Le héros et narrateur de ce texte est un collégien qui se fait insulter et frapper par ses camarades. Son père lui en veut de se laisser faire ainsi, de ne pas savoir répondre et rendre la pareille. Il veut faire de lui un « homme » qui roule des mécaniques et sache cogner. Seule Sarah le comprend, le défend, le protège… surtout de cette phrase lancée par les autres garçons « t’es pédé, de toute façon. » Car ça non plus le père ne veut pas l’entendre. Il faut que le fils rentre couvert de bleus, de blessures, de boue, de maux au cœur surtout, il faut qu’il menace de se tuer, il faut qu’il fracasse le miroir de la salle de bain pour qu’enfin, son père ouvre les yeux et prononce les quelques paroles de réconfort tant attendues.
Roman sur l’homosexualité, sur le regard des autres mais aussi sur l’éducation, ce texte de quelques dizaines de pages se lit d’une traite et ne s’oublie pas. Ce qui m’a le plus frappée parce que je le rencontre si souvent dans mon métier de prof, c’est l’incompétence du père. De nombreux, trop nombreux parents, abandonnent leurs enfants, les laissent vivre avec leurs problèmes, leurs difficultés, leur mal-être. Ils les nourrissent, les habillent, leur achètent des cadeaux et ça s’arrête là. Ne parlent pas, n’écoutent pas.
Quant à l’homosexualité évoquée dans ce roman, j’ose espérer une évolution des mentalités, enfin. J’ai fait lire Les Lettres de mon petit frère de Christophe Donner à des 5ème, petit livre qui traite subtilement de la question de l’homosexualité. Tous les élèves sauf un ont été offusqués à l’idée de rejeter ce grand frère en raison de ses préférences.
A copier 100 fois est un livre choc, touchant par la solitude et le désespoir évoqués par un petit garçon, révoltant à cause de l’attitude imbécile des autres. A mettre entre toutes les mains.
« Je veux pas apprendre à me battre. J’ai pas envie papa, pourquoi j’ai pas le choix ? Des claques, des balayettes, des coups de poing, des manchettes qui répondent à des claques, des balayettes, des coups de poing, des manchettes. A quoi ça sert tout ça ? papa m’a dit cent fois d’être un homme. »
« j’aimerais bien cesser de toujours danser d’un pied sur l’autre en me demandant dans quelle direction fuir, comme un petit animal en bas de la chaîne alimentaire, obligé de se protéger de tout ce qui évolue autour de lui. J’aimerais bien me sentir à l’abri quelque part. »
« J’ai perdu l’appétit, à force de manger des assiettes de silence et des bols de regards accusateurs à table avec papa. J’avale les reproches et puis je vais au lit. Dès le matin au menu, c’est soupe à la grimace. Je regarde mon ventre, des bleus se perdent dans les vagues de chair et d’os. »