Motojirô Ikajii est un écrivain japonais reconnu, apprécié et étudié dans les écoles nipponnes. Sa brève vie (31 ans !) a été marquée par la perte d’êtres chers et par la tuberculose qui a eu raison de lui.
A travers huit nouvelles, un narrateur qui n’est jamais le même s’exprime à la 1ère personne pour peindre le paysage qui l’entoure, évoquer des amis, s’interroger sur ses sentiments. Des points communs entre les textes jalonnent le recueil et affirment une personnalité toute particulière : la présence des animaux, l’impact de la nature sur l’homme, l’omnipotence de la tuberculose et, en filigrane, l’omniprésence de la mort. N’allez pas chercher une once de gaité, il n’y en a point. Tout en douceur et en raffinement, comme seuls les Japonais savent le faire, la phrase allie prose et poésie pour un résultat qui, semble-t-il, nous fait légèrement décoller les pieds du sol. Ponge, Baudelaire, Verlaine me sont très vite venus à l’esprit. Ce qui m’a également surprise, c’est la part d’absurde, voire de fantastique, de ces textes. Mise à part une écriture ciselée, c’est toute une vision de la vie et de ce qui nous entoure qui est présentée.
Margotte, chez qui j’ai pioché cette idée de lecture, en parle bien mieux que moi, et quand elle évoque des « haïkus développés sur plusieurs pages », je trouve la comparaison très juste.
« Sous les cerisiers sont enterrés des cadavres ! » est une des phrases mythiques de l’auteur. Moi j’ai choisi un extrait qui parle du chat.
« L’oreille du chat est vraiment une drôle de chose. Mince et froide, elle est couverte de poils ras au-dehors et luisante au-dedans, comme la peau d’une pousse de bambou. Elle est d’une matière indéfinissable, à la fois dure et tendre, tout à fait particulière. Depuis mon enfance, j’avais toujours eu une envie irrésistible d’y donner, clac, un coup de poinçonneuse à tickets. Imagination cruelle ? Non. Elle était entièrement due à l’étrange pouvoir de suggestion que possède cette oreille. »
Merci Margotte !