L’amie prodigieuse tome 3.
Le hasard a fait que j’ai attendu moins de temps que ce que j’avais prévu entre la lecture du 2è et du 3è tome.
Elena vient de sortir son premier livre - écrit presque d’une traite, facilement – et qui connaît une belle célébrité et une critique favorable. Fiancée à l’intellectuel Pietro, elle revient dans le quartier napolitain de son enfance et y retrouve, entre autres, Lila. Cette dernière élève son fils Gennaro avec l’aide du dévoué Enzo, tout en accomplissant un boulot d’ouvrière dans l’usine du copain de Nino qui, non seulement, exploite ses employés mais se montre aussi des plus entreprenants avec la toujours séduisante Lila. Si les jeunes femmes sont à un tournant de leur vie, l’histoire de l’Italie, à la fin des années 60 et au début des années 70, se retrouve également chamboulée par des soulèvements, des meurtres ayant pour objectif de dénoncer les conditions de travail des ouvriers mais aussi de prôner le féminisme, de libérer la femme. Apparaît alors la pilule, et avec elle, quelques débauches assumées par de jeunes femmes qui se veulent libres, dont ni Lenù, ni Lila ne font partie.
C’est donc une Elena pimpante et victorieuse qui revient dans le quartier de son enfance, et on l’appelle à l’aide parce que Lila semble avoir perdu la tête. Lila va se confier, peut-être une dernière fois, et montrer de petites faiblesses qu’on ne lui soupçonnait pas. Ensuite, Elena va fuit et se marier, trouvant peu de réconfort dans sa nouvelle vie bien rangée, s’éloignant très rapidement de celui qu’elle pensait aimer. Lila va, au contraire, s’installer dans le quartier de son enfance, s’allier avec les Solara, cette famille malhonnête et corruptrice, et se former aux machines IBM, ancêtres de nos ordinateurs.
Si j’ai bien aimé les histoires d’enfants du premier tome, je me suis ensuite prise de passion pour les amitiés et les amours de Lila et Lenù dans le 2è et j’ai totalement adoré ce 3è opus, beaucoup plus dense, plus riche que les précédents : sans répit, l’auteur nous emmène dans la petite et la grande Histoire, il nous propose deux parcours de vie : celui d’Elena, fille plus réservée qui, malgré ses études et la publication de son livre, se retrouve vite cantonnée au statut de mère de famille ; et celui de Lila, fantasque et toujours imprévisible, souvent au bon endroit au bon moment, capable de saisir la moindre opportunité même si elle doit, pour cela, mettre ses principes de côté, éloigner son fils. Chaque page est une surprise, douce ou violente. Ça foisonne de rencontres, de ruptures, de retrouvailles, de mensonges, de féminisme. Ce monde anti-manichéen passionnant décrit de manière si subtile les relations humaines si complexes que je brûle d’impatience de lire le dernier volet de cette saga inoubliable.
Lila à propos d’Elena et elle : « On a fait un pacte, quand nous étions petites : la méchante, c’est moi. »
Quand Elena fait le portrait de Lila : « Hurler et se déchaîner contre les autres, faire payer à tout le monde sa propre incapacité à trouver un équilibre. »
Elena de Lila : « même lorsque je vivais dans d’autres villes et que nous ne nous voyions presque jamais, même lorsqu’elle ne me donnait pas de nouvelles selon son habitude, et que je m’efforçais de ne pas lui en demander, son ombre me stimulait, me déprimait, me gonflait d’orgueil ou m’abattait, sans jamais me permettre de trouver l’apaisement. »