Ce gros album de 207 pages suit les pas de Freddie, un mioche de douze ans, qui n’a pas eu de chance : vivant seul avec son père et son frère, il voit son père fuir, du jour au lendemain, pour trouver du travail à Détroit. Son frère se fait arrêter pour agression et vol et Freddie, pour éviter l’orphelinat, décampe le plus vite possible. Il va rencontrer des Hobos, ces êtres en errance qui se déplacent en se cachant dans des wagons de marchandises. Et c’est justement dans un wagon que Freddie va se lier d’amitié avec celui qui se fait surnommer le roi d’Espagne, un type malade et à moitié fêlé mais d’une grande générosité envers le garçon. De rencontres en déceptions, Freddie va apprendre à grandir et à survivre ; le microcosme créé par les Hobos va tour à tour l’adopter et le rejeter
Récit initiatique par excellence, cette fresque sociale dépeint la vie des miséreux dans les années 30, aux Etats-Unis. L’histoire est prenante et instructive. Freddie, du haut de son innocence, cherche vainement son père, assiste à des querelles entre adultes, participe à l’Histoire avec un grand H avec ses chômeurs, la Grande Dépression et ses types à la Jesse James. Si j’ai regretté qu’il y ait certaines longueurs, j’ai apprécié la force du texte associé à un dessin en noir et blanc qui rend parfaitement hommage à ces êtres marginaux dans une Amérique ébranlée. Les plus : une belle introduction de James Vance qui explique la genèse de l’œuvre et remercie son collaborateur, Dan Burr, et une intéressante postface revenant sur la crise de 1929, les références historiques et littéraires (il y a évidemment du Kerouac et du Mark Twain là-dedans) et même les codes hobos (reproduits ci-dessous). Encore une belle découverte BD !
« j’avais bien sûr réalisé que le monde n’avait pas vraiment changé, ce qui était différent, c’était la façon dont je le voyais. »
« il y avait ceux qui refusaient de se cacher, qui criaient à la face du monde « ça ne peut pas continuer ». Et il avait les quelques-uns qui avaient trouvé le secret : en restant ensemble, ils pouvaient éviter la destruction totale. Ils arrivaient même à résister. »