Le narrateur est un Italien, père de deux garçons. L’aîné, Andrea -surnommé Andy- est autiste. Pour ses dix-huit ans, le père décide de lui offrir un voyage hors du commun, celui de traverser les Etats-Unis. Les deux hommes seront seuls, livrés à eux-mêmes, avec les risques potentiels qui sont décuplés quand un adolescent autiste voyage, lui qui a tant besoin de repères, de rituels, de gestes rassurants. Partant de Miami, père et fils vont d’abord bourlinguer à moto, un moyen de transport qu’Andrea adore, jusqu’à Los Angeles. Les chemins et les rencontres vont les mener vers le Sud, toujours plus vers le Sud : le Mexique, le Guatemala et enfin le Brésil. Globalement, le voyage dépasse les espérances du père, Andrea s’ouvre au monde, en demande toujours plus, avec une envie croissante d’aller plus loin, de rencontrer, de grandir… Avec un espoir un peu fou, le père croit toujours à une possible guérison. Pourtant, on ne voit pas tant souffrir mais plutôt découvrir avec délectation les joies des baignades, les beautés du monde, les multiples libertés et même les charmes de l’amour. Avec une pureté et une innocence singulières.
Ce roman est un magnifique cadeau. Il offre une vision nouvelle, attachante et bouleversante de l’autisme. Andy passe un temps fou à renverser et vider des flacons, à colorier, systématiquement il enlace les gens qu’il rencontre (d’où le titre du livre), il rit quand quelqu’un se met en colère, il marche sur la pointe des pieds, il dévore gloutonnement ce qui lui tombe sous la main… le lecteur ne cesse de se demander si son monde n’est pas plus beau que le nôtre, s’il faut à tout prix le faire entrer dans notre moule et devenir, comme Andrea le dit lui-même un « Terrien ». Le papa, quant à lui, est tout aussi émouvant, un père courage, il est rare de pouvoir le dire mais c’en est un, un vrai, un beau, un grand, qui pense à son fils avant lui-même, qui lui offre le plus grand des présents, qui va de l’avant, toujours. Une belle leçon quand on voit une majorité de parents « abandonner » leur progéniture dite « normale » et facile… Une très jolie lecture, un road-trip original où le voyage humain prime.
Fulvio Ervas est un auteur de romans noirs, il a écouté le père d’Andrea raconter son périple au cours d’un dialogue qui a duré plus d’un an.
Ce roman a été glissé dans une box qui m’a été offerte… Deux bouquins/mois, 6 mois durant, voilà qui va encore gonfler ma PAL !
« Certes, il est barré, mais pas hors du monde. Il arrive d’un ailleurs où prévalent d’autres codes, d’autres signes, d’autres beautés qu’il transfère parfois jusqu’ici, quand il le veut et quand il le peut. »
« La plage est en pente raide, à Acapulco, et les vagues qui s’y écrasent sont énormes et puissantes. On est sur le rivage avec de l’eau jusqu’aux genoux, et soudain survient une lame, qui nous saisit et nous tient en suspens. C’est à la fois grisant et hypnotique. Andrea joue à se laisser soulever sans relâche. Ce n’est pas seulement une question de résistance physique ni de répétition compulsive. Il est heureux. Un bonheur immédiat et viscéral, la joie du pingouin glissant sur la banquise, de la baleine bondissant hors de la mer, de l’albatros planant dans le ciel, insouciant de la gravité. »