Jack Waterman est un romancier qui n’aime pas les livres qu’il écrit. Un peu veule et maladroit, il emmène dans son Volks une jolie métisse élancée aux origines indiennes surnommée la Grande Sauterelle. Jack est à la recherche de son frère qu’il n’a plus vu depuis des années et qui lui a envoyé une mystérieuse carte postale. La Grande Sauterelle, grande lectrice, beaucoup plus futée que son compagnon de route, va l’aider à relever les indices de la carte et retracer le parcours de Théo, le mystérieux frère disparu. En partant de la Gaspésie, le Volks va sillonner le Canada, se rendre à Chicago puis suivre la piste de l’Oregon. De campings en hôtels, Jack et la Grande Sauterelle s’apprivoisent, se complètent, s’apprécient et se respectent. Avec un petit chat noir qui aime à se blottir dans la capuche de la jeune fille, ces voyageurs vont faire des rencontres qui les aideront à accéder à une voie plus sereine, plus sage. Ce n’est qu’à la toute fin qu’on apprend ce qu’est devenu Théo mais finalement le voyage valait peut-être plus que la destination finale.
Ce roman traînait dans ma PAL depuis pas mal de temps et il me faisait un peu peur. J’ai eu bien tort de me méfier parce que je l’ai vraiment beaucoup aimé. Ce road trip à travers les Etats-Unis est non seulement une formidable ouverture vers les autres et le monde mais aussi une occasion de se retourner sur soi-même, son passé, sa vie à venir, qui on est vraiment. Une quête. Ce duo improbable extrêmement attachant est un bel exemple d’humanité et de tolérance. Certains passages sont drôles, celui où Jack rêve à l’écrivain idéal, celui qui trouve la première phrase de son livre à venir dans un bar, un soir, qu’il la note sur une serviette et que la suite lui arrive comme par magie. D’autres passages sont émouvants et l’écriture, tout en douceur, donne dans une simplicité admirable. Une belle découverte avec cet auteur québécois qui me donne envie de traverser l’Atlantique ! (J'avais moins aimé Chat sauvage)
La Grande Sauterelle : « je ne sais jamais à l’avance ce que je vais faire. » ; « Quand on est sur la route, je suis très heureuse. »
Jack : « Chaque fois que je vois un vieil homme au bord d’une rivière ou d’un fleuve, il faut que j’aille lui parler - c’est plus fort que moi. » ; « Ce que les vieux contemplent quand ils rêvent au bord ’est leur propre mort; je suis maintenant assez vieux pour le savoir. Et moi, je m’approche d’eux parce qu’au fond de moi, il y a une ou deux questions que je voudrais leur poser. Des questions que je me pose depuis longtemps. Je voudrais qu’ils me disent ce qu’ils aperçoivent de l’autre côté et s’ils ont trouvé comment on fait pour traverser. »
« Ils étaient partis de Gaspé, où Jacques Cartier avait découvert le Canada, et ils avaient suivi le fleuve Saint-Laurent et les Grands Lacs, et ensuite le vieux Mississippi, le Père de Eaux, jusqu’à Saint Louis, et puis il avaient emprunté la Piste de l’Oregon, et, sur la trace des émigrants du 19ème siècle qui avaient formé des caravanes pour se mettre à la recherche du Paradis Perdu avec leurs chariots tirés par des bœufs, ils avaient parcouru les grandes plaines, franchi la ligne de partage des eaux et les montagnes Rocheuses, traversé les rivières et le désert et encore d’autres montagnes, et voilà qu’ils arrivaient à San Francisco. »