Je ne connaissais pas du tout le Marcel Aymé dramaturge, j’en ai découvert un pan avec cette comédie en quatre actes.
C’est l’effervescence chez les Maillard. Le père de procureur est très attendu… mais oui, il a gagné, il réussi à obtenir la tête de son accusé ! Malgré sa bonne tête sympathique, Valorin est condamné à mort pour meurtre. L’épouse Juliette est si fière de Maillard, ses amis sont un peu jaloux, son copain Bertolier procureur lui aussi, ne s’en cache pas « c’est votre troisième tête. Pensez-y bien mon cher. Votre troisième tête. A trente-sept ans, c’est joli. » Avant de démarrer la petite sauterie dans la joie et dans la bonne humeur, on surprend Maillard avec Roberte, la femme de Bertolier. Ils sont amants depuis quelque temps. Mais ils ne sont pas seuls, … coup de théâtre : Valorin, l’accusé condamné à mort par Maillard apparaît, armé d’un revolver. Il s’est évadé et demande que la véritable justice soit rendue, car il est innocent. Son alibi est sans faille : il était avec une femme le soir du meurtre, ce n’est pas lui le coupable. Il ignorait le nom de cette femme mais il la reconnaît désormais : c’est Roberte ! Alors que Maillard a tout intérêt à camoufler la vérité, Bertolier va découvrir sa débauchée de femme sous un nouveau jour et Juliette, l’épouse prude et naïve va s’éprendre du beau Valorin.
Certes, la pièce a l’apparence d’un vaudeville classique où on s’échange les épouses et où les quiproquos se succèdent mais c’est bien plus que ça. En situant la pièce en Poldavie, ce pays imaginaire, Marcel Aymé, en fait une satire de la justice digne de La Farce de Maître Pathelin. Les procureurs sont les types les plus malhonnêtes du monde et c’est un délice d’entendre Maillard revendiquer une certaine morale sortie du chapeau quand lui-même est en danger de mort. Tous les personnages sans exception sont vils, sournois et hypocrites. L’ensemble respire la cruauté, la mauvaise foi. La pièce a été créée à Paris au théâtre de l'Atelier en 1952, dans une mise en scène d'André Barsacq. Elle fit immédiatement scandale prônant explicitement l’abolition de la peine de mort.
J’ai beaucoup aimé ce texte bien écrit, audacieux, truculent et original. Dommage qu’il souffre de quelques longueurs pas toujours nécessaires. Il me semblait avoir entendu parler d’une représentation parisienne mais je n’ai pas retrouvé l’info. Quelqu’un pourra peut-être m’en dire plus !
Renée, une amie de la famille : « Être l’épouse d’un homme qui dispose de la vie des autres, voilà qui doit être passionnant ! »
Et une pièce de plus pour le challenge spécial Théâtre d’Eimelle !