasiée et je salue le travail de ces trois femmes artistes et créatrices, passionnées, on le sent. Ah je n’avais rien senti de similaire depuis Le Gourmet solitaire !
L’incomparable gastronomie japonaise … : « Les légumes ont un goût pur, naturel. Comme s’ils sortaient tout juste de terre. Tofu frit, enrobé de sésame, konnyaku – surprenant, ce tubercule – champignons, haricots, yuba – délicieuse, cette peau de tofu – une plante aquatique incroyable ! et légumes en tempura. C’est beau et c’est bon. Le tofu est souple et crémeux. Il est si différent de celui que je connais. »
Quand Emma compare la cuisine et sa relation avec son compagnon : « C’est comme un mauvais accord mets et vin. Même si indépendamment le plat est bon et le vin aussi, ils peuvent ne pas aller ensemble. Et ce ne sera ni la faute du plat ni celle du vin. Mais le résultat sera mauvais. On aura beau essayer d’arranger ensemble avec des épices, ou un trait de sauce, rien n’y fera, le mariage de la carpe et du lapin… »