Ou quand la putréfaction côtoie le grandiose…
C’est l’histoire d’une errance, celle d’un homme, Vernon Subutex, qui a tout perdu et se retrouve à la rue. Son ami et star de la musique, Alex Bleach, est mort, et c’est lui qui lui payait le loyer. Vernon va squatter chez des potes, renouer avec des nanas à qui il plaisait bien, dormir à droite, à gauche. Ancien disquaire, la cinquantaine bien entamée, il repense à tous ceux qu’il a déjà vu partir, morts trop tôt. Il n’ose avouer sa véritable situation, prétextant un passage en France avant de retourner vivre au Canada. Ses rencontres et ses souvenirs se font sur fond sonore de rock, ça sent l’alcool - et la drogue - et le sexe. Les personnages sont tous des paumés, dépendants d’une substance illicite ou non, acteurs de film porno, dépressifs, aigris, bourreaux ou victimes, et souvent en mal d’amour. Vernon semble traverser ce monde qu’il connaît très bien pour s’en détacher progressivement. Le sentiment d’indifférence l’emporte, il préférera sa liberté de clochard aux contraintes de l’amant entretenu.
Le texte de Despentes est d’une lucidité effroyable. Elle met dans la bouche de certains personnages toute la haine et la rancœur qu’on peut trouver dans notre société, le racisme, le sexisme, l’abandon de soi. Elle brosse le portrait d’un Paris violent et cruel, d’une société âpre et en déclin. Acide et efficace, l’écriture laisse à peine au lecteur (ou auditeur) le temps de souffler. Beaucoup ont parlé de claque, c’est vrai qu’on n’en ressort pas indemne, et, même si je n’ai pas tout aimé, j’apprécie les livres qui bousculent et je ne manquerai pas de lire ou d’écouter la suite. A souligner la remarquable interprétation du lecteur Jacques Frantz qui, avec une telle voix, incarne si bien Vernon et son monde…
Merci Audiolib !