- Derniers jours d’une courte vie -
Emmett Till a 14 ans, il n’est pas timide, il est même plutôt hâbleur et dans ce Mississipi des années 50, c’est une faille. Emmett vient de Chicago et il est hébergé par son oncle. Mais, dans le Mississipi, on s’efface quand on est Noir. On baisse les yeux devant les Blancs, on se tait et on s’écrase. Ça, Emmett a du mal à l’admettre. Quelques jours après son arrivée dans le Sud, il entre dans une épicerie, convaincu qu’on peut lui vendre des bonbons même s’il est noir et car il a de l’argent, il se fait violemment chasser par la patronne, une belle femme blanche qui ne veut pas de Noir dans son commerce. Suite à ça, les témoignages divergent, Emmett aurait peut-être sifflé la jeune femme dans la rue. Toujours est-il que le mari de Carolyn Bryant veut se venger du garçon. Accompagné de son demi-frère Milam, Roy s’applique à enlever Emmett à sa famille, à le torturer et à le battre, avant de le jeter dans un étang. Le corps de l’adolescent est remonté quelques jours plus tard. Les deux hommes sont accusés, un procès express a lieu, les douze hommes blancs du jury acquittent Milam et Roy. Puisqu’ils ne peuvent être jugés deux fois pour le même crime, les deux criminels avouent leur meurtre dans le magazine Look, article pour lequel ils sont même rétribués…
L’auteur de la BD s’est inspiré d’une histoire vraie qu’il n’a, apparemment, ni embellie, ni traficotée mais qu’il essaye de nous rendre le plus sobrement et le plus simplement possible. C’est une totale réussite. Même si le crime de Roy et Milam est affreux et barbare (ils vont jusqu’à arracher les yeux d’Emmett), les suites en sont encore plus révoltantes : l’acquittement des monstres, le silence des autres Blancs, le semblant de dédain des coupables se sachant impunis. C’est la même année, en 1955, que Rosa Parks refuse de céder sa place dans le bus. Deux événements qui font avancer la lutte contre la ségrégation et le racisme. Deux êtres qui contestent la soi-disant suprématie du Blanc.
Une BD nécessaire, une BD plus qu’instructive, une BD qui se souvient et qui maintient en éveil, appelle à la prudence et à la tolérance.
"18/20"